L’aquaponie : une alternative à l’agriculture conventionnelle ?

Forme d’agriculture innovante qui combine un élevage de poissons à la production de fruits et légumes, l’aquaponie émerge en Europe avec des projets ambitieux, de Berlin à l’Ardèche. Après l’industrie, c’est au tour de l’agriculture de faire son entrée dans l’économie circulaire !

Rédigé par Emmanuelle Bertrand, le 7 Mar 2016, à 13 h 45 min
L’aquaponie : une alternative à l’agriculture conventionnelle ?
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L’aquaponie en ville : c’est parti à Berlin

C’est là un autre de ses avantages : une ferme aquaponique peut être mise en place partout, même en ville, supprimant ainsi la nécessité d’importation alimentaire depuis d’autres pays, et permettant donc de faire des économies de transport.

Depuis deux ans et demi,  la société Efficient City Farming Farmsystems (ECF) a installé sur une friche industrielle berlinoise, une mini-ferme aquaponique élevant des poissons d’eau douce (sandres et perches) et cultivant 400 variétés de végétaux (salades, tomates, poivrons, fines herbes…) sans pesticides ni engrais chimiques.

© CC, ryan griffis

© CC, ryan griffis

Ce prototype qui a servi de démonstrateur devrait être suivi dans le courant de l’année 2015 par la création d’une ferme de grande taille au sud de Berlin, la première d’envergure : 1 200m2 et un investissement de 1,1 million d’euros. Pour se procurer les produits de cette production originale, les Berlinois pourront se rendre dans le magasin de la ferme ou se faire livrer avec un système d’abonnement. 

Et en France aussi, avec le projet solidaire d’Aquaponie Valley en région Rhône-Alpes

Le projet Aquaponie Valley en Ardèche, porté par Zak Abbaz est une ferme aquaponique innovante et responsable, qui d’après  Zak Abbaz, n’empruntera la tendance qui se développe outre-atlantique où les détournements de l’aquaponie par l’utilisation d’intrants chimiques ont été constatés.

Innovante et responsable aussi puisqu’elle est destinée à employer des personnes porteuses de handicap de l’ESAT de Beauchastel (07), où se situe l’exploitation pilote. Une action qui vise à aider, réorienter et valoriser le travail des personnes vulnérables.

Le projet est également très original quant au choix des produits eux-mêmes : spiruline, plantes médicinales, plantes aromatiques plutôt que les habituelles salades et tomates…

© CC, Aquaponie Valley

© CC, Aquaponie Valley

L’élevage de poisson restera traditionnel : la truite arc-en-ciel, faute de législation française plus souple sur les poissons exotiques comme le tilapia pourtant idéal en aquaponie. Autre différence, le projet français serait plus autonome énergétiquement que ses concurrents par le recours aux énergies vertes. Zak Abbaz, déjà soutenu par la Croix Rouge Française et d’autres partenaires institutionnels et économiques, devrait lancer cette année une petite unité de production de 100 m2 avant de voir plus grand et plus loin notamment dans le Nord de la France, où abondent les friches industrielles. Reste encore à boucler le financement du projet…

Un coût non négligeable

Car l’aquaponie représente un coût non négligeable qu’il convient cependant de nuancer du fait de son coût environnemental très faible. Il faut en effet évaluer les coûts différemment, estiment ses défenseurs, qui soulignent également l’opportunité que l’aquaponie offre aux pays de l’Afrique sub-saharienne, en situation de déficit d’eau. Le choix des produits proposés semble également un facteur clé de succès.

© CC, Ryan Somm

© CC, Ryan Somm

Privilégier les fruits et légumes qui supportent mal le transport paraît essentiel pour l’aquaponie qui fonctionne en circuit court, pour contre-balancer le déficit potentiel de goût de produits cultivés hors-sol par rapport à ceux traditionnellement cultivés dans la terre.

Bonne chance à l’aquaponie, pourquoi pas « made in France », qui pourrait bien, sinon révolutionner l’agroalimentaire, mais tout au moins offrir une complémentarité durable et sûre à l’agriculture conventionnelle.

Pour en savoir plus : http://hydroponie.fr/aquaponie-valley

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Institutrice, ex chef de projet et journaliste multimédia, écolo convaincue, Emmanuelle Bertrand est également responsable d’une association de...

12 commentaires Donnez votre avis
  1. ok

  2. Bonjour,

    Juste quelques remarques sur l’article et les commentaires.
    A ma connaissance les fermes Lufa (Montréal et Laval) ne pratiquent pas l’aquaponie. Pour les USA c’est surtout FarmedHere qui est commercialement très avancé.
    Concernant le Tilapsia, il est interdit en France car le législateur considère qu’il s’agit d’une espèce potentiellement invasive. Ce poisson est légal en Suisse par exemple (cas des Urban Farmers à Bâle). Il est plus simple à élever car peu difficile (température, pH, EC..).
    Concernant la technique elle-même. Il est très complexe d’avoir un système complètement équilibré et un suivi très pointu est nécessaire. Souvent le circuit n’est pas parfaitement fermé et des ajouts de minéraux essentiels aux végétaux sont ajoutés dans les eaux chargées issues des poissons. A noter que ASTREDHOR (et d’autres) travaillent et expérimentent sur l’aquaponie (station RATHO à Dardilly-Lyon) dans le cadre du programme de recherche pluridisciplinaire APIVA.

  3. Bonjour et merci pour les infos que vous partagez sur l’aquaponie. Démarrer en aquaponie est toujours angoissant pour le débutant qui a peur de faire des erreurs et de ne pas avoir correctement cyclé son système. Heureusement des sites comme le votre existent pour aider les novices. Bravo ! permacube.fr

  4. Bonjour,
    Je pense que l’on peut limiter le besoin en énergie en utilisant par exemple le système CHOP2 en aquaponie… celui ci n’utilise qu’une pompe (qui peut être alimenter par un panneau solaire ou autre éolienne …) et la gravité cf aquaponique.fr/techniques-culture/lit-culture/systeme-chop-2/

  5. Pas forcément besoin de tilapias…
    Marc Laberge au Québec utilise des truites, et ça marche plutôt pas mal pour lui!
    –>200 kg de truites et 5000 têtes de laitues… par semaine!
    (CULTURES AQUAPONIQUES M.L.)

  6. Pas forcément besoin de tilapia… surtout si ça implique qu’il faille chauffer l’eau.
    Marc Laberge au Québec se débrouille très bien avec des truites et des salades:
    cultures-aquaponiques.com/index_fr.htm

  7. Bonjour, vous évoquez ici le même problème rencontré dans l’aquaculture d’étang que l’on appelle off’flavour. Celui-ci est contrôlé par un affinage de la chaire grâce à une mise à jeun prolongée. Dans le cas des circuits fermés, les travaux de la station INRA de la PEIMA démontre qu’il n’y a pas d’incident significatif sur le goût du poisson.

  8. Juste une question : que donne t on à manger aux poissons ?

    • Ca dépend de l’espèce; et ça dépend de la stratégie (but commercial vs hobby). Si l’on élève des poissons herbivores, des plantes seront la bonne source de nourriture. Pour les poissons carnivores (ce qui est loin d’être rare), on peut choisir de les nourrir avec des insectes produits « maison » si l’on est « contre » l’aliment commercial… mais c’est assez laborieux. Sinon on peut opter pour de l’aliment commercial à base de blé et tourteaux de soja/colza/lupin et de farines de poissons (dont la proportion baisse de plus en plus grâce à la recherche dans ce domaine).

    • (Composition indicative, c’est très variable selon les espèces)

  9. L’Aquaponie est une clé d’avenir pour l’Aquaculture, mais comme le dit très bien l’article, le développement en France demande que les aquaculteurs-maraîchers français aient accès aux espèces performantes comme le TILAPIA; Il reste que les circuits fermés en eau douce consomment pas mal d’eau chaque jour, et qu’il y aura le problème de gouts parasites dans la chair des poissons liées aux bactéries et champignons hébergés par les plantes dans les racines.

    • Je tiens juste à préciser que les circuits fermés ne consomment pas d’eau par rapport à une circuit ouvert (1% à 20%/jour en fonction des circuits contre 200% à plus / heure) ).Je pense qu’il faut voir l’Aquaponie de manière différente s’il on veut éviter le problème de goût.Un circuit primaire traditionnel avec les poissons et un circuit secondaire avec les plantes. Le circuit secondaire alimenter par le primaire pour les nutriments. Après il faut résonner l’aspect technique pour limiter au maximum les coûts de fonctionnement.Je pense qu’il faut de toute manière allier l’Aquaponie et le bioclimatique pour faire quelque chose de bien, après sur des surfaces importantes c’est plus facile à dire qu’à faire…

Moi aussi je donne mon avis