« L’aromathérapie, un terme très mal choisi »

Rédigé par Stephen Boucher, le 15 Jul 2015, à 17 h 24 min
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Il en parle de manière lyrique. C’est « un produit beau et noble », « la nature concentrée dans un petit flacon », « en provenance du monde entier, du Togo, de Madagascar, de Chine, d’Inde… ». Théophane de la Charie, le fondateur de la Compagnie des Sens a une mission : « démocratiser et faciliter l’utilisation des huiles essentielles ». Et participer d’une meilleure compréhension d’un pharmacopée puissante.

L’aromathérapie, ce ne sont pas que les diffuseurs d’ambiance de Nature & Découverte

L’histoire de La Compagnie des Sens prend racine à Madagascar où Théophane dit avoir « apprivoisé » les huiles essentielles, qui lui étaient au départ étrangères. De retour en France, il a souhaité démocratiser et faciliter l’utilisation des huiles essentielles « aux plus novices d’entre nous », constatant que l’aromathérapie est une manière naturelle de se soigner et prendre soin de soi efficace, les plantes étant à l’origine de toute la médecine moderne, mais qu’elle restait méconnue et peu utilisée.

 

Ce n’est pas de l’huile, et ce n’est pas de la thérapie par les arômes…

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L’aromathérapie ? On en parle très mal selon lui : « ‘huiles essentielles’, tout d’abord, c’est un terme très mal choisi. Déjà, ce n’est pas un corps gras, ce n’est pas de l’huile, le mot ‘essence’ serait bien plus approprié. Avec ‘aromathérapie’, on a l’impression que l’on va se soigner par les odeurs. En fait, les huiles que nous utilisons sont très puissantes, elles posent même des problèmes de sécurité. Associer les huiles essentielles à l’idée que ça sent bon, alors que c’est un produit très concentré, c’est trompeur. Et beaucoup pensent ‘si j’ai un rhume, je ne vais pas me soigner avec les odeurs, je vais voir ailleurs’. »

Avec ‘aromathérapie’, on a l’impression que l’on va se soigner par les odeurs. En fait, les huiles que nous utilisons sont très puissantes.

Le site internet de la Compagnie des Sens propose depuis avril dernier un maximum d’informations organisées et simplifiées pour chacune des huiles essentielles qu’elle propose.

Vidéo réalisée par La Compagnie des Sens dans laquelle on peut entendre Théophane partager ses valeurs

Une reconnaissance médicale à la peine

Les applications des huiles essentielles sont multiples : les soins, bien sûr, mais aussi la fabrication maison de cosmétiques, l’entretien de chez soi au quotidien, les massages, l’agronomie (« des agriculteurs nous contactent pour nous demander des conseils d’huiles essentielles pour soigner les plantes et les animaux »), et la cuisine aux huiles essentielles (« nous sommes en train d’inclure dans le site des guides d’utilisation tels que des recettes de cuisine »).

Le déficit de connaissance chez les médecins est toutefois encore prévalent. Si des formations à l’aromathérapie existent pour les pharmaciens, les cours ne sont pas encore obligatoires. En médecine, la formation porte avant tout sur les types et les noms de médicaments plutôt que sur les substances, les pharmaciens étant plus à même de faire le lien entre celles-ci et les pathologies.

De fait, à part le Dr Pierre Franchomme, pharmacologue et Directeur du Centre de Recherche sur les Plantes Médecinales et Aromatiques, le Dr Dominique Baudoux, également pharmacologue et fondateur du Collège International d’Aromathérapie, ou encore Fabienne Millet, également docteur en pharmacie, les experts scientifiques sont peu nombreux et les ouvrages scientifiques souvent indigestes. Et très pointus quand ils existent, comme pour le linalol, un alcool aux propriétés notamment antalgiques, anti-inflammatoires, anxiolytiques et antiseptiques, présent dans un grand nombre d’huiles essentielles, telles que la menthe, la lavande, le tilleul ou la bergamote, pour lequel existent des dizaines d’études scientifiques, mais peu de littérature accessible aux non spécialistes.

Cela ralentit les découvertes, explique Théophane : « Je suis à la recherche d’une huile essentielle à Madagascar, dont je tairai le nom, et je n’ai trouvé aucune littérature scientifique à son sujet ».

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Selon lui, « le milieu médical en France reste très fermé aux traitements par les huiles essentielles ». Les raisons selon lui ? La durée des études, le fait que « de nombreux aspects de la formation des internes et externes sont financés par les laboratoires », et parce que « les huiles essentielles étant des produits naturels, les producteurs pharmaceutiques ne peuvent pas investir et valoriser des années de recherche ».

Autre chantier : la certification des dosages au service des soins

Théophane impose une analyse chromatographique pour chaque lot, parce que même si la production est industriellement parfaite, la variabilité dans la contenance des principes actifs d’une huile à l’autre peut être très importante : « sur le papier, ça peut être nickel, et au labo, on se rend compte que le principal composant, par exemple de camomille romaine, au lieu d’être dosé à 30 %, sera dosé à 5 %, du fait de la constitution du sol, de l’orientation du terrain. Ce n’est pas un problème pour un diffuseur d’odeur s’il y a moins de principe actif, mais pour des soins, ça l’est ».

Aujourd’hui, la Compagnie des Sens souhaite diffuser des informations complètes et montrer qu’on peut se soigner naturellement avec l’aromathérapie, avec des produits respectueux de l’environnement avec un objectif clair : « que la France entière apprenne à utiliser les huiles essentielles ! »

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Stephen Boucher est anciennement directeur de programme à la Fondation européenne pour le Climat (European Climate Foundation), où il était responsable des...

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