Être une femme productrice de cacao en Côte d’Ivoire : témoignage de Fanny Doumbia

À l’occasion de la quinzaine du Commerce Équitable, nous avons pu poser quelques questions à Fanny Doumbia, productrice de cacao certifié Fairtrade/Max Havelaar en Côte d’Ivoire.

Rédigé par Marie Mourot, le 25 May 2018, à 14 h 35 min
Être une femme productrice de cacao en Côte d’Ivoire : témoignage de Fanny Doumbia
Précédent
Suivant

Aujourd’hui, plus de 50 millions de personnes vivent de la culture du cacao. La Ghana et la Côte d’Ivoire représentent près de 62 % de la production mondiale qui s’élève à 400 mille tonnes pour l’année 2015-2016. Bien souvent, les petits producteurs perçoivent une prix bien en-dessous de la valeur de leur récolte. Pour y remédier, la certification Fairtrade/ Max Havelaar garantit aux producteurs de cacao une rémunération plus juste et stable de leur travail. Nous avons rencontré Fanny Doumbia, une productrice de cacao, en marge de la Quinzaine du commerce équitable !

Interview de Fanny Doumbia, productrice de cacao en Côte d’Ivoire

Fanny Doumbia est productrice de cacao à la coopérative agricole ECAM à Méagui, en Côte d’Ivoire. Cela fait maintenant 3 ans que l’ECAM a obtenu la certification Fairtrade/Max Havelaar.

ConsoGlobe.com – Comment a débuté votre aventure dans la culture du cacao ?

Fanny Doumbia : J’ai hérité de mon oncle d’un champ de 3 hectares de cacao. Dans la famille, personne n’avait envie de le reprendre. Et comme je m’intéressais déjà au cacao, la famille a décidé que je viendrais diriger l’exploitation pour les travailleurs.

Fanny Doumbia

Une plantation de cacao en Afrique © affini4

Avant que je n’hérite de l’exploitation, je ne travaillais pas dans l’agriculture, mais dans des bureaux. J’ai terminé des études d’ingénieur en commerce international et travaillais dans la filière cacao.

Ainsi quand je venais chez mon oncle, je lui disais de faire attention à la qualité du cacao à chaque fois, car celui que nous recevions pour l’export n’était souvent pas de bonne qualité. Comme il a compris que j’étais intéressée par la culture du cacao, il m’a alors proposé de venir le seconder et pourquoi pas de reprendre la plantation un jour.

ConsoGlobe.com – Pouvez-vous nous parler de votre exploitation ?

Fanny Doumbia : La coopérative a pour but la collecte, la commercialisation du cacao de ses membres et la diversification de ses activités en dehors du cacao.

Nous ne faisons pas de cacao bio mais nous cultivons du cacao commerce équitable depuis 3 ans maintenant. En effet, nous avons reçu la certification Fairtarde/Max Havelaar en 2015. Nous avons également d’autres certificats.

La coopérative a, quant à elle, été créée en 2004 avec 89 producteurs. En 2007, j’ai été élue présidente du Conseil d’Administration. Aujourd’hui nous sommes 1.542 producteurs dont 286 femmes et produisons environ 5.000 tonnes de cacao par an sur plus de 9.000 hectares.

ConsoGlobe.com – Qu’est-ce qui vous a décidé à participer à la création de la coopérative agricole ?

Fanny Doumbia : La coopérative a été créée à l’initiative d’un groupe de producteurs qdans mon entourage. Quand j’ai hérité de l’exploitation de mon oncle, j’ai suivi des formations à l’Agence Nationale d’Appui au Développement Rural (ANADER) que j’ai ensuite pu mettre en pratique.

Au fil du temps, mon champ a changé de visage, il devenait productif et tout se passait bien pour moi. En voyant cela un voisin m’a demandé si je pouvais partager mon expérience avec lui, ce que j’ai fait.

il faut savoir qu’en 2004, le prix du cacao n’était pas fixe. Il pouvait être de 1000 francs (CFA) le kilo un jour, et à 200 francs le lendemain. Cette fluctuation du prix était profitable aux acheteurs qui venaient dans notre pays pour acheter du cacao. Nous sommes donc allés avec d’autres producteurs dans une grande structure à San Pedro demander si nous pouvions leur vendre directement du cacao. Pour que cela devienne possible, nous devions nous regrouper en coopérative. C’est donc de là qu’est partie l’idée de l’ECAM.

ConsoGlobe.com – Quel impact cela a t-il eu sur votre vie ?

Fanny Doumbia : Je suis revenue au village par choix. Je savais qu’il y avait de l’avenir dans l’agriculture, dans la terre et je trouvais que c’était plus sûr pour moi.

Tout le monde mérite d’avoir un vrai salaire. J’avais envie de suivre des rêves qui m’étaient accessibles, être une femme avec une plantation à son nom, c’est quelque chose qui était important pour moi.

Et surtout, j’ai changé l’espérance autour de moi. Jusque là, les producteurs qui cultivaient du cacao n’avaient pas une visibilité de ce qu’ils faisaient, pour eux c’était juste gagner de l’argent. J’ai partagé tout ce que j’ai appris avec eux. La plantation, c’est notre gagne pain, il faut que nous puissions nous engager à fond.

Fanny Doumbia

Fanny Doumbia © via Max Havelaar

Depuis 3 ans, nous avons connu beaucoup de changements, notamment en ce qui concerne la place de la femme. Nous recevons beaucoup de formations sur ce sujet de la part de Fairtrade/Max Havelaar : comment respecter la place de la femme ? Comment reconnaître le travail de la femme ?

Il faut par exemple, que la femme puisse être reconnue au moment où son mari est encore vivant. Car le constat que nous faisons le plus souvent, c’est que lorsqu’un producteur décède, ce n’est pas sa femme qui reprend l’exploitation, mais une autre personne de la famille du mari, et la femme est abandonnée.

Lire page suivante : suite de l’entretien

Pour vous c'est un clic, pour nous c'est beaucoup !
consoGlobe vous recommande aussi...



Rédactrice web freelance et maman de trois enfants, je me suis toujours sentie très concernée par l'écologie et le développement durable. Constamment en...

Aucun commentaire, soyez le premier à réagir ! Donnez votre avis

Moi aussi je donne mon avis