Simon Vélez, le magicien du bambou

Dans notre petit tour du monde du bambou, voici un nouveau portrait, celui de de Simon Vélez. Architecte colombien spécialisé dans les constructions en bambou, il rêve d’une ‘architecture plus végétarienne’.

Rédigé par Paul Boucher, le 25 Dec 2017, à 16 h 00 min
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Selon Simón Vélez, architecte colombien spécialisé dans les constructions en bambou, « la construction [en béton], telle qu’elle est conçue dans les pays en développement, produit des espaces caverneux : un sol en pierre, des murs de pierre et un toit de pierre […] Nous ne venons pas des cavernes, nous ne sommes pas des troglodytes, nous venons des arbres et nous sommes des hommes des cimes. L’architecture actuelle suit un régime exagéré et malsain. Elle est totalement carnivore. L’état de nature exige que nous revenions à un régime plus équilibré, plus végétarien ».

Simon Vélez : « L’architecture doit devenir plus végétarienne »

Depuis plus de vingt-cinq ans, Simon Vélez construit des ponts, des toitures suspendues, des pavillons, des immeubles, des stades… en bambou. Plus surprenant encore, il a conçu une cathédrale avec ce matériau,  en Amérique Latine.

simon velez

Simon Vélez – Capture d’écran Youtube

Un savoir-faire unique : l’assemblage de bambous

En collaboration avec l’ingénieur-constructeur Marcello Villegas, il a mis au point une technique d’assemblage et développé un savoir-faire à la fois très spécifique et d’une grande précision. La mise en oeuvre est exigeante, mais d’un niveau technique suffisamment simple pour pouvoir être appliquée sur des chantiers ne disposant que d’un outillage assez simple.

La méthode consiste à remplir avec du mortier une partie des tiges, entre deux noeuds, puis à les fixer entre elles avec des boulons. On peut ainsi regrouper plusieurs tiges pour former des colonnes et des travées de plus de 50 mètres de long. Il a ainsi construit des ponts sur des gorges, d’énormes toits d’usines, des stades et des marchés couverts.

À chaque matériau son emploi

Le pragmatisme caractérise toute sa démarche. Qu’il travaille le béton, le bois, l’acier ou le bambou, il agit de la même façon, et distingue la fonction de chaque matériau selon ses performances techniques.

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Il a également su persuader le gouvernement colombien d’ajouter le bambou à la liste des matériaux de construction homologués, et convaincre ses clients les plus fortunés de se faire bâtir des résidences luxueuses, édifiées dans ce matériau qu’utilisent aussi les simples gens !

Le bambou : un matériau aux facultés étonnantes

Simon Vélez fait taire tous les préjugés autour du bambou : ce matériau qu’on pourrait penser instable est en fait très raide. Quand on l’imagine susceptible de plier, il s’avère cinquante fois plus résistant que le chêne. Sa croissance est rapide, et sa durée dans le temps est incroyablement longue.

Bien plus léger que l’acier et le béton, il peut résister à un tremblement de terre d’une magnitude de 5 sur l’échelle de Richter alors que d’autres se sont déjà effondrés.

Pourquoi l’a-t-on si longtemps laissé de côté pour se ruer sur le tout béton ? Simon Vélez pense aujourd’hui qu’il faut faire marche arrière. « Lorsque je voyage de par le monde, je vois que toutes les constructions antérieures à l’apparition du béton armé, peu importe qu’elles fussent pauvres ou fastueuses, sont belles », assure-t-il.

Le bambou au secours de l’environnement

Si en Colombie il est courant de réaliser des ouvrages en bambou, on voit encore très peu de constructions de ce type en Europe. Richard Rogers a bien créé le plafond de l’aéroport de Madrid en lames de bambou en 2006. Vélez lui-même a réalisé en 2000 le Pavillon de l’Exposition universelle de Hanovre en bambou et une maison sur le domaine de Boisbuchet en Charente.

Quelques architectes européens comme Chris Precht à Vienne construisent en bambou, mais c’est surtout les designers, comme David Trubridge à Londres ou Pierre Frey à Paris, qui se sont emparés de ce matériau pour faire meubles, tissus, sommiers, lampes, voire des oeuvres d’art ou des vélos.

La revue en ligne Siente America a récemment demandé à Simon Vélez : « Quelle recommandation ou quel message voudriez-vous laisser aux personnes préoccupées par l’environnement ? ». À quoi l’architecte a répondu : « La planète prend soin d’elle toute seule. Le véritable dommage est contre nous-mêmes. Aussi terrible sera notre comportement envers la planète, plus rapidement nous abandonnerons notre mode d’existence, et nous laisserons ainsi la planète en paix. »

Illustration bannière : Cathédrale en bambou- Capture d’écran Youtube
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Professeur d’université à la retraite, Paul aime observer le monde moderne et ses évolutions. Il s’intéresse tout particulièrement à l’économie...

3 commentaires Donnez votre avis
  1. il met du ciment dans son bambou… ducoup c’est vraiment mieux ?

    • Le mortier n’est pas du ciment : Le mortier est le mélange à consistance de pâte ou de boue, d’un liant et d’agrégats avec de l’eau. Il est utilisé en maçonnerie comme élément de liaison, de scellement ou comme enduit. Techniquement parlant, c’est une colle.

  2. Merci pour cet article passionnant! Enfin une architecture qui a du sens, qui est belle et qui fait rêver.

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