Ganesha Park : écovolontariat et éléphanthérapie en Thaïlande

En Thaïlande, au nord-ouest de Bangkok, un sanctuaire pour éléphants ouvre ses portes aux voyageurs et prouve que l’on peut vivre du tourisme, sans exploiter ces animaux. Au programme : promenades et baignades au rythme des pachydermes.

Rédigé par Anne Bécel, le 8 Oct 2017, à 17 h 30 min
Ganesha Park : écovolontariat et éléphanthérapie en Thaïlande
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À quelques encablures des montagnes birmanes, au creux de la vallée de la rivière Kwaï, la ville de Kanchanaburi est bordée d’impressionnantes collines de jungle épaisse. François Collier s’y est installé il y a 13 ans, avec un rêve en tête : recueillir les éléphants maltraités des « camps de touristes« .

L’éléphant, cette usine à tourisme

Si l’éléphant inspire aujourd’hui la convoitise (ivoire et peau sont recherchés), il faisait, historiquement, l’objet d’un grand respect en Asie. Les traditions religieuses vénéraient ce grand pachyderme quasi mythique et si dur à soumettre.

Peu à peu, l’animal a été domestiqué. Il ne survivrait aujourd’hui que 35.000 à 50.000 éléphants sauvages sur tout le continent, en petits groupes isolés, du fait du braconnage et du rétrécissement des forêts. Ils étaient certainement près de 200.000 au début du XXe siècle.

L’éléphant sert aux travaux de force, notamment à débarder le bois des forêts du Myanmar. Il est aussi énormément utilisé par l’industrie touristique. Les éléphants promènent des touristes selon un itinéraire établi, toujours le même trajet qui se répète, jour après jour. Certains deviennent fous. D’autres meurent d’épuisement.

Mais dresser un animal si fort et si intelligent n’est pas chose aisée. La méthode du phajaan est systématiquement employée : elle signifie « briser l’esprit » de l’animal. Différentes techniques de torture sont utilisées. Les éléphants sont frappés, attachés douloureusement, privés de nourriture… Il s’instaure en eux une peur viscérale de l’homme, et de leur maître en particulier (appelé mahout ou cornac).

L’aventure Ganesha Park

Profondément marqué par ce constat, et rêvant de vivre avec des éléphants, François Collier, sa femme et leurs quatre enfants, quittent la France et acquièrent un vaste terrain de jungle en bordure du lac Sangklaburi. Là, il crée le Ganesha Park et accueille une première femelle, puis une seconde, et voilà qu’ils vivent désormais avec six mastodontes.

Une fois domestiqués, les éléphants, profondément marqués, ne sont plus capables de revenir à la vie sauvage. Lorsqu’ils arrivent au Ganesha Park, ils sont souvent agressifs, puis se détendent peu à peu. Chacun avale quelque 300 kg de nourriture par jour (bananes, feuilles d’ananas…). Pour aider à subvenir aux besoins du lieu, les touristes sont invités à venir partager la vie des pachydermes.

ganesha park

Les éléphants adorent l’eau © yougoigo

On accède au sanctuaire par la route ou par le rail. Le train a l’avantage d’emprunter le fameux pont de la rivière Kwaï, célèbre pour le film oscarisé de David Lean qu’il a inspiré. Il fut construit en 1942, par des prisonniers de guerre, sous le commandement de troupes japonaises.

Une journée au Ganesha Park

Sur place, pas de chichi. La famille occupe la maison principale et les autres bâtiments sont destinés aux visiteurs. Des bungalows flottants ont été construits sur le lac.

Les éléphants se déplacent librement entre les maisons, le lac et la palmeraie. La plupart des visiteurs restent le temps d’une journée. Ils arrivent un soir, se regroupent autour d’un convivial repas, et passent le lendemain en compagnie des éléphants.

Pas de programme établi, mais la plupart du temps la journée tourne autour de courtes promenades à cru, des repas des éléphants, des baignades et des jeux dans la boue, le tout à leur rythme. Le dernier soir est l’occasion d’un grand partage avant de repartir le lendemain matin.

Le bon moment pour découvrir la Thaïlande ?

Dans la région de Kanchanaburi, la saison des pluies s’étend de juin à octobre, mais ne vous imaginez pas un temps de mousson. Il pleut environ 2h par jour seulement et la végétation exulte. Septembre et octobre sont propices aux tempêtes toutefois. De novembre à mai, c’est la saison sèche, très agréable jusqu’en février-mars, puis les températures se font écrasantes jusqu’au retour des premières pluies.

L’éléphanthérapie

François Collier a rapidement remarqué combien les gens semblaient plus détendus et plus ouverts après avoir passé une journée au contact des éléphants. De ce constat sont nés des stages d’éléphanthérapie, animés par Christine Pagnier-Guillot, ancienne monitrice d’équitation. « Ce sont les éléphants qui sont les thérapeutes« , explique-t-elle. « L’animal nous permet de nous déconnecter du mental, qui s’apaise énormément. Il nous invite à nous caler sur son rythme beaucoup plus lent, à contacter sa vibration beaucoup plus dense, plus terrestre. Et dans l’espace qui s’ouvre, remontent des mémoires ancestrales« .

ganesha park

Vivre au rythme des éléphant © Pumtek

« La rencontre avec les éléphants m’a laissé un souvenir inoubliable, le bain tout particulièrement. Ils apprécient de se baigner car ils ne transpirent pas et ont besoin d’hydrater leur peau. Nous étions trois visiteurs, trois mahouts, trois éléphants et le petit chien de la maison, à jouer ensemble dans l’eau au coucher du soleil. À ce moment-là, l’éléphant et le chien m’ont semblé de très proches parents. Il y a chez l’éléphant, l’esprit fidèle, affuté, bon élève et joueur du chien. Il y a aussi la douceur de l’âne, et l’esprit réceptif du cheval. Pas étonnant que naisse l’éléphanthérapie, dans la lignée de l’équithérapie

Je m’allonge sur le dos de l’éléphant, m’y laisse aller en toute confiance. C’est comme s’abandonner dans la terre, un continent immuable qui respire et soupire d’aise dans l’eau. Puis vient le temps des jeux. On se jette à l’eau les uns les autres. Et mon éléphant n’est pas en reste. Soudain, alors que je viens d’atterrir derrière l’un d’eux, le géant recule et son pied effleure le mien. À peine a-t-il senti ma peau qu’il stoppe net son mouvement. L’animal est gigantesque, puissant, et pourtant il fait preuve d’une délicatesse inouïe. Je nage vers sa tête pour l’enlacer. C’est une femelle. Elle a dans le regard quelque chose de très profond, très ancien, une sagesse colossale et bouleversante« .

Anne B. – Ganesha Park – 2012

Les éléphants ont quelque chose de fort à transmettre, en lien avec la puissance, les racines, la stabilité et le lien à la terre.

Infos pratiques :

  • Les visiteurs ne peuvent pas être plus de huit à la fois sur le site. Pensez donc à réserver à l’avance.
  • Des missions de volontariat sont possibles.
  • Toutes les chambres n’ont pas de salle de bain, et toutes les salles de bain n’ont pas d’eau chaude. Le confort est frugal, mais compensé par la beauté des lieux.
  • Les repas sont locaux et végétariens.
  • Le parc est situé environ à 300 km de Bangkok, comptez autour de 4h de route.
  • Toutes les infos sur le site web de Ganesha Park
Illustration bannière : Le bain des éléphants – © smile elephant
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Anne Bécel est géographe spécialisée en tourisme équitable, auteur de guides de voyage, ainsi que recherchiste et scénariste pour des émissions...

1 commentaire Donnez votre avis
  1. J’ai failli faire une semaine de volontariat au Ganesha Park et j’ai finalement été écoeurée suite à une enquête menée en profondeur que j’ai pu faire via des amis qui s’y sont rendus, des échanges avec l’entreprise et internet en général. Les animaux ne sont pas maltraités, mais ils ne sont clairement pas traités avec respects non plus, et faire du business en surfant sur cette vague pour s’enrichir est une honte.
    Voici une pétition que j’ai découverte durant mes recherches pour ceux qui souhaitent y ajouter leur signature chng.it/L9KLHHKwn8

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