Energiewende, ou quand toute une nation fait preuve d’audace

L’Energiewende, la transition énergétique allemande, a surpris bien des observateurs en dehors de l’Allemagne. Ce qui est apparu comme une décision soudaine – et donc suspecte d’être émotionnelle et peu rationnelle – est le fruit d’un long processus de maturation. Comme pour les individus, la prise de risque se prépare et se gère. Cas d’école.

Rédigé par Stephen Boucher, le 1 Sep 2016, à 16 h 04 min
Energiewende, ou quand toute une nation fait preuve d’audace
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Décider soudainement de se débarrasser de son industrie nucléaire, était-ce judicieux ou un risque non maîtrisé ? L’audace se gère aussi pour les nations. Ce qui est apparu aux yeux de nombreux observateurs étrangers, notamment français, comme un saut dans l’inconnu irrationnel, est en réalité le résultat d’un débat démocratique et d’un large consensus au niveau de la société allemande. Comme pour les particuliers, l’Energiewende démontre que ce qui peut paraître « audacieux », voire déraisonnable, de l’extérieur, peut être vécu de l’intérieur sereinement comme une suite logique des engagements précédents.

Rappel des objectifs de la transition énergétique allemande : avant 2050, passage à un mix de production composé à 80 % d’énergies renouvelables ; division par deux de l’intensité énergétique ; réduction presque totale des émissions de CO2, et sortie du nucléaire avant 2022.

La transition énergétique allemande vue d’un mauvais oeil par beaucoup

La décision de sortir du nucléaire totalement et définitivement, suite à l’incident de Fukushima, au Japon, a semblé à certains très radicale, voire populiste. France Stratégie par exemple, le think tank du Premier Ministre, se demandait fin 2014 si l’Energiewende n’était pas « sur le point d’échouer », notant le coût de la mesure.

L’un des collaborateurs du rapport affirmait non moins que « l’abandon du nucléaire de façon significative est suicidaire ».(3) L’Union française de l’électricité parlait au moment de la décision de « brusque virage énergétique », de « décision soudaine et unilatéralement adoptée ». Ce ne sont que quelques unes des critiques entendues.

Ce que l’on sait moins en France, c’est que la décision a fait l’objet d’un large consensus, et est le résultat de décennies de délibérations démocratiques sur la place du nucléaire dans le pays, mûrie depuis l’émergence du mouvement antinucléaire dans les années 1970. L’accident à la centrale nucléaire de Fukushima a, de ce point de vue, effectivement été un élément déclencheur, non pas donc d’un coup de tête, mais d’un basculement préparé.

energiewende

Comme l’indique la Fondation Heinrich Böll, « l’attitude volontariste de l’Allemagne repose sur l’expérience des deux dernières décennies, quand les renouvelables, se développant beaucoup plus rapidement que prévu, devinrent plus fiables et meilleur marché. »(2)

Le saut allemand, reflet d’une motivation intrinsèque forte

Comme Louis Pasteur l’a constaté, le hasard ne favorise que les esprits préparés. Ce qu’était donc le peuple allemand au moment de la décision gouvernementale, largement favorable au tournant énergétique pris.

Didier Durandy le souligne dans L’audace, mode d’emploi – comment adapter votre niveau d’audace à chaque situation, la préparation de l’action est une étape décisive : le moteur interne qui amène un particulier ou un groupe à sortir de sa zone de confort doit relever d’une motivation intrinsèque forte, c’est-à-dire apportant une récompense non pas externe, mais relevant de l’intérêt et du plaisir que l’individu trouve à l’action.

C’est pourquoi les critiques de l’action allemande, la qualifiant de « dogmatique » ou « d’idéologique » se trompent, car ils ne comprennent pas que c’est cet attachement à la mesure qui n’est pas lié à un calcul économique « rationnel » qui permet justement d’aller de l’avant.

Les citoyens allemands obéiraient à une motivation extrinsèque s’ils étaient contraints à se tourner vers les énergies renouvelables parce qu’ils auraient craint une punition, qu’ils auraient espéré en recevoir une récompense, par exemple financière, ou qu’ils auraient été encouragés dans ce sens par d’autres pays voisins, par exemple, sans le vouloir vraiment eux-mêmes.

Dans Osez plus, vivez mieux : un guide pratique pour lever vos freins et réaliser votre potentiel, Pierre Portevin et Daniel Kerrigan expliquent pourquoi la motivation intrinsèque est essentielle à l’audace :

« Pensez à J.K. Rowling et l’incroyable succès d’Harry Potter ! Treize éditeurs avaient rejeté son livre, mais elle a persévéré. Sa motivation la plus forte était sa passion d’écrire, pas le résultat. Si Rowling avait été motivée par la quête du succès, elle se serait peut-être arrêtée après les premiers refus. Elle n’aurait d’ailleurs jamais pu imaginer le succès qu’elle connaît actuellement.

« La psychologue sociale Heidi Grant explique que tous les objectifs ne mènent pas à des sentiments de réelle satisfaction et de profond bien-être. Pour la majorité d’entre nous, les objectifs qui encouragent, soutiennent et renforcent nos relations peuvent nous procurer ce bien-être. Ou un objectif lié au développement personnel, à la santé, et à la contribution à sa communauté aussi. (…)

« C’est pourquoi découvrir et refléter nos valeurs authentiques, identifier clairement les leviers de notre plaisir nous aident à définir des objectifs qui font sens. Cela renforce notre motivation et nous encourage à oser plus. »

Si l’Energiewende n’avait pas besoin du regard de voisins pour être initiée, elle aura besoin d’eux pour réussir

On peut donc gager que la motivation intrinsèque du peuple allemand étant forte, la transition énergétique sera menée jusqu’au bout.

L’Institut du Développement durable et des Relations Internationales (Iddri) notait toutefois dans un récent éditorial paru sur Le Monde que cette détermination devra également être partagée par d’autres pays européens pour réussir pleinement : « Fondée jusque-là sur une dynamique nationale, la transition allemande ne pourra enclencher sa seconde phase sans se placer dans une vision beaucoup plus européenne. » Ou quand tout un continent doit faire preuve d’audace, et donc débattre ensemble.

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Stephen Boucher est anciennement directeur de programme à la Fondation européenne pour le Climat (European Climate Foundation), où il était responsable des...

2 commentaires Donnez votre avis
  1. C’est vrai que les centrales à charbon sont TRES écologiques, pas de pollution, un minerai inépuisable etc… !!! c’est vraiment du grand n’importe quoi alors que des solutions économiques et écologiques existent, mais ne rapportent pas assez aux lobbies de l’énergie qui ne voient que leur profit à court terme !

  2. L’arret brutal des centrales atomiques à obliger le gouvernement allemand à ouvrir des centrales à charbon!!!merci la polution,la transition energetique est indispensable mais doit trouver un equilibre entre avantages et inconvénients dans le temps.

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