L’air ambiant : future source d’eau potable

L’air ambiant peut être une source d’eau potable! Y compris dans les pays émergents et les régions désertiques. À moindres frais, aussi environnementaux.

Rédigé par Philippe Oberlé, le 9 Sep 2017, à 17 h 15 min
L’air ambiant : future source d’eau potable
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Les épisodes de sécheresse en France et d’autres pays de l’hémisphère Nord l’ont montré : on vient à manquer d’eau potable dans les nappes phréatiques. Quelles sont les solutions pour en trouver ? L’air ambiant est chargé en humidité : les technologies peuvent la transformer en eau potable !

2030 : accès à l’eau potable difficile pour 47 % de la population

D’après l’Organisation des Nations Unies : en 2030, 47 % de la population mondiale vivra dans des zones à approvisionnement difficile en eau potable. Par ailleurs, l’eau sur Terre se trouve à 97 % sous forme d’eau salée, et seulement 2 % sous forme de glace ou de neige et moins de 1 % des réserves d’eau douce sont présentes sous forme liquide.

Plusieurs procédés existent pour produire de l’eau douce. La désalinisation de l’eau de mer notamment est déjà utilisée dans certaines régions très arides mais est très coûteuse, consomme énormément d’énergie, rejette des quantités importantes de saumure, et nécessite des installations à proximité du littoral.

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À San Diego, on a choisi de passer à cette méthode et dessaler le Pacifique, parce que les conditions étaient réunies pour le faire.

Déshumidifier l’air : jusqu’à 1.500 litres par jour par machine

La start-up Ambient Water utilise le principe du déshumidificateur et l’a développé à une plus grande échelle. Le résultat ? Jusqu’à 1.500 litres d’eau potable par jour pour la plus productive des installations. L’entreprise travaille également sur une version capable de produire 75.000 litres par jour avec des débouchés dans l’industrie pétrolière et gazière aux États-Unis. Grande consommatrice d’eau, elle accentue la pression sur les réserves des municipalités. Ambient Water et certains de ses concurrents proposent également des installations spécialement conçues pour les particuliers pour se passer d’eau minérale en bouteille.

Le fonctionnement s’inspire du cycle de l’eau et du phénomène qui se déroule à l’intérieur d’un nuage. L’air est refroidi jusqu’au « point de rosée« , température à laquelle l’air devient saturé en humidité, provocant ainsi la condensation. L’eau obtenue est impure, elle doit traverser ensuite plusieurs filtres pour être traitée et finit dans une cuve de stockage. Plus efficace dans les zones tempérées, le niveau de production optimal dépend de la température et du taux d’humidité ambiant. Ambient Water indique que leur système produit de manière efficace jusqu’à un taux de 30 % d’humidité dans l’air.

Dans un souci d’efficacité énergétique, ces déshumidificateurs industriels pourraient être couplés avec des panneaux solaires ou une petite éolienne de manière à faire fonctionner l’ensemble comme une centrale autonome. C’est ce qu’a imaginé un autre acteur majeur du secteur, AquaSciences, qui travaille sur des unités de production alimentées par l’énergie solaire.

De l’eau potable avec une technique abordable pour les régions en développement

Ces procédés d’extraction de l’eau sont très énergivores et coûteux car ils font appel à des technologies brevetées. En effet, pour produire plusieurs centaines de litres d’eau potable, d’énormes quantités d’air sont aspirées par ce type de machine. Son utilisation se limite donc à des marchés de niches pour le moment, comme l’industrie, l’armée ou les grandes ONG humanitaires. Utiliser une technique passive est plus économique, comme des filets qui récupèrent les gouttes transportées par la brume matinale.

La fondation Sanakvo travaille sur un autre système, passif lui aussi, utilisant l’action combinée du soleil et du glycérol pour obtenir de l’eau dans les régions les plus arides. Le glycérol est un composé chimique qui a la particularité d’attirer les molécules d’eau présentes dans l’air, on obtient par la suite une solution d’où est extraite, grâce à la chaleur du soleil, de l’eau pure et parfaitement potable. Le glycérol quant à lui est réutilisable pour un autre cycle.

Sur son site, la fondation précise qu’au beau milieu du Sahara, un seul km3 d’air contient trois millions de litres d’eau, c’est l’équivalent d’une rivière d’un kilomètre de long, trois mètres de large et d’un mètre de profondeur. De plus, l’humidité de l’air se renouvelle en permanence grâce aux vents provenant de l’océan, cette source d’eau potable est par conséquent inépuisable et son extraction ne devrait pas avoir d’impact environnemental.

Sanakvo vise en particulier les régions arides d’Afrique où le manque d’eau menace les populations. Dans le dernier rapport des Nations Unies, Eau pour un monde durable, on constate que même en Europe, certains pays sont déjà classés « vulnérables » en raison d’une pression exacerbée sur les ressources en eau (1).

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Ressource renouvelable en eau par habitant pour 2013 (en m3) – Carte extraite du rapport de l’ONU

Une nouvelle source d’eau potable et des applications nombreuses

Toutes ces techniques comportent de nombreux avantages sur les bouteilles d’eau minérale : l’eau est produite sur place, même en plein désert, les coûts de transport sont donc largement réduits. D’autre part, les consommateurs peuvent se passer de bouteilles plastique, une bonne chose puisque dans les pays en crise humanitaire le ramassage des déchets et le recyclage sont souvent inexistants. Dans un monde où l’eau se raréfie, les applications possibles sont multiples :

  • Agriculture urbaine : les cultures sur les toits en ville se multiplient, les fermes verticales sont aussi en plein essor dans les endroits où l’on manque de place, notamment au Japon. Le besoin en eau va aller croissant les prochaines années.
  • Crises humanitaires et catastrophes naturelles  : les ouragans provoquent des inondations importantes, contaminant les réserves en eau potable de la région. En Californie, certaines villes et communautés isolées pourraient utiliser ce type de système pour pallier à l’épuisement des réserves d’eau douce. AquaSciences a par exemple déployé une station de production d’eau potable à Port-au-Prince lorsqu’Haïti fut touché par le séisme en 2010.
  • Industries pétrolière et gazière : aux États-Unis, ce secteur consomme beaucoup d’eau, notamment pour la fracturation hydraulique. Avec son procédé innovant, Ambient Water pourrait aider à limiter la pression exercée par ce secteur sur les réserves d’eau des municipalités. Une unité de production spécifiquement conçue pour ce marché est en développement pour une capacité de production de 75.000 litres. Bien que l’extraction du pétrole et du gaz de schiste fasse l’objet de polémiques en Europe, leur exploitation n’est pas prête de s’arrêter aux USA. Raison de plus pour en limiter l’impact environnemental.
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1 commentaire Donnez votre avis
  1. Pour ceux qui s’intéressent à ce type de projets, il y a une action caritative déjà en place pour récupérer la rosée de l’air ambiant dans des filets, ça s’appelle Warkawater. Avantage : une fois monté, ce dispositif ne nécessite aucune énergie, il est purement passif.

    Pour donner des fonds au projet : http://www.gofundme.com/warkawater

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