Émotions et pensées : conversation entre deux cerveaux
Pour gérer pensées et émotions, la boite crânienne héberge deux spécialistes. L’expert de la partie rationnelle est le « néocortex », tandis que celui de la sphère émotionnelle se nomme « système limbique ».
Il est composé du thalamus et de l’amygdale. Dans la vie courante, on a tendance à traiter l’émotionnel d’un côté et le rationnel de l’autre. Pourtant, ces deux spécialistes sont étroitement liés. L’un pense, l’autre ressent, et c’est ensemble qu’ils permettent la réception et l’interaction avec le monde de manière nuancée, sensible et intelligente. Ils sont à la fois autonomes et interconnectés.
Younes se promène dans les bois et croise un serpent. Il n’aura sans doute besoin que de quelques millisecondes pour savoir quoi faire : fuir ou combattre. Pour cela, voici schématiquement ce dont son cerveau est capable. Sa rétine envoie l’information (présence d’un serpent) au thalamus qui la traduit dans le langage du cerveau. L’information est ensuite envoyée au cortex visuel qui l’analyse. Si la réponse est d’ordre émotionnelle, l’amygdale sera stimulée, ce qui produira l’expression d’une émotion appropriée.
Dans ce cas précis, parce que la situation demande une réponse liée à la survie, une petite partie du message traduit par le thalamus est envoyée directement à l’amygdale sans passer par le cerveau rationnel pour gagner du temps de réaction. L’amygdale déclenche une réponse émotionnelle avant que les centres corticaux (ceux qui réfléchissent) ne comprennent ce qu’il se passe. Si Younes n’est pas trop près du serpent, il aura sans doute couru à toutes jambes…
Circuit long pour une réponse réfléchie = serpent > oeil > thalamus > cortex visuel > Amygdale > Réponse émotionnelle.
Circuit court pour une réponse de survie = serpent > oeil > thalamus > Amygdale > Réponse émotionnelle.
Le corps se fait l’écho de la conversation
Arrêtons-nous ici sur l’effet que produit l’ « émotion ». Ce mot prend ses racines dans le verbe latin « movere = mouvoir ». Le préfixe « é » signifie « vers l’extérieur. » il s’agit donc d’un mouvement de l’intérieur vers l’extérieur. Concrètement tout le monde peut le constater, l’émotion s’exprime à travers le corps et se manifeste à travers des sensations (tremblements, tensions, fourmillements, changements de température…).
À l’inverse, lorsque nous cherchons à savoir ce que nous ressentons, c’est souvent grâce à ces sensations que nous reconnaissons les émotions : si j’ai le ventre noué, je suis stressée, les mains moites m’indiquent que j’ai peur… La langue française est pourvue d’expressions telles que « J’ai eu chaud ! » Ou bien « Elle n’a pas froid aux yeux. » ou encore « Tu en as les genoux qui tremblent… » Un certain nombres de sensations corporelles sont ainsi répertoriées dans notre cerveau émotionnel.
Guillaume ne sait pas dire non quand on lui propose un café pendant la journée. Selon les jours, il en boit plus de deux, ce qui a pour effet dans l’après-midi de mettre en tension son plexus solaire. Siège des émotions, c’est l’anxiété ou le stress qui s’exprime le plus souvent lorsque cette région est tendue. Vers 17h, ces jours-là, Guillaume se sent anxieux et ses pensées sont négatives sans qu’il sache pourquoi.
En réalité, la sensation provoquée par l’excès de caféine (tension dans le plexus solaire) a été traduite en émotion (stress donc anxiété) puis en pensées. Si le corps est le support par lequel s’exprime une pensée transformée en émotion, il est aussi celui qui induit sur notre état mental. Qui n’est pas de mauvaise humeur lorsque un rhume se manifeste ? Les sensations désagréables de cet état physique influencent notre état mental.
Le dialogue entre la pensée, l’émotion et le corps peut adopter toutes les combinaisons, et si les principales ont été décrites jusqu’ici, en voici une autre : Imaginez que vous mordez dans un citron…
Vous sentez les sensations de l’acidité dans votre bouche ? La pensée vient de provoquer instantanément une sensation. La pensée et le corps peuvent donc aussi dialoguer ensemble. Les ruminations en sont aussi un bon exemple car lorsque la sensation est désagréable, elle se transforme…. en émotion ! La boucle est à nouveau bouclée.
Comment se sortir du cercle vicieux ?
On l’aura compris, les trois protagonistes que sont la sensation, l’émotion et la pensée sontinterconnectés et par conséquent, influencés les uns par les autres. Loin de compliquer la situation, ce constat nous offre au contraire la possibilité de nous libérer de leur influence parfois désagréable. Il n’est pas toujours facile de se raisonner lorsque nous fulminons contre le chauffard qui a failli provoquer un accident ! Tenter de se calmer par la pensée alors que celle-ci bouillonne semble mission impossible. Et pourtant, il suffirait de respirer et décontracter les parties crispées de son corps à chaque expiration pour apaiser son esprit.
Dans la situation contraire, lorsqu’à la fin d’une semaine cauchemardesque, notre corps atteint son paroxysme de nervosité, il est inutile d’espérer qu’il décompresse tout seul. En revanche, en se concentrant sur des mots ou des images positives et relaxantes, on lui donnera une chance de se détendre et se reposer rapidement.
Prendre conscience des interactions entre la sensation, l’émotion et la pensée permet de développer une compréhension de soi plus fine et plus exacte… in fine, elle vous aiguillera pour interrompre dès ses premiers symptômes le cercle vicieux des sensations désagréables et des pensées négatives… Alors restez conscient et respirez !
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Camille Lancesseur est passionnée par son métier : sophrologue. Pour elle, « voir le verre à moitié plein » n’est pas qu’une expression naïve visant à tromper la réalité. Cette philosophie se fonde sur le lien entre les ressources intérieures et les opportunités qu’offre le monde extérieur.
Convaincue que l’hygiène de vie commence par la connaissance de son propre fonctionnement (physique, émotionnel et psychique), Camille souhaite contribuer à la diffusion de ce « savoir vivre avec soi et le reste du monde ». – www.camillelancesseur.com
