Dans la famille biodiversité ordinaire, protégeons le campagnol terrestre

Aussi appelé campagnol des champs ou rat taupier, le campagnol terrestre n’est pas vraiment méconnu, surtout des agriculteurs et des jardiniers pour les dégâts qu’il occasionne dans les cultures. Découvrons ensemble cette espèce souvent mal-aimée mais qui a pourtant bien sa place chez nous.

Rédigé par Julien Hoffmann, le 4 Mar 2022, à 18 h 00 min
Dans la famille biodiversité ordinaire, protégeons le campagnol terrestre
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La biodiversité ordinaire c’est aussi ces animaux que l’on sait être là, que l’on sait se porter bien et que l’on sait ou croit avoir de beaux jours devant eux. Chaque espèce ayant sa place, parlons ici d’un animal emblématique de nos campagnes jusqu’à en porter en partie le nom, le campagnol terrestre !

Le campagnol terrestre, un mammifère rongeur très redouté dans les campagnes !

Les campagnols, rassemblés dans la sous-famille des Arvicolinae, sont des rongeurs qui ont su conquérir de multiples écosystèmes jusqu’aux milieux aquatiques. Et dans la grande tribu des campagnols, le campagnol terrestre est parmi le plus efficaces pour prendre sa place !

campagnol

Arvicola terrestris s’est longtemps appelé Arvicola amphibius mais ce sont en réalité la même espèce dans des milieux différents © davemhuntphotography

Le campagnol terrestre (Arvicola terrestris) est surtout connu des agriculteurs pour les dégâts parfois colossaux, qu’il peut occasionner aux cultures lors d’années de pullulation.
Réalisant de petits monticules que l’on peut facilement confondre avec ceux réalisés par les taupes, ces monticules sont parfois si nombreux dans les champs qu’ils peuvent limiter la quantité d’herbe produite dans un champ.

Mesurant de 12 à 22 cm et pesant jusqu’à 180 g, le campagnol terrestre est un herbivore qui consomme l’équivalent de son poids journalier en racines ou bulbes et ce durant les 6 à 8 mois de sa courte vie.

Notre petit rongeur est capable de créer un réseau de galeries longues de 60 m et de profondeurs allant de 20 cm à 1 m, où il a également ses salles de reproduction où les femelles peuvent avoir de 5 à 6 portées par an, chacune de 2 à 8 petits.

campagnol terrestre

Une fois la neige fondue, on réalise mieux l’activité des campagnols durant l’hiver © Ingrid Maasik

Lire aussi : 5 astuces naturelles pour faire fuir les rongeurs au jardin

Particularités du campagnol terrestre

Le mode et la fréquence de reproduction du campagnol terrestre sont tels qu’il peut y avoir des années exceptionnelles où il pullule de façon incroyable, un peu à l’image de son cousin des hautes latitudes, le lemming.

Ces pullulations ont lieu de manière cycliques tous les 5 ou 6 ans et sont le fruit d’une concordance de plusieurs facteurs tels que le climat, la présence de prédateurs, les maladies, les parasites, etc.

Pour mieux comprendre ce phénomène hors norme, il suffit de se dire qu’un seul couple de campagnols terrestres peut avoir, à lui seul, 114 descendants dans l’année ce qui peut mener à des densités de population qui frisent les 1.000 campagnols à l’hectare !
Si on ramène cela à leur besoin en nourriture, le besoin journalier à l’hectare serait alors d’environ 180 kg… Peu soutenable en soi et encore moins quand le campagnol partage ses terres avec des humains.

Statut actuel de l’espèce

L’espèce, qui n’est pas présente partout en France à la limite ouest de son aire de répartition, est classée en « préoccupation mineure » sur la liste rouge de l’Union Internationale de la Conservation de la Nature.

Les menaces qui planent sur le campagnol terrestre

La lutte chimique

S’il existe des moyens de lutte mécanique (piégeage) qui permettent de relativement bons résultats, la méthode est contraignante et demande aussi d’être contextualisée par une re-dynamisation du cheptel de prédateurs.

En cela, l’utilisation de composés chimiques et notamment de la bromadiolone, est ce qu’il y a de plus efficace pour lutter contre les dégâts causés par le campagnol terrestre.

Ce moyen de lutte n’a cependant aucun avenir ni environnemental, ni économique dans la mesure où la bromadiolone, un peu à l’image du ferramole pour lutter contre les limaces (les fameux granulés bleus même estampillés « bio »), reste dans le corps des animaux tués qui peuvent être consommés par les prédateurs qui en meurent à leur tour ou développent de sévères pathologies.

La disparition de ses prédateurs

La dynamique des populations de campagnols terrestres fait qu’ils sont un élément clef de la chaîne alimentaire.

Il serait en effet fastidieux de faire la longue liste des animaux que s’en nourrissent mais, pour ne citer qu’un seul de ses prédateurs à savoir la chouette hulotte, imaginez qu’un seul couple avec petits va en consommer jusqu’à 2.600 sur une seule saison !

Et hop, tout cru dans le bec ! © imageBroker

Or, avec la fragmentation des paysages, la disparition des haies ou des arbres champêtres, le développement de la monoculture et un appauvrissement global du paysage, ce sont les prédateurs naturels du campagnol terrestre qui disparaissent.

Ils pullulent donc de manière plus forte et surtout maintiennent des niveaux de population plus élevés ce qui entraîne une augmentation du besoin de lutte par les humains.
Quand ces moyens de lutte consistent en l’emploi de bromadiolone, cette dernière est ensuite consommée par les prédateurs qui se sont maintenus, ce qui au final, amplifie le phénomène et participe à l’effondrement de la biodiversité autant qu’à l’accentuation de la problématique de départ.

Comment aider le campagnol terrestre

Comme pour toute la biodiversité, ordinaire ou non, il faut participer à son observation, transmettre les connaissances notamment aux jeunes publics et soutenir les associations de protection de la faune sauvage et tous les organismes qui oeuvrent à la préservation des écosystèmes.

Dans le cas des campagnols terrestres et étant donné que leur plus grosse menace est l’humain au sens le plus direct du terme, il s’agit à la fois d’être au fait des différents moyens de gestion de l’espèce pour qu’elle ne cause pas trop de dégâts (empêcher les tirs de renards, installer des perchoirs à rapaces, faire en sorte que des haies soient replantées, etc.) et de les promouvoir auprès des personnes qui n’en ont que faire ou n’en ont pas connaissance.

N’hésitez pas à vous rapprocher de sociétés ou associations mammalogiques parfois hébergés dans des Museum d’Histoire Naturelle en région, et gardez les yeux ouverts sur le sujet du côté des acteurs du monde agricole comme les FREDON.

Article mis à jour et republié

Illustration bannière : Campagnol en plein repas – © Ian Schofield
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1 commentaire Donnez votre avis
  1. Mon chat est mort récemment de façon inexpliquée sans trace de blessure, il était jeune et en pleine forme. Peut-être a-t-il mangé un campagnol empoisonné ? Un prédateur qui ne régulera plus.
    Quand les chats sont trop nombreux, ils déciment aussi pas mal d’oiseaux. De la difficulté des équilibres biologique quand l’homme intervient !

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