Tomates importées : le cocktail toxique révélé par UFC-Que Choisir
Des analyses pointent la présence récurrente de résidus de pesticides dans les tomates importées d’Espagne et du Maroc, parmi lesquels figurent des substances classées ou suspectées d’être cancérogènes ou perturbateurs endocriniens.

Ces données, regroupées par le magazine Que Choisir dans le cadre de son dernier numéro, soulèvent des questions sur les pratiques agricoles à l’origine des importations et invitent à une vigilance renouvelée sur la traçabilité alimentaire.
Des résidus de pesticides problématiques en cas de forte exposition
Le 24 octobre 2025, l’association UFC-Que Choisir a publié une enquête mettant en lumière un taux élevé de résidus de pesticides dans des tomates importées d’Espagne et du Maroc, comparé aux échantillons cultivés en France. Les analyses font ressortir plusieurs familles de molécules souvent détectées sur les tomates importées : des fongicides comme le chlorothalonil et le captan, ainsi que des substances liées à la famille des dithiocarbamates (dont le mancozeb et ses métabolites). Ces molécules ont des profils toxicologiques différents mais partagent des motifs d’inquiétude récurrents en matière de cancer et de perturbation endocrinienne. Le chlorothalonil, classé par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC/IARC) comme « possible cancérogène pour l’homme », est associé à des preuves expérimentales de carcinogénicité et fait l’objet d’un suivi scientifique et réglementaire intense.
De son côté, le captan est documenté depuis longtemps dans la littérature comme possédant un signal carcinogène potentiel dans des études animales, au point que l’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA) a historiquement classé le captan comme carcinogène probable. Enfin, les dithiocarbamates comme le mancozeb soulèvent des préoccupations particulières en raison de leurs métabolites (notamment l’éthylènethiourée, ETU) qui présentent des propriétés reprotoxiques et des effets sur la thyroïde chez les animaux, ce qui alimente des questions sur un risque cancérogène ou endocrinien indirect. Ces profils expliquent pourquoi la présence répétée de ces molécules — mêmes à faibles niveaux — alerte les autorités sanitaires et les associations de consommateurs.
Les études de surveillance et les rapports européens confirment que, parmi les combinaisons et occurrences relevées sur les différents fruits et légumes, les tomates figurent régulièrement dans les séries d’échantillonnage présentant des résidus préoccupants, dont des cas de chlorothalonil et, ponctuellement, de chlorfenapyr sur des lots originaires de pays tiers. L’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) et les rapports annuels de contrôle mettent en lumière que la plupart des échantillons du marché respectent les limites maximales de résidus (MRL), mais que les non-conformités et la fréquence de multi-résidus restent des signaux pertinents pour l’évaluation du risque, particulièrement en termes d’effet cocktail et d’exposition chronique via des aliments très consommés comme les tomates.

Tomates, pesticides et emballages plastiques : un cocktail explosif…
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Les consommateurs ont intérêt à raisonner en termes d’exposition cumulative
Dire qu’une substance est suspectée d’être perturbatrice du système endocrinien revient à reconnaître qu’elle peut interférer avec les hormones, même à faibles doses, et induire des effets subtils mais durables sur la reproduction, le métabolisme ou le développement neurologique. Les pesticides concernés ici ne se ressemblent pas tous chimiquement, mais plusieurs d’entre eux (ou leurs métabolites) ont montré des effets thyroïdiens, des altérations hormonales ou des effets reprotoxiques dans des modèles expérimentaux, ce qui motive des restrictions d’autorisation ou des révisions réglementaires approfondies. Quant aux signaux cancérogènes, pour certaines substances — chlorothalonil, captan — l’ensemble des données a conduit les agences à qualifier un risque possible ou probable, ce qui n’est pas la même chose qu’une preuve directe chez l’humain, mais suffit à justifier une prudence réglementaire et des contrôles sur les aliments. L’enjeu immédiat pour le consommateur n’est donc pas tant d’affirmer un lien causal net entre consommation de tomates et cancers, mais d’évaluer l’exposition cumulative : lorsque des tomates contenant plusieurs résidus sont consommées régulièrement, la somme des expositions, y compris aux molécules ayant des effets hormonaux, peut accroître la probabilité d’effets sanitaires à long terme.
Dans ce contexte, la limite légale d’un résidu (MRL) n’est qu’une partie de l’équation. Les normes sanitaires sont basées sur des évaluations toxicologiques d’une substance prise isolément et sur des hypothèses de consommation. Elles ne capturent pas toujours les interactions entre molécules, ni des effets faibles mais pertinents sur le système endocrinien. C’est précisément ce hiatus entre la réalité multi-résidus observée sur le terrain et les cadres d’évaluation réglementaire qui inquiète chercheurs et associations de consommateurs. Les analyses récentes, qui révèlent une fréquence accrue de multi-résidus sur des tomates importées d’Espagne et du Maroc, réactivent la question d’une surveillance renforcée et d’une intégration plus systématique des effets combinés dans les évaluations de sécurité alimentaire.
Pour le consommateur, une orientation pratique consiste à diversifier ses sources d’approvisionnement et, lorsqu’elles sont disponibles, à privilégier des tomates issues de l’agriculture biologique, qui présentent nettement moins de traces des substances citées dans les analyses. En second lieu, la cuisson et le pelage n’éliminent pas totalement tous les résidus mais peuvent en réduire certains ; laver et varier les aliments reste une précaution utile dans une stratégie globale de réduction d’exposition.
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