Pourquoi les règles sont-elles encore un tabou ?

« Les Anglais débarquent », « j’ai mes ragnagnas » ou encore « je suis indisposée » : la multitude d’expressions employées par les femmes au sujet de leurs règles montre qu’il s’agit d’un sujet encore tabou dans notre société. Décryptage.

Rédigé par Pauline Petit, le 18 May 2018, à 16 h 40 min
Pourquoi les règles sont-elles encore un tabou ?
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Il s’agit d’un événement qui arrive tous les mois, pendant plus de trente ans, à la moitié de la population. Et pourtant, cela reste encore d’un sujet tabou au sein de nos sociétés. Les femmes n’expriment la situation qu’à demi-mot et dissimulent leurs protections. Analyses croisées des règles et de leur perception par les hommes et les femmes.

Les règles, une honte ?

Une étude réalisée par la Coalition Internationale pour la Santé des Femmes montre que la quasi-totalité des femmes utilisent des euphémismes pour parler de leurs menstruations. Il existerait ainsi plus de 5.000 expressions pour évoquer cette période ou le sang des règles. Françoise Girard, présidente de la Coalition, explique au Washington Post : « En utilisant ces termes, on intériorise la honte, cela suppose que c’est quelque chose de mauvais, quelque chose dont on devrait avoir honte. La société vous dit que les règles sont quelque chose que les femmes devraient cacher ». Pourtant, rien de plus naturel que cette expérience millénaire, vécue par des millions de femmes chaque mois.

Les protections intimes : un train de retard ?

« Pourquoi en 2017 dans les pubs pour serviettes, le liquide est-il toujours bleu ? », se demande, entre autres questions, Camille Emmanuelle dans son ouvrage Sang tabou. Ne plus jamais rougir de nos règles. En effet, les fabricants de protections intimes, dans leurs publicités, contribuent à minimiser ou à imager la chose qui n’en devient que plus gênante pour les femmes.

D’après une étude menée par le groupe SCA(1) (qui possède notamment la marque Nana), 44 % des femmes françaises éprouvent toujours de la gêne lorsqu’elles ont leurs règles, et 43 % sont gênées lors de l’achat de produits d’hygiène féminine. Le groupe SCA souhaite pourtant « briser le tabou des règles », et « inciter les femmes à être elles-mêmes ».

Osons un peu de scepticisme vis-à-vis de ces beaux objectifs des grands groupes industriels. Pourquoi, en 2017, nous propose-t-on encore des solutions aussi archaïques, toxiques, productrices de déchets et peu confortables telles que les serviettes hygiéniques jetables ? Rappelons que les substances contenues dans celles-ci et dans les tampons peuvent être toxiques pour notre organisme, alors qu’elles côtoient le plus près de notre intimité. Il existe pourtant des solutions alternatives aux protections jetables encore peu démocratisées, comme la coupe menstruelle.

Peut-être est-ce une question profondément inégalitaire et que la recherche autour de l’amélioration du confort pendant les règles n’est pas une priorité des cabinets de recherche et développement, composés en majorité d’hommes. Pour Elise Thiébaut, journaliste et auteure de l’ouvrage Ceci est mon sang, « beaucoup de questions médicales sur le bien-être des femmes ne sont pas suffisamment traitées ». On peut ajouter en outre que jusqu’en décembre 2015, avant l’affaire de la « taxe tampon » les protections intimes étaient injustement surtaxées, non considérées comme des produits de première nécessité. Une inégalité de plus pour les femmes.

Sexe et règles : le poids du tabou

Un article paru dans le magazine Elle en janvier 2017 enquête sur ce « dernier tabou » qu’est le sexe pendant les règles. De nombreux couples font une croix sur les rapports sexuels pendant les règles, par habitude ou par gêne. Or l’article rappelle qu’il n’y a aucun risque ni contre-indication à avoir des rapports sexuels pendant ses règles. Au contraire, les femmes ressentant souvent une hausse de la libido pendant cette période.

Toutefois, les interdits liés à la religion ou aux coutumes restent forts et on s’est habitués à considérer cette période comme un moment sale. Quelques astuces permettent toutefois de ne pas salir les draps et d’avoir une sexualité tout à fait normale au moment de ses règles.

Il est important donc pour les femmes de ne pas cacher ni dramatiser ce moment pour éviter d’en faire un sujet tabou ou honteux. Apprenons à apprivoiser notre corps et nos cycles pour mieux les comprendre. Parlons-en en termes simples en société aux femmes et aux hommes, et à nos filles qui ne les verront pas avec terreur. Faisons comprendre aux hommes ce qui nous arrive tous les mois, et que ce n’est ni sale ni diabolique. Faisons de nos règles un sujet public !

Illustration bannière : Tabou des règles – ©Africa Studio Shutterstock
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8 commentaires Donnez votre avis
  1. ce qui est tabou c’est les féministes qui se pensent encore dans les années 60. Autour de moi, dans mes connaissances, etc y’a aucun tabou que ce soit sur les règles, la sexualité ou le « vagin des femmes ». Je me demande bien ou vous trouvez vos sondages. Ces articles sont loin de la réalité du terrain.
    Les femmes n’en parlent pas uniquement parce que c’est liée à l’intimité. Faut-il obligatoirement faire un post a chaque fois qu’on fait quelque chose d’intime ? La est la question majeur de société. Personnellement mon choix est déjà fait. Je ne partage que ce que j’ai envie.

  2. « il n’y a aucun risque ni contre-indication à avoir des rapports sexuels pendant ses règles. Au contraire, les femmes ressentant souvent une hausse de la libido pendant cette période. »
    « on s’est habitués à considérer cette période comme un moment sale. »

    Oui, enfin, c’est un peu réducteur tout ça… Ce n’est pas juste une question de propre ou sale ou de gênant: quand on souffre chaque mois et simultanément de maux de tête au point de ne pas supporter la lumière du jour, d’une barre dans le dos et d’atroces crampes dans le ventre qui empêchent de marcher, la libido, elle est un peu loin…!!!

    Et vous, quand vous avez des ampoules aux pieds, vous avez vraiment envie de faire un footing???

  3. C’est lassant… ce terme de tabou accolé à tout. On dirait une sorte de diktat qui réclame la fin de l’intimité. Une sorte de pression qui pose en dogme le fait de devoir tout partager, tout le temps sans distinction. Comme si tout ce qui relevait de la sphère de l’intime était intolérable et inexcusable.
    Et bien non, je pense qu’il est bien de pouvoir conserver le domaine du privé. On peut très bien parler de sujets uniquement avec ses proches mais pas avec ses collègues du bureau. Cela ne veut pas dire que le sujet soit honteux, sale ou horrible. non. juste d’ordre intime.

  4. faite vous l amour pour plus avoir vo règle

  5. grâce, en revanche, à cet article, je sais à présent dans quelle « logique » globale s’inscrit ce tabou, et j’ai la confirmation que les règles peuvent être douloureuses au point des fois de ne pas dormir !

  6. bonjour, je sais toujours pas pourquoi les règles sont taboues … cet article ne répond pas à la question qu’il a eu la prétention de poser 🙂

  7. Pourquoi l’arrêt des règles est-elle encore un tabou ?

    Jamais dans l’histoire de l’humnité la femme n’a eu autant de règles dans une vie ! Tous les mois . pourquoi ? c’est le bout d’un cycle de reproduction.. or les femmes ont généralement 2 ou 3 enfants, pourquoi ovuler 500 fois dans une vie dans ce cas ?

    pas d’ovulation = pas de règles

  8. Ben oui, ce n’est pas rare que des femmes aient une sexualité même pendant mes règles… mais ce sujet est encore bien trop tabou.
    Sinon, j’en parle aussi par ici
    ++

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