Tantale : une filière émerge pour le récupérer de votre poche

Métal incontournable de la société de l’information, on retrouve le tantale dans nos appareils connectés. A quel prix ? Jusqu’à quand ? Le tantale apporte de nombreux bénéfices, mais des gisements limités impose son recyclage en urgence. Une filière émerge.

Le tantale : vous ne le trouverez pas au rayon « bricolage » de votre supermarché

Élément chimique du tableau périodique, c’est un scientifique suédois, Anders Gustaf Ekeberg, qui l’isola le premier en 1802, et qui lui attribua le nom de Tantale, demi-dieu, fils de Zeus et de la nymphe Plouto. Tantale fut puni pour cannibalisme au supplice (de Tantale, donc…) à passer l’éternité à souffrir dans le Tartare.

Le tantale (le vrai, pas le mythique) étant bon conducteur de chaleur et d’électricité, il trouve sa première application dès 1900 comme filament à incandescence pour les ampoules.

Vous utilisez plus de tantale que vous ne le saviez

Aujourd’hui il est notamment utilisé à la fabrication des composants électroniques, principalement des condensateurs, qui permettent de conserver les données lorsque votre téléphone est éteint.

On l’emploie aussi pour la fabrication de prothèses, d’implants et d’instruments chirurgicaux, car il ne réagit pas avec les fluides corporels.

On le retrouve aussi dans les alliages métalliques à haut point de fusion…

Le supplice du tantale : ce sont les miniers africains qui le vivent aujourd’hui

Envie d’un peu de tantale ? Vous devrez d’abord trouver du minerai de tantalite dans l’une des huit mines principales dans le monde, situées en Australie, au Brésil, au Canada, en Éthiopie ou en Chine, ou alors des minerais complexes sous forme d’oxyde, associé au niobium – avec lequel il a longtemps été confondu -, tel que le coltan, exploité principalement au Congo dans des mines sauvages. Par broyage et utilisation de divers acides, vous pourrez en extraire le précieux métal.

Le coût de l’exploitation de la tantalite et du coltan est très important, tant pour les humains, comme révélé dans une récente enquête de France 2, que pour les populations de primates, car les délogeant de leur habitat. On estime qu’entre 60 et 80 % des réserves mondiales de coltan sont localisées au Kivu (République Démocratique du Congo), où les guerres rendent l’approvisionnement incertain.

L’urgence du recyclage

Il n’existe pas aujourd’hui de substitut au tantale. Or, les gisements connus exploitables sont épuisables à l’horizon d’environ deux décennies au rythme de consommation actuel, et commencent déjà à diminuer, comme d’ailleurs d’autres métaux rares tels que germanium et indium, que vous retrouvez également dans votre smartphone. Face au risque de pénurie, et en l’absence de substitut, pas d’autre choix que de recycler.

Malheureusement, son taux de recyclage est aujourd’hui quasiment nul. La société Terra Nova, créée en 2006 et basée dans le Pas-de-Calais, assure ainsi le recyclage des cartes électroniques. Elle a créé un process par pyrolyse qui détruit les composants organiques des cartes électroniques, tels que résines époxy et fibre de verre, afin de récupérer les métaux stratégiques qu’elles contiennent, non seulement le tantale, mais aussi l’or, l’argent, le palladium… Et le tout sans rejet gazeux toxiques. Terra Nova traite déjà chaque année quelque 30 000 tonnes de cartes électroniques pour alimenter les fabricants de GPS et autres écrans à cristaux liquides en tantale.

© CC, Alchemist-hp (d) (www.pse-mendelejew.de)

Pôle de compétitivité dans le Nord

D’autres sociétés sont sur le coup, telles que Nyrstar, Recytech, Baudelet, Neo-Eco et le groupe minier Eramet. C’est une véritable filière du recyclage des matériaux stratégiques qui émerge. Un pôle de compétitivité a été créé dans le Nord – « Team2 » – autour des technologies de recyclage, de valorisation des déchets et la recyclabilité des matières et matériaux.

En attendant que les taux de recyclage augmentent, prenez donc soin de votre portable, c’est une mine de minerais précieux…