Label « Zéro résidu de pesticides » : un compromis crédible entre bio et conventionnel ?
Promesse moins ambitieuse que le bio, le label « Zéro résidu de pesticides » suscite un engouement croissant — mais tient-il ses promesses sanitaires et environnementales ?

Positionné entre l’agriculture biologique et la production conventionnelle, le label « Zéro résidu de pesticides » cherche à concilier performance économique et attentes sanitaires. Mais derrière une promesse séduisante, se pose une question essentielle : peut-on vraiment garantir l’absence totale de résidus chimiques dans les aliments sans transformer profondément les pratiques agricoles ?
Un label inspiré des méthodes de l’agriculture biologique
Depuis 2018, le label « Zéro résidu de pesticides » (ZRP) gagne du terrain dans les rayons de fruits, légumes, vins et jus, en affichant la promesse d’une alimentation plus saine à moindre coût que le bio. Mais qu’implique exactement ce label ? À quel point les produits « zéro résidu de pesticides » sont-ils meilleurs que les conventionnels, et sont-ils comparables au bio en termes de risques et bénéfices ?
Le label « Zéro résidu de pesticides » (ZRP) est une initiative privée, portée par le collectif d’agriculteurs Nouveaux Champs, et non un signe officiel de l’État comme le label Rouge ou l’AB (Agriculture Biologique). Il repose sur une promesse de résultat : qu’au stade de la consommation, aucun résidu quantifiable de pesticide ne soit détecté. Le label s’inspire de méthodes utilisées en agriculture biologique — lâchers d’insectes auxiliaires, biocontrôle — mais ne prohibe pas l’usage de tous les pesticides de synthèse, à condition qu’ils n’entraînent pas de résidu détectable. Selon ses promoteurs, les analyses visent des seuils correspondant à la limite de quantification (LQ) des laboratoires : un résidu détecté mais sous cette limite est considéré comme non quantifiable, donc conforme à la promesse ZRP. Le label s’appuie sur des laboratoires accrédités et des audits par un organisme tiers.
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« Zéro résidu de pesticides » : un cahier des charges rigoureux
Les producteurs engagés dans ZRP doivent en effet mettre en place un cahier des charges strict : rotation longues des cultures (en moyenne 6 ans selon le collectif), diversification des espèces cultivées, lutte intégrée, baisse des intrants chimiques. Une étude menée auprès de 33 adhérents indique une réduction moyenne de 50 % de l’IFT (Indice de Fréquence de Traitements phytosanitaires) sur les produits labellisés en 2024, comparé aux références agricoles habituelles. Le collectif précise que l’utilisation des pesticides homologués est possible en dernier recours, à condition de ne pas dépasser les seuils quantifiables.
Cependant, la transparence du cahier des charges pose question : selon l’ONG Générations Futures, les listes des substances « rouges » (à restreindre) et « noires » (à interdire) ne sont pas publiement accessibles. De plus, le label tolère dans ses textes internes jusqu’à 0,010 μg/kg de résidu, ce qui relativise la notion de « zéro ». Des entreprises partenaires (comme Sabarot) indiquent tester jusqu’à 250 molécules, avec un seuil de 0,01 ppm, mais cette pratique varie selon les produits. Les contrôles officiels restent principalement assurés par la DGCCRF via ses plans de surveillance nationaux, en parallèle des audits internes au label.
Les services de l’État continuent d’enquêter sur les produits « sans résidus de pesticides »
En tant que gendarme de la consommation, la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF) s’est elle aussi penchée sur ce label en 2020. Ses agents avaient effectué 4.490 prélèvements d’origine végétale. Verdict : le taux global de non-conformité aux LMR (Limites Maximales de Résidus) était de seulement 3,7 %. Parmi ces produits, 50,7 % présentaient des résidus quantifiables dans le conventionnel, contre 9,4 % pour les produits biologiques. Pour les prélèvements effectués dans le cadre des contrôles renforcés à l’importation, le taux de non-conformité monte néanmoins à 6 %.
Les ONG comme Générations Futures critiquent la promesse marketing du « zéro résidu » comme trompeuse, soulignant l’impossibilité pratique de détecter tous les résidus possibles et le manque de transparence des cahiers des charges. L’ONG France Nature Environnement émet elle aussi des réserves : selon elle, les labels revendiquant « zéro résidus » peuvent induire en erreur le consommateur. Du côté institutionnel, la DGCCRF maintient ses plans de surveillance et contrôle des résidus. En 2023, 28 plans ont été déployés (dont 10 transférés depuis la DGCCRF), selon le ministère de l’Agriculture. Par ailleurs, l’État accompagne les démarches de réduction des pesticides via des programmes comme Écophyto (visant une réduction de 50 % des usages d’ici 2025), bien que sa suspension ait été annoncée en 2024 dans un contexte de tensions agricoles. Enfin, l’étude « Albane », une enquête nationale de biosurveillance lancée en juin 2025, va permettre de mieux mesurer l’exposition réelle des Français aux pesticides, y compris ceux résiduels issus de l’alimentation.
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