L’effondrement des populations d’oiseaux, même des plus communs, se poursuit

Entre urbanisation croissante, artificialisation des sols, modèle agricole intensif et réchauffement climatique, comment s’étonner de l’hécatombe que connaissent les oiseaux communs ?

Rédigé par Paul Malo, le 5 Jun 2021, à 8 h 00 min
L’effondrement des populations d’oiseaux, même des plus communs, se poursuit
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La population des oiseaux des villes et des champs en France a décliné de près de 30 % en 30 ans : tel est le bilan dressé par le Le programme de Suivi Temporel des Oiseaux Communs (STOC).

Trois décennies d’observation sur le terrain

Connaissez-vous le STOC ? Ce Suivi Temporel des Oiseaux Communs (STOC) recense l’avifaune française, selon un protocole répété chaque année par un réseau d’ornithologues bénévoles répartis sur tout le territoire depuis plus de 30 ans. Le rapport de synthèse de ces trois décennies d’observation vient d’être dévoilé, et il confirme hélas que de trop nombreuses espèces ont connu un fort déclin au cours de ces 30 ans.

Les oiseaux des jardins, aussi utiles que beaux

Au total, ce rapport se fonde sur des dizaines de millions de données collectées sur le terrain par plus de 2.000 observateurs depuis 1989. Des données riches compilées et analysées afin de mesurer l’évolution des populations des 123 espèces d’oiseaux les plus communes en France. « Le STOC joue aussi un rôle crucial de lanceur d’alerte qui nous démontre scientifiquement l’urgence d’agir pour sauver les oiseaux et, avec eux, toute la pyramide du vivant, » estime Allain Bougrain Dubourg. Au final, selon ce bilan 1989-2019 publié par la LPO, le Muséum national d’Histoire naturelle et l’OFB, seules 32 espèces sont en expansion, comme le Rouge-queue à front blanc ou la Fauvette à tête noire.

Une faune familière en fort déclin

oiseaux communs en danger

Chardonneret élégant (Carduelis carduelis) – © Peter Fuzia

Mais à l’inverse, 43 espèces régressent dans l’Hexagone, dont le Chardonneret élégant, la Tourterelle des bois ou l’Hirondelle de fenêtres. L’impact du réchauffement climatique se fait également ressentir : il est désormais démontré que les populations d’oiseaux se décalent vers le nord pour tenter de rester dans les zones où la température leur convient le plus. Selon ce rapport, on assiste à une véritable hécatombe urbaine et agricole : « les oiseaux qui se reproduisent principalement en milieu urbain, comme les hirondelles ou le Moineau friquet, y ont trouvé une alternative à leur habitat naturel d’origine. Cette faune si familière est pourtant en fort déclin. La transformation des bâtiments et la rénovation des façades détruisent les cavités dans lesquelles nichent certaines espèces ; l’artificialisation toujours plus forte des milieux urbains diminue leurs ressources alimentaires ; la pollution due aux transports et aux activités industrielles a également un impact sur leur santé. »

En milieux agricoles, la situation est pire encore : des espèces comme l’Alouette des champs et les perdrix ont perdu près du tiers de leurs effectifs en 30 ans. En effet, « le modèle agricole intensif développé après-guerre et encouragé par la PAC est en grande partie responsable, pour avoir fait disparaître ou transformé leurs habitats et pour avoir diffusé massivement des produits chimiques, dont les pesticides qui ont bouleversé les équilibres alimentaires, décimé les insectes et abîmé durablement les sols. »

Une uniformisation de la faune sauvage

oiseaux communs en danger

Une tourterelle des bois européenne – © WildlifeWorld

C’est une véritable fausse bonne nouvelle : seuls quelques oiseaux capables de s’adapter connaissent une progression démographique, comme le très envahissant Pigeon ramier, le Geai des chênes ou la Mésange bleue. Ce phénomène d’accroissement des espèces dites « généralistes » au détriment des « spécialistes » est en fait le révélateur d’une « uniformisation de la faune sauvage, signe d’une banalisation croissante des habitats et d’une perte de biodiversité. »

« L’Office français de la biodiversité contribue à de nombreux suivis d’espèces (notamment oiseaux, poissons, mammifères) et de milieux (zones humides, cours d’eau, montagne, littoral et plaines agricoles) sur le long terme, rappelle Pierre Dubreuil, son directeur. Ces séquences qui s’étendent sur plusieurs décennies sont de véritables thermomètres dont les résultats sont inquiétants, comme l’illustre le STOC,. Avec l’État et ses partenaires, l’OFB tente d’apporter des réponses concrètes et des solutions pour agir. Il est urgent de les mettre en oeuvre et chacun doit y contribuer. »

Illustration bannière : Hirondelle de fenêtre (Delichon urbicum) – © Simon Vasut
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