Lundi de Pentecôte et Journée de solidarité : travaille-t-on ce jour férié ?

Les jours fériés sont généralement attendus par les Français, qui peuvent alors profiter d’éventuels ponts ou de week-end allongés. Mais le lundi de Pentecôte n’est pas un jour férié comme les autres, en effet, ce jour n’est pas forcément chômé, puisqu’il s’agit de la Journée de solidarité. À quoi sert cette journée particulière et doit-on forcément travailler ? Explications.

Rédigé par Cecile, le 1 Jun 2022, à 15 h 33 min
Lundi de Pentecôte et Journée de solidarité : travaille-t-on ce jour férié ?
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Le 6 juin 2022 : un lundi de Pentecôte férié, mais pas forcément chômé

La Journée de solidarité a vu le jour sous l’impulsion du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, via la promulgation de la loi du 30 juin 2004. Le but annoncé de cette journée particulière : permettre le financement d’actions dédiées à l’autonomie des personnes âgées en France, ou bien en situation de handicap. Une mesure entrée en vigueur l’année suivant la canicule mortelle de 2003, qui avait coûté la vie de plus de 19 000 personnes en France, dont de nombreuses personnes âgées isolées.

Concrètement, le lundi de Pentecôte n’est pas un jour férié pour les travailleurs, qui doivent – sauf dispense de leur entreprise – se rendre au travail. Mais cette journée de travail ne leur est en principe pas payée. La Journée de solidarité se traduit également pour les employeurs par le paiement à l’État d’une contribution solidarité autonomie (CSA).

Comme le stipule le Code du travail (loi du 30 juin 2004), la Journée de solidarité est donc bien un jour travaillé, à moins d’un accord avec l’employeur dans le domaine du privé. Des règles relatives à cette journée peuvent ainsi être fixées par accord collectif ou convention d’entreprise, ou bien une convention ou accord de branche. Pour ce qui est des domaines relavant du public, les règles sont fixées par le législateur et il est impossible d’y déroger.

Une personne âgée

Qui est dispensé de la Journée de solidarité en France ?

Pour être dispensé de travailler la Journée de solidarité, il faut donc que votre employeur vous le permette si vous travaillez dans le secteur privé. À noter que depuis la loi du 16 avril 2008, cette Journée de solidarité peut être effectuée (si elle est maintenue par l’employeur) un autre jour férié (autre que le 1er mai) ou en fractionné, ou bien en faisant don d’un jour de congé ou RTT en moins, etc. Quoi qu’il en soit, si l’employeur décide bien de maintenir ce jour de solidarité, en continu ou en fractionné, le travail effectué sera alors bien non rémunéré.

De nos jours et pour résumer, les principales options s’offrant aux salariés du secteur privé sont les suivantes :

  1. Effectuer la Journée de solidarité le lundi de Pentecôte.
  2. Effectuer cette journée un autre jour férié (autre que le 1er mai).
  3. Faire don d’un jour de RTT ou d’un jour de congé.
  4. Répartir sur l’année les heures de travail de cette journée (en général 7 heures).
  5. Ne pas avoir à effectuer cette Journée de solidarité en accord avec son employeur.

Pour leur part, les employeurs doivent contribuer à cet effort financier à hauteur de 0,3 % de leur masse salariale annuelle. Si les salariés sont totalement dispensés d’effectuer la Journée de solidarité, alors les employeurs paient en quelque sorte deux fois cette journée : à leurs salariés et à l’État. À noter que les retraités sont également mis à contribution, leur pension de retraite étant alors ponctionnée de 0,3 %.

Une question se pose : combien rapporte aux caisses de l’État ce jour férié en réalité travaillé par de nombreux salariés ? La Journée de solidarité rapporterait environ 3 milliards d’euros par an. Comment est réparti cet argent ? Sur les près de 3 milliards d’euros qui seraient générés par ce jour férié non chômé, près d’un tiers serait reversé aux départements, afin de financer entre autres l’Allocation personnalisée d’autonomie, ou bien la Prestation de compensation du handicap. L’autre tiers irait aux services et établissements médico-sociaux, lesquels s’occupent des personnes âgées, rapporte France Inter. Quid du 3e milliard ?

un ehpad

A lire aussi : Le Comité d’éthique dénonce la mise à l’écart des personnes âgées

Où vont les milliards générés par la Journée de solidarité ?

Depuis son instauration, les syndicats de travailleurs sont majoritairement vent debout contre cette mesure, qu’ils estiment inéquitable. Pour la CFDT, la Journée de solidarité est « un mode de financement injuste qui repose principalement sur la contribution des seuls salariés ». En 2016, la Confédération française des travailleurs chrétiens estimait qu’il s’agissait d’un dispositif aberrant, créant des inégalités entre les salariés (CFTC).

Pour appuyer sa critique, la CFTC citait en exemple le cas des employés de supermarché contraints par cette journée de travailler gratuitement pendant 7 heures, tandis que les agents de la SNCF devaient simplement travailler 1mn 52 en plus par jour, pour s’acquitter de ce jour de solidarité.

En 2007, la CGT affirmait même par communiqué que la Journée de solidarité est « en réalité une escroquerie morale accompagnée d’un vol ».

« Il n’y a pas de recette affectée pour la solidarité au niveau du budget de l’État et donc la cotisation versée va au budget général, sans affectation spécifique. Le gouvernement prétend avoir augmenté les ressources pour les caisses correspondantes. Après examen, les montants ne correspondent pas. Et ce n’est même pas garanti d’une année sur l’autre. (…) C’est le même phénomène que la vignette auto qui – très rapidement – n’a plus servi aux personnes âgées et est devenue une recette fiscale comme une autre. », déplorait le syndicat.

La Journée de solidarité est donc une journée clivante, qui génère également des polémiques à propos de l’utilisation des milliards engendrés. En 2019, Pascal Champvert, président de l’Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA), assurait sur France Info que l’argent n’allait pas « intégralement aux personnes âgées ». Depuis 2004, « une partie des crédits qui ont été récoltés [dans le cadre de la journée de solidarité] a été détournée par les pouvoirs publics », affirmait-il.

Selon Pascal Champvert, avec « l’aval des différents Premiers ministres », une partie des recettes de la Journée de solidarité aurait été reversée aux départements pour créer des collèges, améliorer les routes départementales, lutter contre la pauvreté ou encore renflouer les fonds de réserve pour la retraite. « Toutes ces choses sont extrêmement utiles, mais ne doivent pas être financées par les maigres crédits qui sont destinés aux personnes âgées », dénonçait-il alors. Des « détournements réguliers », insistait le président de l’AD-PA, qui pouvaient expliquer « le retard de notre pays en matière d’aide aux personnes âgées ». Un retard qui n’est visiblement toujours pas rattrapé, à en juger par les chiffres des Petits Frères des Pauvres. En France, 2 millions de personnes âgées de 60 ans et plus sont isolées et 530 000 se trouvent dans un isolement extrême. Plus d’un million d’aînés sont également en situation de précarité. Des personnes âgées pour qui il existe, en moyenne, seulement une place en EHPAD pour 10 demandes. Des EHPAD dont certaines structures sont à l’origine de scandales, tel que celui du groupe Orpea, mettant en exergue le manque de contrôles réguliers dans ces structures.

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