Assurance habitation : les sinistres explosent, les cotisations vont-elles suivre ?

Le régime d’indemnisation actuel, combinant assurances privées et garantie publique via le régime Cat Nat, montre ses limites.

Rédigé par , le 16 Jun 2025, à 10 h 20 min
Assurance habitation : les sinistres explosent, les cotisations vont-elles suivre ?
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Le 12 juin 2025, le Haut-Commissariat à la Stratégie et au Plan a rendu public un rapport qui bouscule les fondements du système assurantiel français. En ciblant l’assurance habitation, il préconise un changement de paradigme face à l’intensification des risques climatiques. L’idée centrale ? Poser les bases d’une « Sécurité sociale climatique », impliquant l’État comme acteur central de la mutualisation des dommages.

L’assurance habitation face à l’urgence climatique

Depuis plusieurs années, la facture des sinistres liés aux événements extrêmes s’alourdit. Sécheresses, inondations, tempêtes : ces épisodes deviennent la norme plus que l’exception. Le régime d’indemnisation actuel, combinant assurances privées et garantie publique via le régime Cat Nat, montre ses limites.

Selon le rapport du Haut-Commissariat, intitulé Repenser la mutualisation des risques climatiques, « le coût de l’inaction est très supérieur au coût de l’action ». L’auteur du rapport, Clément Beaune, souligne : « C’est avant tout la facture du changement climatique ; la question clé est celle de sa prise en charge, publique ou privée, individuelle ou solidaire ».

Trois scénarios de réforme : vers une sécurité sociale climatique ?

Face à ces défis, le rapport structure trois scénarios prospectifs de réforme.

Le premier, dit scénario de régulation, propose de conserver un système mixte mais plus contraignant. L’État y renforcerait son rôle de régulateur, imposant des « contrats responsables habitation » semblables à ceux en santé, incluant des garanties obligatoires sur les risques climatiques majeurs. Le coût de ce scénario est estimé à deux milliards d’euros.

Le deuxième, plus ambitieux, envisage un modèle dans lequel l’État deviendrait garant universel des risques climatiques, notamment la sécheresse. Cela impliquerait une extension du rôle du fonds Barnier, principal outil actuel de financement des catastrophes naturelles. Le coût grimperait alors à environ cinq milliards d’euros.

Enfin, le troisième scénario propose une sécurité sociale climatique. Dans ce cadre, l’État prendrait en charge l’intégralité des indemnisations, via des branches dédiées aux événements climatiques. Ce système reposerait sur une mutualisation universelle financée par l’impôt, dans une logique proche de l’assurance maladie.

Une proposition qui inquiète les assureurs

La publication de ce rapport a provoqué une réaction immédiate du secteur. Dans un communiqué publié le 13 juin 2025, France Assureurs dénonce un modèle qu’elle juge « inefficace, coûteux, et dangereux pour les finances publiques », selon L’Argus de l’assurance. L’organisation estime que les propositions du Haut-Commissariat « n’amélioreraient pas la protection des Français face aux risques climatiques et seraient dangereuses pour les finances publiques ». Elle rappelle que le modèle français d’assurance habitation, basé sur un taux d’équipement de 98 % et une prime moyenne de quarante euros, est « envié par de nombreux pays ».

Ce débat met en lumière une tension croissante entre logique privée et exigence publique. Faut-il continuer à faire reposer le coût du climat sur des primes individuelles, ou basculer vers une logique de solidarité nationale ? Quelle part de responsabilité individuelle face à des événements dont les causes sont collectives ? Et qui doit payer pour des logements construits dans des zones à risques ?

Le Haut-Commissariat le rappelle : « Toute action qui permet de réduire ce dérèglement, d’en diminuer la vitesse, l’ampleur ou les impacts, en abaisse le coût pour la société ». L’enjeu dépasse l’assurance. Il touche à la manière dont une nation choisit de gérer le risque collectif.

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