Transition énergétique : L’énergie non consommée devient une valeur marchande 

Plus de 50 pays ont adopté un dispositif contraignant les fournisseurs d’énergie à financer des projets de rénovation qui acquièrent ainsi une valeur de marché. D’aucuns saluent l’avènement de la « white economy » un nouveau modèle économique basé sur la rareté.

Rédigé par Étienne Vergne, le 2 Aug 2018, à 8 h 00 min
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Comment impliquer les fournisseurs d’énergies dans la rénovation énergétique ? Pour certains, la solution la plus efficace passe par une obligation de financement ou de promotion de travaux d’économies d’énergie assortie d’une sanction financière. Au niveau international, ce mécanisme s’appelle Energy Efficiency Obligations (EEO).

White economy : les économies d’énergie, une marchandise comme les autres ?

Tout est parti du Royaume-Uni. Au début des années 2000, la mise en place des « White Certificates » a testé cet outil d’un nouveau genre. La France  a emboîté le pas aux Britanniques en 2006 avec les certificats d’économies d’énergie (CEE). Suivie par les Italiens avec les titres d’efficacité énergétique. Aujourd’hui, ce type de dispositif concerne la moitié des États-Membres de l’UE.

Comment fonctionne ce mécanisme ?

Chaque année, un fournisseur se voit imposé par un régulateur national un quota de travaux d’économies d’énergie à réaliser ou à financer. Il s’agira par exemple de l’isolation d’une toiture ou  de l’installation d’une nouvelle chaudière. En France, ces démarches aboutissent à la délivrance d’un certificat d’économies d’énergie qui mesure cette obligation en « mégawatheures cumulés et actualisés » ou Mwh Cumac.

La création de marchés nationaux autour de l’énergie non consommée

Une lourde sanction financière pèse sur les contrevenants. Les opérateurs ont donc tout intérêt à adopter une stratégie d’évitement en détectant ses opérations pour les financer ou les promouvoir auprès de leurs consommateurs quitte à nouer des partenariats avec des entreprises du bâtiment.

Les travaux d’économies d’énergie acquièrent ainsi une valeur économique et une valeur d’échange entre les acteurs du pays concerné. En France, les fournisseurs d’énergies dépensent tous les ans trois milliards d’euros pour satisfaire cette obligation.

Aujourd’hui, plus de 50 pays ont adopté la méthode. Certains prêchent l’avènement d’une « White Economy » pour désigner la généralisation de cette logique au niveau mondial.

white economy

En France, les fournisseurs d’énergies dépensent tous les ans 3 milliards d’euros pour détenir des certificats d’économies d’énergie © Katarzyna Wojtasik

Comment les fournisseurs s’acquittent de cette obligation ?

Les modalités diffèrent selon les pays. Parfois, les opérateurs cotisent à des fonds de financement de travaux d’efficacité énergétique. « C’est en général la façon dont démarre ce genre de dispositif dans un pays», précise Benoît Ferres, de Cameo Energy, société de service spécialisée dans la transition énergétique.

D’autres modèles plus intégrés leur imposent de réaliser eux-mêmes ces opérations de rénovation énergétique. « C’est le modèle anglais. Ce sont les filiales des fournisseurs qui vont réaliser les travaux d’isolation chez les particuliers », précise Benoît Ferres.

Enfin, les fournisseurs recourent aux services de délégataires. « Tout passe par un marché. Des acteurs sont autorisés à déposer des dossiers de certificats ou de titres qui seront ensuite rachetés par les fournisseurs d’énergies », analyse Benoît Ferres. À charge pour les fournisseurs de rémunérer ces partenaires ou de mettre en place des incitations marketing ou de verser des primes à l’investissement à leurs clients.

Détournements frauduleux

En France, les failles du CEE ont donné lieu à des fraudes. Beaucoup sont orchestrées par des délégataires malhonnêtes qui sont parvenus à détourner des primes pour des travaux inexistants ou des factures gonflées.

Des pratiques dénoncées fin 2017 dans le rapport annuel de Tracfin, l’organisme chargé de traquer les circuits financiers clandestins. Pas de quoi remettre en cause la fiabilité du système selon les professionnels qui préconisent un renforcement des contrôles.

crédit : Rontsik

Après la transition énergétique, la sauvegarde des abeilles ?

Pour certains, la méthode se transposera à d’autres problématiques environnementales. C’est là que le concept de « white economy » prendra alors tout son sens selon ses promoteurs. Par exemple, la mort des abeilles. « On pourrait imaginer donner de la valeur au fait d’éviter qu’une ruche meurt. On monétise des actions qui n’étaient jusque-là prises en compte que comme des externalités négatives ou positives. Des réflexions sont aussi menées dans le domaine du recyclage », anticipe Benoît Ferres.

Illustration bannière : © Alberto Masnovo
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