Personne ne le conteste: une réduction drastique de notre consommation de viande s’impose pour des raisons environnementales. Certains préfèrent s’en passer et opter pour un mode de vie végan. Ce choix devrait-t-il pour autant se généraliser à toute la planète ?
Le mode de vie végan est en vogue. Mais sa généralisation ne serait pas forcément un cadeau pour l’environnement si plus aucun animal n’est utilisé pour nourrir les humains, selon certains scientifiques. Le tout est de trouver un juste milieu !
Manger trop de viande est mauvais pour la santé…
Peut-on imaginer une planète sans viande et 100 % convertie à l’alimentation végétale ? Une chose est sûre, la surconsommation de produits carnés est aujourd’hui déconseillée par de nombreux médecins. En effet, la dernière étude Nutrinet conseille de ne pas dépasser les 500 grammes de viande rouge par semaine(1).
En 2015, un rapport du Centre international de recherche sur le cancer montre que lorsque l’on ajoute 100g de viande rouge au régime quotidien, le risque de cancer colorectal augmente de 17 %. Des problèmes de surpoids sont aussi constatés.
À cela s’ajoutent les conséquences néfastes pour l’environnement, puisque selon le dernier rapport de la FAO, publié en 2013, l’élevage de bétail dans le monde serait responsable de 14,5 % des émissions de gaz à effet de serre et serait très gourmand en eau et céréales… De plus, environ 15.000 litres d’eau sont nécessaires à la production d’un kilo de viande de boeuf.
Une planète 100 % végan ?
Mais quelles seraient les conséquences d’un régime 100 % végan appliqué à toute la planète ? Pour certains chercheurs, l’humanité ne gagnerait pas forcément au change.
Une élevage intensif de bovins © watch the world
« Un modèle alimentaire végan généralisé, nous mènerait à une impasse d’un point de vue environnemental », estime Thomas Nesme, professeur d’agronomie à Bordeaux Sciences Agro aux Echos. Et d’ajouter : « [Les prairies] jouent un rôle essentiel pour la biodiversité faunistique et florale et dans la lutte contre le changement climatique en stockant du carbone. Elles sont importantes pour la régulation des flux d’eau, sans oublier leur rôle esthétique ».
Autre argument : il existerait une interdépendance entre les systèmes alimentaires et les systèmes de production ou de transformation. Notamment dans l’agriculture biologique quand elle combine polyculture et élevage. «Si le bio se développe, l’animal joue un rôle fondamental dans le transfert de la fertilité vers les cultures », poursuit Thomas Nesme.
S’affranchir des modèles d’élevage intensif
Plus surprenant encore : la fin des animaux d’élevage n’impliquerait pas forcément une meilleure utilisation des espaces agricoles. Des études ont cherché à évaluer l’impact des modes d’alimentation sur la consommation des espaces agricoles. Personne ne conteste qu’un régime à base de protéines animales demande beaucoup de terres cultivées. Mais d’après leurs résultats, une alimentation strictement végétale ne permettrait pas d’atteindre un niveau de consommation minimal.
Selon une étude néerlandaise, le régime idéal devrait intégrer 12 % de protéines animales. « Un monde sans animaux ne serait pas optimal, et la généralisation d’une alimentation végétalienne nécessiterait plus de terres pour nourrir la population qu’un régime modéré en viande », conclue Bertrand Dumont, chercheur à l’Inra et à l’université de Clermont-Auvergne.
Une alimentation strictement végétale serait gourmande en terres agricoles. ©italianestro
Au final, ce n’est pas tant le principe de l’élevage qui pose problème à ces scientifiques. Mais bien la manière de le pratiquer. « Répartir l’élevage n’aurait que des avantages agronomiques, en diversifiant les cultures et les paysages et en diminuant les pesticides, puisque les insectes ravageurs seraient moins présents », suggère François Léger, directeur de recherches à AgroParisTech.
Plutôt que la fin de l’élevage, ces experts préfèrent préconiser la généralisation de l’agroécologie, l’abandon des importations de protéines végétales et l’adoption de régimes alimentaires plus sains.
Illustration bannière : Les produits incontournables de l’alimentation vegan – © Alexandra Anschiz