Pour la petite histoire, en France ou en Belgique on trouve des traces historiques de coutumes proches des habitudes d’Halloween. La fête trouverait son origine dans une autre fête, célébrée non seulement en Irlande, mais également en Gaule.
Origine d’Halloween : consommation, tradition ? En tout cas pas une fête américaine
Dans la culture populaire, Halloween est souvent associée aux États-Unis. Et pour cause puisque la fête est très suivie dans ce pays et les productions culturelles en sont donc baignées. La fête est très commerciale, et toujours très suivie(3) Côté culturel, il n’est pas rare qu’une série télévisée américaine ait son épisode consacré à Halloween(1), comme par exemple dans Les Simpsons. Ou encore Desperate Housewives, Grey’s Anatomy, Castle, Esprits criminels, Friends, Mac Gyver, K2000, Buffy contre les vampires, ou NCIS. Sans compter les films dont le synopsis complet tourne autour d’Halloween. Citons notamment Great Pumpkin, Charlie Brown de Meléndez, La Nuit des masques de Carpenter. Et évidemment L’Etrange Noël de Mister Jack de Burton.
Halloween une célébration originaire du Vieux Continent
Halloween ne trouve pourtant pas son origine aux États-Unis, mais bien sur le « vieux continent », l’Europe. Certains avancent même l’hypothèse que la fête trouverait son origine dans la Babylone antique(4). Telle qu’on la connaît, la fête trouve en tout cas son origine dans les îles anglo-celtes. Il s’agit de la soirée du 31 octobre, veille de la Toussaint, le nom signifiant tout simplement « la veillée de la Toussaint » (en anglais « All Hallows Eve » pour « the eve of All Saints’ Day »).
Les Irlandais apportent l’un des symboles les plus importants d’Halloween : Jack O’Lantern. Le personnage est issu d’un vieux conte irlandais qui raconte l’histoire de Jack, méchant personnage ayant dupé même le Diable.
En arrivant en enfer, le Diable refuse son entrée, mais Jack le convainc de lui donner du charbon ardent pour une lanterne, creusée dans un navet, afin de trouver son chemin dans le noir jusqu’au jour du jugement dernier. Depuis, Jack O’Lantern errerait et réapparaîtrait chaque année, le jour de sa mort, à Halloween.
Les îles britanniques utilisent parfois encore des navets ou des rutabagas, mais la citrouille les remplaça progressivement, surtout aux États-Unis où elle était tout simplement plus courante, et également plus facile à creuser. La fête était arrivée en Amérique à la suite de la Grande Famine de 1845 en Irlande : plus de deux millions d’Irlandais partirent s’installer aux États-Unis, où on fête depuis couramment la Saint Patrick ou Halloween.
D’une fête païenne à une fête chrétienne
Halloween trouverait pourtant son origine dans la fête païenne de Samain. Il faut alors remonte aux Celtes, qui célébraient le début de l’automne, pour eux une sorte de Nouvel An. Il s’agissait de Samain en Irlande et de… Samonios en Gaule, les druides ayant autorité sur le déroulement des festivités. On fêtait donc Halloween avant l’heure dans ce qui sera la France.
En Gaule, d’ailleurs, la tradition était d’éteindre le feu de cheminée dans chaque foyer et de se rassembler autour d’un feu sacré dans le village pour éloigner les esprits maléfiques. Les braises chaudes servaient ensuite à rallumer le feu de chaque foyer pour préparer une bonne année. En Irlande, au Pays de Galles et en Écosse, on célébrera aussi longtemps une fête du nom de Oíche Shamhna en gaélique.
Les fêtes druidiques vont progressivement se perdre, essentiellement avec l’arrivée du christianisme. La confusion avec la Toussaint va se faire aux VIIIe et IXe siècles avec les papes Grégoire III et Grégoire IV, la fête de Samain étant à l’origine celle de la réunion du monde visible et du monde des morts, les vivants ayant accès en ce jour à cet autre monde(5). Les historiens avancent que la célébration des saints, à l’origine célébrée en mai par les chrétiens, aurait été déplacée au 1er novembre précisément pour christianiser la fête de Samain(6).
La fête des Morts fait débat
D’autres réfutent tout lien entre la veillée de la Toussaint et Samain. Quoi qu’il en soit, le nom de la fête populaire se transforme donc pour devenir la contraction d’une expression anglaise, Halloween, sans aucun lien direct avec la fête de Samain d’un point de vue étymologique. Pour ajouter à la confusion, les moines de Cluny instaurèrent une fête des Morts le 2 novembre, même si elle est généralement célébrée le 1er novembre par la population.
Vers une fête populaire
Pendant ce temps, en Bretagne, une réminiscence de Samain perdurait à travers une tradition consistant à laisser de la nourriture et le feu allumé, selon la croyance que les âmes des morts revenaient la veille de la Toussaint.
Cette tradition, non chrétienne, aurait perduré jusqu’au début du XXe siècle(2) Toujours en Bretagne, les enfants avaient pour habitude à la même époque, avant la Toussaint, de jouer des tours aux villageois. Ils creusaient également des betteraves et des navets, pour y introduire des bougies, ce qui se rapproche de la tradition de Jack O’Lantern et de Samain.
D’autres coutumes régionales
On trouve des coutumes proches dans d’autres régions et pays frontaliers. Il existe par exemple la Rommelbootzennaat, soit les betteraves grimaçantes, en Lorraine pour la veille de la Toussaint. On trouve également la fête du Räbeliechtli en novembre en Suisse. Ou encore les fêtes de la Saint-Martin en Belgique à l’occasion du début de l’automne.
À l’heure actuelle, on célèbre encore des messes pour la partie religieuse. Halloween est cependant massivement une fête populaire, surtout depuis la fin des années 1990 en France et en Belgique, liée à la mort, se manifestant par des feux de joie, des feux d’artifice, des contes et films d’horreur.
La fête des Morts mexicaine, proche des États-Unis, a contribué à influencer les célébrations en ce sens. Une autre composante est la tradition de se déguiser avec des costumes effrayants et de sonner aux portes en demandant des friandises avec la formule « Farce ou friandise ! » (« Trick or treat ! » en anglais). Une tradition qui trouve aussi son origine, sans les costumes, au Royaume-Uni et en Irlande avant même le XIXe siècle. Sous cette forme, la fête est principalement présente en Irlande, en Grande-Bretagne, aux États-Unis, mais aussi au Canada, en Nouvelle-Zélande, en Australie et en France(8).
Comme vous l’aurez compris, Halloween est un amalgame culturel, trouvant ses origines dans des coutumes anciennes. Cela s’est transformé progressivement en une fête avec ses récupérations variées et ses dérives commerciales.
Finalement, comme à Noël, chacun peut choisir, selon ses convictions et ses envies, de privilégier l’aspect qu’il préfère ou tout simplement ignorer la fête.
Article republié.
- Une liste non exhaustive : https://en.wikipedia.org/wiki/List_of_Halloween_television_specials
- Voyez les écrits de l’historienne Nadine Cretin à ce sujet.
- Belk, Russell W. « Halloween : An evolving American consumption ritual. » ACR North American Advances (1990).
- Voir cette source à ce sujet en anglais : Winkler, Louis, and Carol Winkler. « Thousands of Years of Halloween. » New York Folklore 26.3 (1970) : 204.
- Markale, Jean. Halloween, histoire et traditions. Éditions Imago, 2000.
- Voir notamment Hily, Gaël. « Samain, Halloween et la Toussaint. » (2011). Et une autre source en espagnol : Alberro, Manuel. « El antiguo festival céltico pagano de Samain y su continuación en la fiesta laica de Halloween, el día de los difuntos cristiano y el día de muertos en México. » Araucaria 6.12 (2004).
- HILY, Gaël, and Geneviève PIGEON. « L’Halloween : de l’Irlande à Montréal. »
- HILY, Gaël, and Geneviève PIGEON. « L’Halloween : de l’Irlande à Montréal. »
Cette fête conduit à des dérives commerciales et on fait croire aux enfants que c’est une fête pour eux : ils récupèrent des bonbons et autres friandises !
au really now
Vive la France !
Excellent article, très documenté – on y apprend beaucoup de choses. Dommage qu’il y ait ce « n’en déplaise aux grincheux » ! Il est un peu en contradiction avec l’affirmation d’une prétendue liberté d’ignorer la fête. Ce n’est pas évident de l’ignorer quand on vient presque défoncer votre porte le soir du 31 octobre pour que vous donniez « DES BONBONS ! ». Mais c’est sans doute normal de faire la fête en s’imposant. En tout cas c’est habituel, et ceux qui s’insurgent sont de vilains grincheux incultes. Bien entendu !Ah là, là !