Energie, climat : pourquoi Trump ne peut pas (vraiment) revenir en arrière

Le futur président américain Donald Trump vient de nommer Scott Pruit, un partisan des énergies fossiles climato-sceptique, à la tête de l’agence environnementale américaine (EPA), confirmant ainsi son intention de renverser la politique environnementale nationale. Pruitt pourra-t-il réellement négocier un virage à 180°C à la transition énergétique en cours aux États-Unis ?

Rédigé par Jean-Marie, le 13 Dec 2016, à 7 h 05 min
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Urgence d’accélérer : une sortie trop lente du charbon

« Il n’y a aucun doute que sur le long terme l’utilisation des énergies fossiles sera limitée par la loi et donc il est hors de question qu’on se remette à construire de nouvelles grandes centrales à charbon. Nos investissements en capitaux se font sur la durée quelles que soient les décisions à court terme de la nouvelle administration », souligne Nikolas Akins.

Il reste que les décisions des groupes privés seront insuffisantes pour créer le décrochage massif des industries fossiles que les scientifiques appellent de leurs voeux à court terme pour avoir une chance de stabiliser le réchauffement à moins de 2°C.

Selon l’administration américaine, l’utilisation de l’énergie éolienne s’est accrue de 100 % entre 2010 et 2015 et l’utilisation de l’énergie solaire a été multipliée par 20. Malgré tout, si l’on exclut l’énergie hydroélectrique, les énergies renouvelables ne représentent encore qu’une petite partie de la production énergétique, à peine plus de 7 % de l’électricité américaine.

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Des objectifs CO2 inatteignables

Les émissions de CO2 des États-Unis ont culminé en 2007 à 6 milliards de tonnes pour décroître légèrement à 5,4 milliards de tonnes en 2014. Pour respecter les promesses faites à Paris, il faudrait qu’elles ne représentent plus que 4,8 milliards de tonnes en 2025 et 1,2 milliard en 2050.

Andrew Jones, le directeur de Climate Interactive, un institut de recherche, explique que « pour atteindre de tels objectifs, il faudrait diminuer les émissions de CO2 de 5 % par an pendant 10 ans. Cela supposerait ne plus investir du tout dans des infrastructures d’énergies fossiles et au contraire il faudrait en fermer. Aucune chance que cela se passe sans une politique publique agressive ».

En ce qui concerne le charbon, il y a peu de chance que la politique de Donald Trump permette de recréer les emplois perdus dans le secteur des mines au cours des années récentes, sans même parler d’en créer des millions de nouveaux. En effet les producteurs électriques comme American Electric Power ont très largement levé le pied sur le charbon depuis que le marché a été inondé de gaz naturel à bon marché issu de la fracturation hydraulique.

Selon Kevin Boox, consultant chez ClearView Energy Partners, « la seule manière dont Scott Pruitt pourrait ralentir la sortie du charbon, ce serait de tirer un trait sur les incitations fiscales qui soutiennent les énergies renouvelables ». L’année dernière, celles-ci ont représenté 2,2 milliards de dollars en faveur de l’industrie et 1 milliard en faveur de l’énergie solaire. Les incitations fiscales en faveur de l’énergie éolienne vont commencer à décliner l’année prochaine jusqu’en 2020. Le crédit d’impôt en faveur du solaire va décliner et disparaître entre 2019 et 2022. « On paie des milliards d’impôts pour créer des fermes éoliennes. Donnez-moi ces milliards et je vous créerai des emplois », affirme Mr Murray, oubliant de mentionner les soutiens publics que reçoit déjà son industrie.

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Ferme solaire près d’Austin au Texas © RoschetzkyProductions Shutterstock

Aussi, malgré la volonté de l’industrie charbon et de la nouvelle administration américaine, il est peu probable que l’ensemble du dispositif d’incitation fiscale voté par les majorités démocrates et républicaines lors des deux dernières décennies sera complètement démantelé. Parmi les principaux bénéficiaires de ce dispositif on trouve des États gorgés de soleil et balayés par le vent comme le Kansas, le Texas ou l’Arizona ou bien les vieux États industriels de la ceinture de rouille qui ont investi dans des usines de panneaux solaires ou d’éoliennes… tous républicains.

« Je ne vois pas comment on pourrait supprimer ces incitations fiscales. Les électeurs de ces États s’y opposeraient fermement », affirme Kevin Boox. Sans compter avec la résistance de la société civile notamment des grandes villes américaines comme Los Angeles. Elles ont la ferme intention de continuer à développer une politique de développement durable très agressive et de ne pas laisser l’État fédéral leur dicter leur conduite. Dans la guerre contre le réchauffement climatique, une bataille vient d’être perdue, mais la guerre est loin de l’être.

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Jean-Marie Boucher est le fondateur de consoGlobe en 2005 avec le service de troc entre particuliers digitroc. Rapidement, il convertit ses proches et sa...

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