Quand la chasse façonne l’évolution : le gibier change… et ce n’est pas un hasard
Et si le fait que certains animaux soient abattus plutôt que d’autres par leurs chasseurs finissait par modifier le patrimoine génétique de l’espèce ?

Sans en avoir pleinement conscience, les pratiques de chasse peuvent modifier, au fil du temps, le patrimoine génétique des espèces sauvages. Une idée qui peut sembler étonnante, mais que plusieurs travaux scientifiques commencent désormais à confirmer.
Quand la chasse influence l’évolution
Activité humaine ancestrale, la chasse reste aujourd’hui très pratiquée, que ce soit comme loisir ou comme moyen de gestion des populations. Pourtant, selon de nombreux chercheurs, ces prélèvements ne sont jamais neutres. Même sans sélection volontaire, la chasse exerce une pression sur la faune, en favorisant involontairement certains traits au détriment d’autres.
Comme le rappellent les auteurs d’une étude publiée dans Biological Reviews(1), « la chasse pourrait être un facteur déterminant de l’évolution des oiseaux ». En éliminant régulièrement certains individus — souvent les plus visibles, les plus confiants ou les plus imposants — les chasseurs finissent par influencer la composition génétique du gibier restant.
Des traits transmis aux générations suivantes ?
Cette pression sélective pose plusieurs questions : que se passe-t-il lorsque les individus abattus sont ceux qui auraient pu transmettre des caractéristiques utiles à la survie de l’espèce ?
Poids, comportement, résistance : autant de traits qui peuvent, au moins en partie, avoir une dimension génétique.
Les nouvelles technologies de suivi, notamment les balises GPS, montrent d’ailleurs que certains animaux sont naturellement plus prudents et d’autres plus téméraires — et donc plus facilement prélevés. Reste à savoir dans quelle mesure ces différences comportementales se transmettent, mais les scientifiques alertent déjà : ignorer cette dimension pourrait fausser l’équilibre naturel de certaines populations.
L’exemple frappant des éléphants d’Afrique
Le cas des éléphants illustre de façon spectaculaire ce phénomène. Pendant des décennies, les chasseurs de trophées et les braconniers ont ciblé en priorité les individus dotés des plus grandes défenses. Résultat : dans certaines régions d’Afrique australe, la proportion d’éléphants nés sans défenses a rapidement augmenté.
Une étude de l’Université de Princeton, publiée dans Science, montre que cette évolution génétique s’est produite en une génération et demie — une vitesse totalement inhabituelle à l’échelle de l’évolution.

Éléphant sans défense
Un impact encore mal mesuré
Si les exemples documentés restent rares, ils tendent tous vers la même conclusion : lorsque l’humain prélève régulièrement certains profils d’animaux, l’espèce finit par s’adapter, parfois de façon inattendue. Ces évolutions pourraient avoir des répercussions sur la santé globale des populations sauvages, leur diversité génétique ou même leur comportement.
Les scientifiques appellent donc à intégrer ces connaissances dans les programmes de gestion de la faune. Car si la nature possède une incroyable capacité d’adaptation, certaines pressions humaines — dont la chasse — peuvent accélérer des mutations qui ne vont pas nécessairement dans le sens du bien-être ou de la résilience des espèces.
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