L’Arctique face à l’irréversible après une année climatique record

L’Arctique traverse un point de bascule inédit. Selon le dernier rapport « Arctic Report Card » de la National Oceanic and Atmospheric Administration américaine (NOAA), jamais les indicateurs climatiques, océaniques et biologiques n’avaient été aussi dégradés simultanément.

Rédigé par , le 19 Dec 2025, à 9 h 54 min
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Températures record, banquise qui se rétrécit, glace ancienne quasi disparue et pergélisol en dégel dessinent le tableau le plus sombre jamais dressé pour l’Arctique, devenu l’un des épicentres du dérèglement climatique mondial.

Une hausse des températures sans précédent

Publié le 16 décembre 2025 par la National Oceanic and Atmospheric Administration américaine, l’« Arctic Report Card 2025 » nous apprend que l’Arctique a connu, sur la période octobre 2024 – septembre 2025, l’année la plus chaude jamais observée depuis le début des relevés modernes en 1900. Ce diagnostic s’appuie sur des séries satellitaires, océanographiques et terrestres concordantes, toutes orientées à la hausse ou à la baisse selon un même constat : le système arctique se transforme plus vite que prévu.

L’Arctique se réchauffe aujourd’hui à un rythme plus de deux fois supérieur à la moyenne mondiale. Ce phénomène s’est encore renforcé au cours de l’année écoulée, car, d’une part, l’automne 2024 et l’hiver 2025 ont affiché des températures exceptionnellement élevées et, d’autre part, la persistance d’eaux libres a amplifié l’absorption de chaleur. Ainsi, alors que les cycles saisonniers devraient favoriser un refroidissement marqué, la région a au contraire accumulé de l’énergie thermique.

Dans ce contexte, la banquise constitue un indicateur clé de l’état de l’Arctique. En mars 2025, son extension maximale hivernale a atteint le niveau le plus bas jamais observé en quarante-sept ans de données satellitaires. De plus, même si le minimum estival de septembre 2025 ne figure « que » au dixième rang des plus faibles valeurs enregistrées, un fait s’impose : c’est au cours des 19 dernières années que la taille minimale a été observée (19 fois sur 19). Autrement dit, la banquise n’est plus un régulateur stable, mais un système en repli continu, incapable de retrouver ses niveaux historiques.

L’Arctique privé de sa glace ancienne : conséquences sur l’océan, les ours et les écosystèmes

La transformation de l’Arctique ne se limite pas à la surface. La glace de mer multianuelle, c’est-à-dire la glace la plus épaisse et la plus résistante, a perdu plus de 95 % de son étendue depuis les années 1980. Cette disparition massive modifie profondément la dynamique de la glace, désormais majoritairement saisonnière, plus fine et plus vulnérable aux vagues de chaleur et aux tempêtes.

Par conséquent, l’océan Arctique réagit de manière de plus en plus marquée. Dans certaines zones libres de glace au mois d’août, la température de surface de la mer a augmenté d’environ 1,3 degré Celsius depuis 1982. Cette hausse favorise des changements biologiques rapides, notamment une augmentation spectaculaire de la productivité du phytoplancton. Selon la NOAA, celle-ci a progressé jusqu’à 80 % dans l’Arctique eurasien depuis le début des années 2000, avec des hausses significatives en mer de Barents et dans la baie d’Hudson. Ces évolutions modifient la chaîne alimentaire, ce qui a un impact direct sur les espèces emblématiques, comme les ours polaires, fortement dépendants de la glace pour la chasse.

L’Arctique bouleversé par le dégel du pergélisol et la recomposition des paysages

Au-delà de la glace et de la banquise, l’Arctique connaît également une transformation terrestre profonde. Le pergélisol, longtemps considéré comme un socle stable, dégèle sur de vastes territoires. En Alaska arctique, plus de deux cents bassins versants ont été identifiés comme étant touchés par ce phénomène. Le dégel libère du fer et d’autres éléments chimiques, provoquant l’oxydation des cours d’eau, désormais surnommés « rivières rouillées ».

Les paysages végétaux eux aussi évoluent rapidement. La verdure de la toundra a atteint en 2025 son troisième niveau le plus élevé depuis vingt-six ans de données satellitaires. Cette expansion végétale s’explique par des saisons de croissance plus longues et plus chaudes. Toutefois, ce verdissement apparent masque des déséquilibres profonds, car il modifie la réflectivité de la lumière du soleil, accélère le réchauffement local et perturbe les usages traditionnels des populations arctiques. De surcroît, la diminution de l’enneigement accentue cette dynamique : l’étendue de la neige en juin est aujourd’hui réduite de moitié par rapport à celle observée il y a soixante ans.

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Journaliste de formation, Anton écrit des articles sur le changement climatique, la pollution, les énergies, les transports, ainsi que sur les animaux et la...

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