L’ananas est considéré par certains comme le fruit exotique par excellence. Il est très apprécié pour sa saveur et aussi pour ses qualités nutritionnelles. Le fruit contient en effet de la broméline, un enzyme aux multiples bienfaits : anti-inflammatoire, antitumorale, anti-oedémateuse, en plus d’aider à la digestion et d’améliorer les systèmes circulatoire et cardiovasculaire. Pourtant, l’ananas a fait parler de lui dans des termes peu élogieux : une variété bien précise, le Sweet, produit au Costa Rica et exporté en masse contient de l’éthéphon. Cette substance synthétique est destinée à accélérer la coloration du fruit pour qu’il paraisse plus mûr.
Sweet, l’ananas hybride pas très catholique
L’ananas est le deuxième fruit exotique frais consommé en Europe (1). En France, on en mange en moyenne 1,3 kg par an et par habitant, surtout entre novembre et mars. Dans le monde, on produit 1,4 tonne de fruit chaque seconde, ce qui représente plus de 18 millions de tonnes de fruits par an.
C’est dire si les quantités d’ananas exportées sont astronomiques… D’où l’idée de la firme américaine Del Monte Foods, de mettre au point un ananas hybride, dont la production est plus rapide et qui surtout se révèle plus résistant au transport et aux changements de températures, notamment lors du passage obligé en chambre froide. Ce champion de l’exportation est aussi beaucoup plus sucré que son cousin le Cayenne, la variété d’ananas la plus cultivée.
Le Cayenne devient moins rentable que le Sweet cultivé au Costa Rica par Del Monte Foods, qui en produit 2 fois plus : 70 tonnes contre 35…
De l’éthéphon pour cacher les apparences
Plus tôt cette année, l’association Que Choisir dénonçait la contamination des ananas du Costa Rica à l’éthéphon. L’éthéphon ou acide chloro-2-éthylphosphonique est un dérivé synthétique de l’acétylène. La substance est pulvérisée sur les fruits quelques jours avant leur cueillette, afin de leur conférer une coloration plus soutenue. L’éthéphon va en fait pénétrer dans la chair de l’ananas pour accélérer le processus de coloration. Ainsi, ni vu ni connu, l’ananas est cueilli beaucoup plus tôt, réduisant de cette manière substantiellement les coûts de production. Les fruits pourront également rester plus longtemps en rayon, ce qui est bien entendu beaucoup plus rentable.
L’Europe fermerait-elle les yeux ?
Le magazine Que Choisir révélait, suite à son enquête, que 86 % des échantillons testés contenaient de l’éthéphon. Aussi, « sur 21 ananas achetés en supermarché, en épicerie ou au marché, 2 échantillons sont carrément dans le rouge, avec des dépôts d’éthéphon qui explosent de 2 à 5 fois la limite maximale, la fameuse LMR ».
La LMR, Limite maximale de résidus a pour objet de fixer des seuils de tolérance pour certains résidus dans l’alimentation, en raison de leur toxicité. Lorsque la LMR est dépassée, le produit ne peut être commercialisé. En Europe, c’est la Commission Européenne qui fixe les seuils. Il est donc tout à fait curieux (doux euphémisme) que des ananas contenant 2 à 5 fois la LMR d’éthéphon aient pu être retrouvés à la vente en France ! Pire, depuis 2009, l’Union Européenne a décidé d’être plus souple quant à la LMR d’éthéphon…
Pas très rassurant tout cela, qu’en pensez-vous ?
(1) chiffres Cirad. Sources : www.politique.net et www.altermonde-sans-frontiere.com
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