Acheter, livrer, polluer : ce que révèle vraiment « Impact Livraison »
Devant la multiplication des achats en ligne, un nouvel outil se propose de calculer l’empreinte carbone de nos livraisons. Entre ambitions affichées et limites méthodologiques, que nous dit vraiment « Impact Livraison » sur nos comportements de consommateurs ?

L’Agence de la transition écologique (ADEME) a lancé « Impact Livraison », un simulateur en ligne destiné à évaluer l’empreinte carbone de nos achats selon le mode de livraison choisi. Cet outil invite chacun à réfléchir aux conséquences de ses décisions de consommation, en mettant en lumière le poids environnemental du dernier kilomètre. Mais que nous apprend réellement ce calculateur sur nos habitudes et sur la prétendue neutralité écologique du commerce électronique ?
« Impact Livraison » : quand l’ADEME scrute nos colis sous toutes les coutures
Créé par l’ADEME, le simulateur « Impact Livraison » propose de renseigner le type de produit (vêtements, électroménager, livres…) ainsi que le mode d’acheminement souhaité : livraison à domicile, en point relais ou retrait en magasin (« click and collect »). Le dispositif permet d’affiner les paramètres en précisant la distance parcourue pour récupérer l’achat, et propose même d’inclure, en option, l’empreinte carbone de la fabrication du bien concerné.
Sur le papier, l’idée semble brillante. Comme l’explique le site officiel : « Vous achetez souvent en ligne ? Et si les articles ne vous conviennent pas, vous n’hésitez pas à les retourner ? Tous ces colis qui voyagent […] ne sont pas sans conséquences pour la planète ». Le simulateur met en avant quatre postes principaux d’impact : la navigation numérique nécessaire à l’achat, l’emballage, le stockage et bien sûr, le transport.
Un exemple édifiant ? Se rendre en boutique à pied reste, sans surprise, l’option la plus vertueuse. Mais ce raisonnement cache une forêt de paradoxes.
Sous ses airs pédagogiques, « Impact Livraison » n’est pas exempt de critiques. On peut regretter une généralisation des catégories. Entre un panier de denrées brutes locales et un caddie débordant de produits transformés importés, l’écart carbone est abyssal, pourtant non pris en compte. « À force de faire des moyennes et des approximations, les chiffres perdent leur pertinence », tranche même l’UFC-Que Choisir. On pourrait aussi s’étonner de l’option proposée d’aller chercher un lave-linge ou un lit à pied en magasin. En résumé : « Impact Livraison » nous pousse à réfléchir, mais sa méthodologie simplifiée appelle à la prudence dans l’interprétation des résultats.
D’un point de vue environnemental, l’achat en magasin reste le meilleur choix
Malgré ses imperfections, Impact Livraison pose une question dérangeante : sommes-nous prêts à ajuster nos modes de consommation pour réduire notre impact écologique ? L’outil met en évidence le fait que que la course au « toujours plus rapide » dans les livraisons — notamment les expéditions express en 24 heures — est souvent catastrophique pour le climat. La livraison express impose des trajets partiellement remplis, augmente l’usage de véhicules polluants, et aggrave le bilan carbone global. Toutefois, selon l’ADEME, « il n’existe pas de preuve systématique que la livraison en point relais soit toujours meilleure que la livraison à domicile ».
Néanmoins, deux enseignements clés ressortent. Tout d’abord, d’un point de vue environnemental, l’achat en magasin reste le meilleur choix, à condition de s’y rendre à pied. Ensuite, dans beaucoup de cas, la décision d’attendre quelques jours de plus pour une livraison standard ou de regrouper plusieurs achats réduit drastiquement l’empreinte carbone individuelle. De même, se déplacer en voiture pour un simple retrait « click and collect » peut paradoxalement s’avérer plus émetteur que la réception du colis à domicile, surtout si les distances sont importantes.
Loin de délivrer des vérités universelles, « Impact Livraison » met en lumière les contradictions de notre consommation moderne. Refuser l’immédiateté, regrouper ses commandes, privilégier la marche ou le vélo lorsqu’ils sont envisageables : voilà quelques gestes simples mais puissants que chacun peut tirer de cet outil. Reste à savoir si le consommateur pressé d’aujourd’hui saura entendre ce message avant que l’addition environnementale ne soit irrémédiablement salée.
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