COP30 : l’ONU appelle à repenser la climatisation
Dans son nouveau rapport intitulé « Global Cooling Watch 2025 », publié en novembre 2025 à la veille de la COP30, le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) alerte sur la « spirale énergétique et climatique » que constitue la climatisation, tout en esquissant les contours d’un refroidissement sobre, accessible et respectueux de l’environnement.

Alors que les vagues de chaleur battent des records sur tous les continents, le monde se retrouve face à un paradoxe : plus notre planète chauffe, plus la demande de climatisation explose — et plus cette dernière contribue, à son tour, au réchauffement climatique.
Climatisation : la capacité installée triplerait d’ici 2050
À mesure que les températures augmentent, le recours à la climatisation se généralise dans les logements, les bureaux, les transports et les hôpitaux. Selon le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), la capacité installée des équipements de refroidissement pourrait tripler d’ici 2050, passant de 22 térawatts en 2022 à 68 térawatts si les tendances actuelles se poursuivent. Cette dynamique est tirée par la croissance urbaine, l’élévation des niveaux de vie et la multiplication des épisodes de chaleur extrême. Or, cette expansion a un coût énergétique et environnemental colossal : si les tendances actuelles se maintiennent, les émissions liées au refroidissement atteindraient 7,2 milliards de tonnes d’équivalent CO₂ d’ici le milieu du siècle.
Le rapport souligne pourtant qu’un autre chemin est possible. En suivant une trajectoire dite de « refroidissement durable », qui combine efficacité énergétique, urbanisme intelligent et abandon progressif des gaz réfrigérants polluants, le secteur pourrait réduire ses émissions de 64 % par rapport au scénario de référence, les ramenant à 2,6 milliards de tonnes. Et avec une décarbonation complète du mix électrique, cette baisse pourrait même atteindre 97 %. « Nous devons faire du refroidissement un pilier des stratégies climatiques, au même titre que la décarbonation de l’énergie ou la gestion de l’eau », a déclaré Inger Andersen, directrice exécutive du PNUE, lors de la présentation du rapport.
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Repenser le modèle de refroidissement
Le coeur du problème réside moins dans le besoin de froid que dans la manière d’y répondre. Aujourd’hui, la climatisation fonctionne principalement à l’électricité, souvent produite à partir de combustibles fossiles, et utilise encore des hydrofluorocarbures (HFC), des gaz à effet de serre puissants. La solution passe donc par une refonte complète du modèle de refroidissement, de la conception des bâtiments jusqu’à la planification urbaine. Selon le PNUE, près des deux tiers des réductions d’émissions potentielles ne viendraient pas des équipements eux-mêmes, mais d’une meilleure conception des espaces : isolation performante, orientation optimisée, matériaux réfléchissants, toitures végétalisées ou ventilation naturelle. Ces mesures dites « passives » peuvent réduire la demande énergétique jusqu’à 40 % dans certaines régions tropicales, tout en améliorant le confort thermique.
Les systèmes hybrides et les technologies de contrôle intelligent offrent un complément essentiel à ces stratégies passives. Des solutions combinant ventilation mécanique, refroidissement évaporatif et climatisation à haut rendement peuvent diminuer la consommation d’énergie de 20 à 30 %. D’après l’Agence internationale de l’énergie (AIE), la demande énergétique des bâtiments liée à la climatisation augmente déjà de 4 % par an — une progression qui, sans action, ferait du refroidissement le principal moteur de la demande d’électricité d’ici 25 ans.
La transition vers un refroidissement durable pourrait en soi constituer une opportunité économique
Au-delà de la question technique, le refroidissement est aussi un enjeu social. Plus d’un milliard de personnes dans le monde n’ont toujours pas accès à des solutions adéquates pour se protéger de la chaleur. Sans politiques publiques ambitieuses, ce chiffre pourrait tripler d’ici 2050. Le PNUE appelle donc à considérer le refroidissement comme un service essentiel, à l’instar de l’eau potable ou de l’assainissement, et à intégrer la justice climatique dans la planification énergétique. Certaines villes pionnières, comme Ahmedabad en Inde ou Medellín en Colombie, développent déjà des programmes combinant végétalisation, matériaux réfléchissants et aides à l’achat d’équipements sobres pour les foyers modestes.
La transformation du secteur représente aussi une opportunité économique majeure. Le PNUE estime que la transition vers un refroidissement durable pourrait permettre d’économiser jusqu’à 17.000 milliards de dollars en coûts d’énergie cumulés et 26.000 milliards supplémentaires en infrastructures électriques évitées d’ici 2050. Mais la gouvernance reste un maillon faible : à ce jour, seulement 54 pays disposent d’une politique nationale complète intégrant la conception passive, des équipements performants et une transition vers des réfrigérants durables.
Dans un monde qui se réchauffe rapidement, la climatisation ne peut plus être perçue comme un simple luxe ou un geste de confort. Elle devient un impératif de santé publique, mais aussi un test de notre capacité collective à concilier adaptation et durabilité. Repenser le refroidissement, c’est apprendre à se protéger de la chaleur sans alimenter le feu du réchauffement.
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