Les géants des pesticides sont à nouveau sous le coup des projecteurs pour avoir dissimulé la toxicité de leurs produits sur le cerveau en développement, selon une récente étude.
Les travaux de deux chercheurs suédois suggèrent que les fabricants ont délibérément caché des données critiques aux autorités européennes, alimentant une polémique majeure dans l’industrie.
Pour neuf pesticides, les résultats d’études sur la neurotoxicité n’ont pas été soumis au régulateur du tout
La toxicité des pesticides nous est-elle occultée ? Axel Mie et Christina Rudén, deux éminents chercheurs suédois, ont découvert que des fabricants de pesticides ont omis de révéler des résultats de tests de toxicité cruciaux aux autorités européennes. Ces tests, effectués sur des animaux de laboratoire, ont démontré les effets nocifs de ces substances, notamment lorsqu’elles sont exposées in utero. Avec une augmentation notoire des troubles du neurodéveloppement dans de nombreux pays, ces découvertes risquent de faire l’objet d’un vif débat.
Le duo a examiné des milliers de pages de documents réglementaires, comparant les données transmises aux autorités américaines et européennes. Ils ont identifié neuf pesticides dont les résultats d’études sur la neurotoxicité pour le développement (DNT) n’ont pas été soumis à l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), alors qu’ils l’ont été à l’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA).
L’occultation de certaines informations aurait pu influencer les décisions de mise sur le marché
Les scientifiques ont mis en avant le cas de l’abamectine, un insecticide d’abord commercialisé par Syngenta. Les tests de DNT effectués sur des rongeurs ont révélé des effets significatifs sur leur progéniture, mais ces études n’ont pas été communiquées aux agences européennes. Les chercheurs suggèrent que ces informations cachées auraient pu influencer la décision d’autorisation de mise sur le marché. Un autre cas préoccupant est celui de l’éthoprophos, pour lequel une étude de DNT menée par Bayer a révélé des effets comportementaux chez tous les animaux de laboratoire testés. Ces résultats divergents n’ont pas été partagés avec les autorités européennes, menant à une autorisation erronée du produit en Europe.
Ces découvertes ont suscité une inquiétude considérable parmi les autorités européennes et ont été qualifiées de « grave problème » par un haut représentant de la Commission européenne. Les résultats montrent que les effets de ces pesticides dépassent les troubles du neurodéveloppement et mettent en lumière le rôle potentiel des pesticides dans d’autres maladies. Les chercheurs appellent à une réévaluation urgente de la réglementation des pesticides pour protéger la santé publique.
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