En rentrant d’apéro, en général, je ne guette pas les trottoirs, je regarde juste devant moi en mettant un pied devant l’autre comme quelqu’un qui marche ça je sais faire. Mais un soir, prise d’un sens de l’observation momentanément affûté, j’ai vu en bas d’un immeuble ancien, un fauteuil aussi ancien mais neuf et propre, abandonné là, seul dans une nuit de froid et de blizzard.
Le fauteuil abandonné
Je n’étais pas fatiguée, sinon je m’y serais bien assise tellement il avait l’air confortable. Mais tiens me dis-je, je m’y assiérais bien un autre jour, peut-être en rentrant chez moi, ou un dimanche pour lire un livre dans mon salon. Je ne voyais donc qu’une solution, le ramener avec moi, mon nouvel ami fauteuil, mon incompris, mon rejeté. Hic, il était lourd, et, seule avec ma force d’oisillon, je n’y serais jamais arrivé.
J’ai donc utilisé l’ option appel à un ami et voilà, quelques minutes plus tard, après une bière de remerciement et un petit coup de chiffon (à l’ami et au fauteuil, respectivement, il ne faut pas non plus faire n’importe quoi), mon fauteuil, tout doux, tout propre et tout confortable, trônant majestueusement dans mon salon.
Des trésors abandonnés
Après cette trouvaille, je gardais l’œil ouvert, c’est mieux pour ne pas tomber mais c’est surtout parce que les rues de mon quartier ruissellent de petits trésors lorsque vient le jour béni du passage des encombrants. Table basse, tabouret, commode, bureau,cadres, bougeoir, bibliothèque (bon elle est en fer mais je ne suis pas très coquette du meuble, le vintage c’est tendance) et même livres qui vont dedans, voilà comment j’ai meublé, au fil du hasard, mon petit deux pièces qui avait sacrément besoin de décoration.
Soulager les encombrants
Je suis devenue une pro du « trouvé dehors » et mes amis m’envient et font pareil. Je sais que je ne suis pas le précurseur du mouvement ; certains, paraît-il, prévoient le camion et les sandwichs, vont en tournée dans les beaux quartiers et sont meublés comme les riches.
Les riches jettent du presque neuf, nous sommes les « Robin des bois » du meuble, qui ne volent pas mais trouvons et soulageons les employés des encombrants qui, du coup, ont moins de choses à soulever. Hein qu’on est gentils ?
Voilà, ils auraient dû penser à Emmaüs pour donner leurs petites et grosses affaires encore potables mais en même temps ça nous évite d’y aller, à Emmaüs, parce qu’en plus de ne pas avoir de meubles, on roule forcément en vélo, très peu pratique pour ramener ce canapé bleu nuit un peu cher quand même, mais bizarrement assorti à mon fauteuil griffé «trouvé dehors».
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