L’hydrogène : si on en reparle, ça doit être qu’il pointe son nez

Rédigé par Stephen Boucher, le 27 Feb 2015, à 13 h 09 min
L’hydrogène : si on en reparle, ça doit être qu’il pointe son nez
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L’apôtre de l’hydrogène – Jeremy Rifkin – est passé à autre chose. France Stratégie, le think tank du gouvernement, le bat en brèche comme trop coûteux et voué à l’échec. L’hydrogène n’a plus la cote. Serait-ce parce que la vision, fumeuse, s’est justement envolée en fumée ? Ou, paradoxalement, parce qu’il commencerait à déranger ?

L’hydrogène, le graal de l’énergie

L’hydrogène, c’est un peu comme la fusion nucléaire, en beaucoup plus prometteur. Une Arlésienne enthousiasmante par ses potentialités, mais qui tarde à se diffuser massivement. Vecteur énergétique « propre » (sa combustion n’émet que de l’eau), abondant, stockable, au contenu énergétique élevé, il pourrait trouver de nombreux débouchés. Mais les applications grand public, notamment dans les véhicules particuliers, tardent à voir le jour, alors qu’elles ont été annoncées à grand renfort de communication à plusieurs reprises par les grands constructeurs.

France Stratégie vend du… « réalisme »

L’enthousiasme est donc semble-t-il retombé, du moins dans son écho médiatique grand public ces derniers mois. Mais dans le petit monde des experts de l’énergie, l’hydrogène fait de nouveau débat.

Fin août, France Stratégie, l’ancien Commissariat général à la stratégie et à la prospective, unité de réflexion rattachée au Premier Ministre, se demandait une note d’analyse assassine pour la filière S’il « y a une place pour l’hydrogène dans la transition énergétique».

Hydrogène, vecteur énergétique à potentiel

Etienne Beeker, son auteur, concluait que les démonstrations en cours sont plutôt inutiles, car reposant sur des technologies non mâtures et non compétitives. Le communiqué de presse accompagnant la note indiquait qu’il était essentiel de « prendre en compte dès le début les enjeux de sûreté et d’acceptabilité presque insurmontables que pose l’usage de ce gaz très volatil et explosif, et perçu comme tel par le grand public ».

« Note partisane » répondent les professionnels. L’AFHYPAC, l’Association Française pour l’Hydrogène et les Piles à Combustible, répondait peu après, très énervée, que cette note « partisane » ne reflétait pas la réalité des avancées du secteur.

  • De son coté Louis Schweitzer, le commissaire à l’investissement, lors de son audition par la commission Développement durable de l’Assemblée, ne fait pas de choix. Une bonne dynamique émerge “dans deux voies concurrentes : l’hydrogène et les batteries électroniques”, explique-t-il . “Je ne suis pas sûr que de mon vivant je verrai la conclusion définitive de cette querelle. Mais ( …) il serait idiot de choisir aujourd’hui entre ces deux voies« .

Quel coût réel pour l’hydrogène ?

La question des coûts des applications liées à l’hydrogène est essentielle. Dans un monde dans lequel les énergies intermittentes – solaire, éolien notamment – prennent une place de plus en plus importante dans le ‘mix énergétique’, la question du stockage devient cruciale.

Pascal Mauberger, Président de l’AFHYPAC et Président du directoire de la start-up McPhy Energy soulignait dans un récent interview que « lorsque vous avez de la production éolienne en surplus à coût marginal nul, cela vous donne une rentabilité supplémentaire pour votre électrolyseur, ce qui fait baisser le prix de l’hydrogène à moins de 7 €/ kg » dans les conditions actuelles ».

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Qu’en est-il en réalité ? Est-ce qu’effectivement les producteurs d’énergies renouvelables utilisent l’hydrogène pour stocker l’énergie, et ce selon eux à un coût acceptable ?

Selon Rémi Gruet, directeur des politiques et des opérations de la fédération européenne des énergies marines Ocean Energy Europe, la fédération des énergies renouvelables marines, « L’hydrogène est effectivement un moyen de stockage, mais nous préférons à celui-ci l’expansion du réseau électrique européen qui permettra l’intégration de plus de renouvelables dans le mix électrique européen ».

« Même son de cloche à la fédération européenne de l’industrie solaire (EPIA) : « A EPIA on n’a pas travaillé du tout sur l’hydrogène. Nos interactions avec le stockage sont beaucoup plus du côté des batteries », affirme Frauke Thies, directrice des politiques publiques d’EPIA.

Ce qu’en disent les experts du stockage des énergies

Le point de vue de Ocean Energy Europe est cohérent avec les conclusions principales du rapport sur les avancées technologiques en matière d’énergie publiées récemment par l’association européenne pour le stockage de l’énergie (EASE) : « Actuellement, il existe de nombreux projets de conversion gaz-énergie qui émergent dans plusieurs pays européens. La plupart emploient des électrolyseurs alcalins de divers fabricants comme Hydrogenics, NEL et Enertrag.

Ces composants sont disponibles dans des gammes de taille de 100 kW à plusieurs megawatts. Certaines entreprises (par exemple Siemens, Hydrogenics, GreenHydrogen et d’autres) ont défini des feuilles de route dédiées à la commercialisation de tels électrolyseurs qui devraient encore mieux pour compléter les énergies renouvelables intermittentes. »

Lire page suivante : Hydrogène : le défi du stockage de l’énergie

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Stephen Boucher est anciennement directeur de programme à la Fondation européenne pour le Climat (European Climate Foundation), où il était responsable des...

3 commentaires Donnez votre avis
  1. quand on voit la côte de popularité de feu le président de TOTAL, auprès de nos gouvernants actuels et passés, on se dit que les lobbies pétroliers et nucléaires ont de beaux jours devant eux!
    Quant au nucleaire vanté par alain 38, les déchèts générés sont coûteux et dangereux à stocker, recrudescence de cancer à la Hague et fuites en mer qu’on retrouve tout le long des côtes irlandaises et en mer du nord.
    a part ça tout va bien!

  2. Vous oubliez une action « incontournable » majeure de la Transition Energétique : le maintien en service et même le développement de l’électronucléaire :
    – Car le nucléaire n’a pas besoin de moyens de stockage, les centrales s’ajustant à la demande contrairement aux Energies dites Renouvelables (EnR)
    – Car il produit un kWh à prix imbattable, contrairement à celui produit par les EnR, auquel il faut encore ajouter celui des moyens de stockage… qui n’existent pas et promettent d’être hors de prix
    – Car il n’émet pas de CO2 nocif pour le climat, contrairement aux EnR qui ont besoin actuellement du soutien des centrales à gaz

    Qu’on fasse de la recherche sur l’hydrogène et le stockage est une bonne idée. Un jour peut-être des découvertes fondamentales permettront d’envisager un développement intéressant des EnR qui resteront toujours soumises aux caprices de la météo.
    Mais qu’on « mette la charrue avant les bœufs » en arrêtant le nucléaire, et en n’ayant alors pas d’autre solution que les EnR et l’espoir que des découvertes prochaines permettront de stocker leur énergie intermittente, est une pure folie. Nous allons droit dans une impasse, en acceptant de nous plier à l’idéologie des Verts, dont le seul objectif est électoraliste.
    Si on ne réagit pas maintenant, en réalisant que le nucléaire est la seule solution envisageable dans les conditions actuelles et en se donnant le temps et les moyens de faire de la recherche sans épée de Damoclès au-dessus de nos têtes, nos enfants nous le reprocheront plus tard.

  3. Il y a encore tellement à gagner avec le pétrole que les énergies propres son négligés volontairement. L’ hydrogène tout le monde est capable d’ en fabriquer chez soi sans pouvoir le stoker.L’ avantage de l’ hydrogène c’ est qu’ en même temps on fabrique de l’ oxygène qui peut être utilisé mais aussi relâché dans l’ atmosphère. Si on avait mis l’ argent de tous les ronds poins de France dans les énergies renouvelable nous n’ aurions plus besoin de nucléaire Je rappelle que nous avons en France beaucoup plus de rond poins que dans l’ ensemble de l’ Europe Environ 50 000 qui coutent chacun entre 200 000 euros et plus d’ un million d’ euros. nous avons en France des milliers d’ hectares de marais qui sont à l’ abandon et sur lesquels on pourrait installer des éoliennes mais aussi fabriquer de l’ électricité marée motrice. sans que cela nuise à qui que ce soit. Mais on veut dépenser plus de 20 fois le prix pour les installer en mer avec tout les problèmes que cela comporte. Mais ça ressemble plus à un détournement de fond publique qu’ à une volonté de se tourner vers les énergies propres.

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