Agriculture participative
Et ce travail pédagogique ne se résume pas à des paroles. Plusieurs fois par an, les Amapiens sont invités à venir donner un coup de main à la ferme, notamment lors de la récolte de pommes de terre. Au delà de l’économie de main d’oeuvre réalisée, ces journées favorisent la rencontre entre les membres. « Les gens viennent pour le panier mais aussi pour le lien », pense Mathieu.
Et les échanges se poursuivent pendant les distributions qui sont totalement autogérées. Les paysans déposent dans des caisses le contenu de leur récolte du jour et inscrivent sur un tableau la composition de chaque panier. Ensuite, c’est aux membres de se servir. « Ils pèsent eux-mêmes les légumes, ça leur permet de discuter et d’échanger des recettes », raconte Mathieu.
En hiver, lorsque la quantité de légumes est trop importante et pas assez variée pour permettre aux adhérents de consommer toute leur part, les paysans proposent des ateliers de mise en conserve. Des soirées tri de graines à l’issue desquelles chacun peut repartir avec ses semences sont également organisées. Grâce à ces temps d’échange, les membres ne sont plus seulement des consommateurs, ils deviennent des acteurs de leur alimentation.
Convaincus de la viabilité de leur mode de fonctionnement, les 3 paysans comprennent néanmoins qu’il ne séduise pas tout le monde. « Certains agriculteurs ne veulent pas avoir de comptes à rendre », estime Mathieu.
En outre, si les associés sont assurés de toucher le Smic, ce système ne leur permet pas de gagner plus. Un détail qui peut freiner les paysans soucieux de réaliser des « gros coups » pendant les années fastes.
Pour autant, pas question pour eux de recommencer à vendre sur les marchés comme ils le faisaient au début de leur activité :
« Quand tu fais les marchés tu grilles tes week-end et ça te prend deux fois plus de temps que pour une distribution en Amap. En plus, s’il pleut, tu ne vois personne et tu es obligé de jeter. Les maraîchers jettent en moyenne 30 à 40 % de leur production. Nous on ne jette rien. S’il n’y avait pas l’Amap, j’arrêterai », tranche Mathieu.
Mais ce n’est pas à l’ordre du jour. Au contraire, les 3 associés pensent déjà au moyen de perfectionner leur système, notamment en permettant aux adhérents de payer une partie de leur panier en temps de travail. En attendant, Gwen se satisfait d’avoir réussi à « proposer une alternative au système de consommation actuel » tout en « produisant de la bonne bouffe vendue localement ».
La mutualisation, exemple du bon sens paysan
Afin de réduire leurs coûts, les agriculteurs de La pensée sauvage ont décidé de jouer la carte du collectif. Avec d’autres paysans de la région, ils mettent en commun machines, astuces et même leurs terres. Ainsi, ils cultivent leur patates dans le champ de leurs confrères et, en échange, ils en produisent pour eux et leur mettent à disposition un tracteur et un chauffeur lors de la récolte. Les 3 associés prêtent également un de leurs terrains à un éleveur qui leur fournit du fumier en retour.
Enfin, pour la préparation de leurs plants, ils travaillent en bonne intelligence avec d’autres exploitants afin de limiter les investissements superflus. L’un d’eux a acheté la serre et le véhicule, un autre la machine à planter et le troisième se sert de ses outils en échange d’un coup de main ponctuel. Mathieu qualifie cet échange de bons procédés de « mutualisation souterraine » car aucun contrat ni échange monétaire ne vient graver dans le marbre cette manifestation du bon sens paysan.
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Sur les amap :