Transparence sur le prix des médicaments : l’Assemblée bouleverse les règles du jeu
En votant, le 7 novembre 2025, un amendement imposant la transparence sur le prix des médicaments, les députés ont ouvert une brèche dans le secret industriel.

Le médicament est au coeur du système de soins et de la Sécurité sociale : son prix influence directement les dépenses publiques et le pouvoir d’achat des patients. Pourtant, jusqu’à présent, l’information sur ces prix échappait à la transparence. Le 7 novembre 2025, l’Assemblée nationale a adopté un amendement du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS 2026) qui impose de rendre publics les prix réels, les remises et les coûts nets pratiqués par les laboratoires pharmaceutiques.
Transparence dans les prix des médicaments : un vote symbolique et stratégique pour la Sécurité sociale
Dans l’hémicycle, le débat a été vif. L’amendement n° 378, porté par le député écologiste Hendrik Davi, a été adopté par 195 voix, selon les données de l’Assemblée nationale. La majorité présidentielle a voté contre, tandis que les groupes de gauche et le Rassemblement national ont soutenu le texte, unis autour d’un mot d’ordre : rendre visible ce que coûte réellement chaque médicament pour l’État et l’Assurance maladie.
Le texte prévoit que l‘Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) publiera, pour chaque entreprise pharmaceutique, les remises versées à l’Assurance maladie, les prix nets, les tarifs nets, les coûts nets et le niveau de régularisation des acomptes par rapport aux montants définitifs. Cette mesure, intégrée à l’article 11 du PLFSS 2026, vise à lever le voile sur un secteur dont le poids budgétaire dépasse désormais 36 milliards d’euros. Le gouvernement n’a pas encore précisé s’il entend maintenir ou amender cette disposition lors du passage du texte au Sénat.
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Pourquoi les députés ont voulu la transparence
L’objectif affiché est clair : assurer une gestion plus responsable de la dépense pharmaceutique. Comme l’a souligné Hendrik Davi cité par Notre Temps, « c’est une mesure de transparence absolument indispensable » destinée à « permettre enfin un contrôle public et démocratique sur une dépense en médicaments financée par la solidarité nationale ». Le député écologiste rappelle que la France reste l’un des pays où les coûts liés aux médicaments sont les plus élevés d’Europe, alors même que les marges industrielles restent inaccessibles au public.
Les élus ont également pointé l’opacité systémique du marché. Le texte de l’amendement note que les prix affichés ne reflètent pas les montants réellement payés : les laboratoires accordent des remises confidentielles négociées par le Comité économique des produits de santé (CEPS). Ces remises représenteraient plus de 9 milliards d’euros en 2024. Autrement dit, près d’un quart du marché du médicament échappe aujourd’hui à toute visibilité comptable.
Pour l’Assurance maladie, cette réforme répond à un impératif de pilotage. Selon l’exposé des motifs de l’amendement, la publication des prix réels permettra de mieux distinguer les investissements publics et privés dans le développement des médicaments et d’évaluer plus finement la rentabilité des produits remboursés.
Des conséquences lourdes pour les laboratoires et les patients
Pour les industriels, cette mesure risque de bouleverser des pratiques commerciales solidement installées. La publicité des prix réels pourrait remettre en cause la stratégie de différenciation tarifaire selon les pays. Certains experts craignent même que la révélation des remises incite les laboratoires à rehausser leurs prix de catalogue, afin de ne pas exposer l’ampleur des réductions consenties. D’autres, au contraire, y voient une incitation à rationaliser les marges et à aligner davantage les prix sur les coûts réels de production.
Pour les patients et les professionnels de santé, la réforme promet davantage de clarté. En rendant visibles les montants réellement remboursés, elle permet d’évaluer la valeur thérapeutique des médicaments par rapport à leur coût pour la collectivité. Elle pourrait aussi renforcer la confiance dans la politique du médicament, souvent perçue comme trop favorable aux intérêts industriels.
Pour aller plus loin
En 2026, ces médicaments ne seront plus remboursés qu’à 15 % pour les patients en ALD
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