Manger de la viande – un acte identitaire ?
La culture du bon steak
La viande est dans notre alimentation depuis des milliers d’années, mais la consommation varie entre les différentes cultures selon plusieurs facteurs géographiques, économiques, sociaux… On l’a vu précédemment, les ouvriers sont adeptes du steak-frites, mais quel est l’attachement à la viande en France ?
Selon le sociologue Claude Fischler3, les habitants du pays de la baguette vivraient un vrai paradoxe. Entre les messages sanitaires valorisant les aliments végétaux et les crises sanitaires, la population aurait tout de même renforcé son attachement à la viande, surtout la rouge.
Une étude du COMARAL, du CIV et du SOFRES4, montre que 89 % des répondants considèrent que « la viande de boeuf fait partie des aliments qu’on a plaisir à manger » et 72 % que « rien ne vaut un bon bifteck« . Et si l’on observe bien la construction des plats français servis en restaurant, la viande et le poissons occupent une place centrale autour de laquelle s’organisent les autres ingrédients.
La viande possède une place primordiale en France, mais elle est aussi un symbole fort.
La viande, les protéines – un symbole de force ?
Qui n’a jamais entendu la phrase : « je suis en manque de protéines » ?
La viande ou les protéines sont pour beaucoup un élément essentiel d’une assiette. Certains ne conçoivent pas un repas sans produits carnés. Pourquoi cette dépendance ?
Dans son article, La symbolique de la viande, l’ethnologue Colette Méchin écrit :
« Dans l’imaginaire de nombreuses sociétés, manger de la viande, c’est s’approprier une énergie. Présente ou absente d’un régime alimentaire, et quel que soit celui-ci, la viande n’est jamais sans signification. Dans la hiérarchie que s’est forgée peu à peu la société occidentale, la couleur initiale de la chair détermine sa force. Le rouge connote la présence du sang, qu’il convient de maîtriser, voire d’éliminer. Le blanc est traditionnellement du côté de l’ enfance, du bénin, du suave.«
La viande a souvent été un symbole de force, pour certains manger de la viande serait l’équivalent de l’assimilation de cette force. Le rapport à la viande reste quand même mitigé, comme l’écrit le sociologue Claude Fischler, « la viande adorée, viande abhorrée » , titre d’un chapitre de son ouvrage L’homnivore.
> Suite : Le goût de la bonne viande
(3 et 4) Colloque Ocha « L’homme, le mangeur, l’animal. Qui nourrit l’autre ? », Paris, 12 et 13 mai 2006.