Rapport IPBES – Des preuves accablantes et inquiétantes du déclin de la biodiversité

À l’issue d’une semaine de session plénière, les délégués des États membres de la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques ont adopté samedi à Paris un ‘résumé pour les décideurs’ tiré du nouveau rapport IPBES 2019. Décryptage.

Rédigé par Séverine Bascot, le 6 May 2019, à 17 h 00 min
Rapport IPBES – Des preuves accablantes et inquiétantes du déclin de la biodiversité
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Les conclusions du rapport IPBES

Pour Sir Robert Watson, Président de l’IPBES, « les preuves accablantes contenues dans l’évaluation globale et obtenues à partir d’un large éventail de domaines de connaissance, présentent un panorama inquiétant ».

En effet, en dépit des progrès réalisés pour conserver la nature et mettre en oeuvre des politiques en faveur de celle-ci, le rapport met en évidence que « les trajectoires actuelles ne permettront pas d’atteindre les objectifs mondiaux visant à conserver et exploiter durablement la nature ».

rapport IPBES

Pêcheuses malgaches © sunsinger / Shutterstock.com

Ainsi les objectifs d’Aichi en matière de biodiversité pour 2020 ne seront pas atteints puisque seuls 4 sur 20 sont remplis, ce qui est un frein considérable aux Objectifs de Développement Durable pour 2030  : « la perte de biodiversité est donc non seulement un problème environnemental, mais aussi un enjeu lié au développement, à l’économie, la sécurité, la société et l’éthique ».

« Les écosystèmes, les espèces, les populations sauvages, les variétés locales de plantes et les races locales d’animaux domestiques diminuent, se réduisent ou disparaissent. Le tissu vivant de la Terre, essentiel et interconnecté, se réduit et s’effiloche de plus en plus », a déclaré le professeur Settele (Allemagne), qui a co-présidé l’évaluation avec les professeurs Sandra Díaz (Argentine) et Eduardo S. Brondízio (Brésil et États-Unis). « Cette perte est la conséquence directe de l’activité humaine et constitue une menace directe pour le bien-être de l’humanité dans toutes les régions du monde » !

De son côté, Sandra Díaz estime que « la santé des écosystèmes dont nous dépendons, ainsi que toutes les autres espèces, se dégrade plus vite que jamais. Nous sommes en train d’éroder les fondements mêmes de nos économies, nos moyens de subsistance, la sécurité alimentaire, la santé et la qualité de vie dans le monde entier ».

Selon les auteurs du rapport de l’IPBES, les « tendances négatives de la nature continueront jusqu’en 2050 et au-delà, dans tous les scénarios politiques explorés dans le rapport, sauf dans ceux qui proposent un changement transformateur – cela en raison de l’impact qu’aura l’augmentation du changement d’usage des terres, l’exploitation de certains organismes et le changement climatique, toutefois avec des différences significatives selon les régions ».

Quelques chiffres encourageants

  • Les investissements pour la conservation réalisés de 1996 à 2008 ont permis de réduire de 29 % le risque d’extinction pour les mammifères et les oiseaux dans 109 pays.
  • Plus de 107 espèces (oiseaux, mammifères et reptiles) très menacées ont bénéficié de l’éradication des espèces envahissantes dans les îles.
  • 29 % des exploitations agricoles mettent en oeuvre des pratiques de production agricole durable dans le monde entier (représentant 9 % de toutes les terres agricoles).
  • En conformité à l’objectif 11 d’Aichi, 10 % des zones côtières ou marines et 17 % des zones terrestres sont conservées.
  • Même s’il reste encore beaucoup de chemin à faire, 15 % environ des espaces terrestres et 7 % environ des espaces maritimes sont déjà protégés.

De l’espoir si on amorce rapidement un « changement transformateur »

Mais les experts ne se sont pas arrêtés à seulement dresser ce constat alarmant : le rapport s’est également attelé à présenter des actions en faveur d’un développement plus durable. « Des ‘changements transformateurs’ sont nécessaires pour restaurer et protéger la nature[…] Les intérêts particuliers doivent être dépassés pour le bien de tous ».

Le rapport présente également des exemples d’actions en faveur du développement durable et les trajectoires pour les mettre en oeuvre dans des secteurs tels que l’agriculture, la foresterie, les écosystèmes marins, les écosystèmes d’eau douce, les zones urbaines, l’énergie, les finances et bien d’autres.

rapport IPBES

Prairie fleurie © Matthew J Thomas

Parmi les actions préconisées :

  • L’adoption d’une gestion intégrée et des approches intersectorielles qui prennent en compte les compromis entre la production alimentaire et celle de l’énergie, les infrastructures, la gestion de l’eau douce et des zones côtières, ainsi que la conservation de la biodiversité.
  • L’évolution des systèmes financiers et économiques mondiaux, loin du paradigme actuel centré sur la croissance économique, pour des politiques futures plus durables.
  • Les intérêts particuliers doivent être dépassés pour l’intérêt général.

Si le rapport estime qu’il n’est pas trop encore tard pour agir, il insiste sur le fait qu’il faut s’y mettre maintenant et à tous les niveaux, du local au mondial… C’est un « changement transformateur » qu’il faut entreprendre : « un changement fondamental à l’échelle d’un système, qui prend en considération les facteurs technologiques, économiques et sociaux, y compris en termes de paradigmes, objectifs et valeurs ».

Cette volonté de changement va très certainement susciter une opposition de la part de ceux qui ont des intérêts attachés au statu quo, mais cette opposition doit et peut être surmontée pour le bien de tous.

WWF UK lance un appel international déjà signé par plus de 600 personnalités dont le professeur Gilles Boeuf, Hélène Soubelet, Luc Abadie et bien d’autres, le PDG de Danone Emmanuel Faber, Juliette Binoche, Isabelle Adjani, Nathalie Baye, Marion Cotillard, Pierre Niney et Cyril Dion, les navigateurs Isabelle Autissier (Présidente de WWF France), François Gabart, Alain Gautier et Armel le Cleac’h, Naguy, Yann Barthes, et Fanny Agostini de la télé, l’excellent Patrick Viveret (philosophe), ou encore Fred Vargas qui vient de publier « L’Humanité en péril ».

Pour en savoir plus, rendez-vous sur www.wwf.org.uk/call4nature

Illustration bannière : Rapport de l’IPBES sur la biodiversité : un tremplin scientifique pour agir – © Jess Rodrigues
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