Un mauvais papa donc, ou plutôt un meilleur papa ? Propos de bobo bien pensant, ou vraie philosophie de vie ? Je vous laisse juger (et le temps dira)…
« Minimalist Moms » : le choix de la simplicité
Des budgets pour nouveau-né stratosphériques, incités par un sentiment de culpabilité insistant induit par le marketing de l’industrie de la puériculture. Des enfants qui se ruent sur des montagnes de paquets de Noël et s’en désintéressent après quelques heures. Puis, un jour, des adolescentes qui ne jurent que par des marques connues… et coûteuses.
Est-ce ringard de vouloir autre chose pour ses enfants ? De plus en plus de parents ont d’autres aspirations. En Grande-Bretagne, on les appelle les « Minimalist Moms », les « mères minimalistes ». Je me revendique père minimaliste (j’aurais eu du mal, vous me direz, à me revendiquer mère minimaliste…).
Contenant ou contenu… les enfants ne font pas toujours le choix auquel on s’attend !
La crise a parfois du bon
L’étiquette « maman minimaliste » est inventée par une mère de famille anglaise, Hattie Garlick, qui, en 2012, perd son emploi. Peu avant Noël, justement. Pour se rendre maître de son sort et faire face, elle décide de ne plus rien dépenser pour son enfant durant toute l’année 2013, sauf, bien sûr, les frais de nourriture et de soins médicaux.
Son exemple convainc : d’autres femmes le suivent et des livres, sites et blogs se multiplient, vantant la démarche. Chacun(e) trouve sa façon personnelle de limiter les dépenses : certaines décident de ne plus aller au fast-food, d’autres d’acheter moins de jouets, de refuser les vêtements de marques, voire carrément de supprimer les cadeaux d’anniversaire.
Faites votre choix
De mon côté, j’en ai fait essentiellement quatre :
Que des vêtements achetés de seconde main : c’est fou comme les enfants grandissent vite, vous le savez, donc les vêtements d’occasion sont peu usés ! Alors nous faisons des virées dans les friperies, et revenons équipés pour 6 mois de beaux vêtements (je vous promets !), pour 10 à 20 euros par enfant (je vous jure…).
Pas de voiture : « Le voilà, l’indice indéniable du bobo subversif ! ». Peut-être, mais à conditions de vie exactement égales, et niveau de « boboïtude » en apparence équivalent, les parents de l’école de mes filles ont tous une voiture. On ne voyage pourtant pas moins, mais juste en train, avec un budget global sur l’année bien moindre.
Des jeux faits par nous-mêmes. Est-ce que mes filles s’ennuient ? Je peux vous assurer que non, et pourtant leurs chambres sont vides de jouets.
Éliminer et donner : on fait le tri régulièrement ensemble, et on donne.
La simplicité a du bon
Être papa, ou maman minimaliste, c’est la réinvention, au niveau personnel, du mouvement du « jugaad » – terme hindi qui qualifie une solution ingénieuse et originale, fruit d’une improvisation astucieuse. Au risque de paraître idyllique, les bénéfices sont multiples, pour vous et vos enfants.
Lire page suivante : Peut-on adapter le jugaad à l’Occident ?
C’est connu, la pénurie, ou sobriété – toutes proportions gardées, je ne recommande pas la privation – libère la créativité. C’est en n’étant pas surchargé de biens matériels et en n’ayant pas pléthore de solutions sous le nez, qu’on va se poser la question quoi faire ensemble, comment, en parler, et déployer un peu d’imagination.
La simplicité libère l’espace, le temps, l’esprit : c’est moins de choses à ranger, moins de stress d’objets cassés, plus de temps libre, à partager ensemble.
Faire en sorte de ne pas tout avoir, tout de suite, aide à comprendre la valeur de l’argent. Un achat, s’il (re)devient exceptionnel, reprend sa juste valeur.
Apprendre à ne manquer de rien, en ayant peu : encore une fois, ni les Minimalist Moms, ni le papa minimaliste que vous lisez, ne recommandons le régime pain sec et eau, ou une éducation janséniste par la privation. Mais franchement, là aussi au risque de partager du bon sens éculé, ce dont un enfant a besoin avant tout, c’est d’être bien soigné par l’attention que vous lui accordez pour les différentes dimensions de sa vie affective, sociale, d’apprentissage. Pas de plus de « trucs ».
Réponses à vos craintes
« Alors je ne devrais plus rien offrir à mon enfant ? »
Non, minimiser ne veut pas dire forcément réduire à zéro, mais se poser la question pourquoi on achète quelque chose : est-ce que cela sera bénéfique à mon enfant ou est-ce superflu ?
« J’aime être généreux avec mon enfant, n’est-ce pas apprendre le détachement par rapport au matériel de savoir aussi ‘se lâcher’ de temps en temps ? »
Je répondrais à ceci qu’il y a une forte pression sociale à l’achat – montrer qu’on l’a bien équipé pour l’école, qu’il est habillé comme il faut, qu’il a les activités qui conviennent. Pas forcément pour son bien, mais pour ne pas paraître défaillant en tant que parent. Là aussi, apprenons à nous poser la question de ce qui est essentiel.
© CC, Aplyonse at de.wikipedia
« Apprendre la privation n’est-il pas inutile, voire contre-productif, amenant mon enfant plus tard à vouloir se rassurer en s’entourant de confort matériel ? »
Pas besoin d’être rigide…
« J’ai déjà tendance à détoner par mes priorités, ne vais-je pas paraître radical ? »
Le but de se donner un ‘label’ minimaliste serait, plutôt que de paraître radical, d’inviter à réfléchir. Comme cet article !
« Oubliez, c’est peut-être possible avec des enfants de 8-9 ans, mais impossible avec mes adolescents ! »
Sans surprise, ceux-ci ne sont pas très réceptifs, à un âge où la reconnaissance des pairs est essentielle. Effectivement, en en parlant avec Jennifer, une fille d’amis, de 14 ans, celle-ci me disait : « Pourquoi vous ne voulez pas de voiture, c’est pour ne pas être comme les autres ? » et elle s’alarmait que mes filles « se sentent isolées à l’école ».
Enfermer des adolescents dans un cliché de consumériste moutonnier n’est pourtant pas la seule réponse possible. Sachez être flexible, tout en partageant vos valeurs, il en restera quelque chose… Le principal est de « rester soi-même » comme l’écrit Courtney Caver sur son blog : « Be more with Less » (pour « Vivre mieux avec moins ») : « Il ne faut pas se forcer à adhérer à un mouvement pour essayer d’être une bonne mère » (ou un bon père, bien sûr).
Et vous, qu’en pensez-vous ? Êtes-vous un papa ou maman « minimaliste », peut-être sans le savoir ?