consoGlobe – Vous mettez en avant votre contribution à la résolution du défi de la faim dans le monde et de la croissance démographique. Quelle contribution l’agro-écologie, l’agriculture bio et d’autres formes d’agriculture non dépendantes des technologies que vous commercialisez peuvent-elles avoir selon vous pour répondre à ce double défi ?
BM – Nous ne croyons pas à Monsanto que la solution est celle proposée par Vivian Westwood : « Si les gens ne peuvent pas acheter du bio, ils devraient manger moins ». C’est une remarque à la Marie-Antoinette ! Nous pensons qu’il y a environ 800 millions de personnes dans le monde aujourd’hui qui souffrent de faim ou malnutrition. Beaucoup de ces personnes sont elles-mêmes des fermiers bios, vivant d’une agriculture de subsistance, et qui ne peuvent se permettre d’acheter de bonnes graines, ni des herbicides, ni des engrais pour les sortir de la pauvreté. Donc on pense que le bio est une option qui est disponible pour les marchés qui peuvent se le permettre. On pense même que l’agriculture bio peut apprendre aux agriculteurs conventionnels l’une ou l’autre chose. Mais ce n’est pas la solution pour nourrir la planète. Peut-être une solution, mais pas la solution.
L’agroécologie, solution pour une planète de plus en plus peuplée ?
Mais nous ne diabolisons pas l’agriculture bio. Nous croyons dans l’importance d’avoir le choix. Si les gens croient fermement [en la nocivité des] pesticides, alors l’alimentation bio est une manière de les éviter. Mais comme je vous disais, 95 % des gens ne semblent pas s’en préoccuper assez pour payer le prix supérieur qui vient avec l’alimentation bio.
Nous ne diabolisons pas l’agriculture bio.
consoGlobe – Le pesticide glyphosate, que l’on retrouve dans le Roundup, a été classé cancérigène probable par le Centre international de recherche sur le cancer (Circ), agence de l’OMS, tandis que les autorités sanitaires françaises ont reconnu les cancers dus aux pesticides comme maladie professionnelle. Quelle sera votre politique pour ce produit ?
BM – C’est trop tôt pour dire si ces décisions vont avoir un impact sur notre politique commerciale ou nos résultats. On a déjà vu certains vendeurs enlever le Roundup de leurs rayons et de leurs catalogues, mais en même temps d’autres commerçants les ajoutent à leurs rayons et leurs catalogues parce qu’ils savent que ce sont des produits qui se vendent bien.
Pour les agriculteurs, on ne pense pas que ces annonces auront un quelconque impact sur les ventes, parce qu’ils utilisent ces produits de manière sûre depuis 40 ans, ils savent qu’il y a un passé d’utilisation sans risque, et que les résidus que l’on retrouve sur la nourriture, si tant est qu’il y en ait, sont bien en deçà des limites légales.
consoGlobe – Et la nouvelle loi pour réduire la quantité de pesticides utilisés en France ?
BM – Là aussi c’est difficile à dire. Les produits que nous vendons en France ont tous été approuvés par les autorités publiques, avec des instructions claires quant aux dosages, comment nettoyer les containers, etc. Donc les agriculteurs sont des utilisateurs professionnels, qui savent ce qu’ils font. Donc on ne croit pas que les agriculteurs vont changer la manière dont ils utilisent nos pesticides.
Plan écophyto : réduire les pesticides, mission impossible en France ?
consoGlobe – Quelle est la nature des recherches sur les abeilles actuellement menées par Monsanto par le biais de son rachat de Beeologics en 2011 ?
BM – Nous avons acheté deux sociétés israéliennes impliquées dans la recherche sur la santé des abeilles, et nous avons toute une équipe de personnes dans notre siège de St Louis [Etats-Unis], parce que Monsanto, comme toute organisation agricole, est très dépendante des services apportés par les abeilles.
Nous sommes inquiets comme tout le monde par le syndrome d’effondrement des colonies d’abeilles. Beeologics cherche des traitements qui pourraient aider les abeilles à résister à différents pathogènes, comme la mite qui attaque les larves des abeilles. Nous n’avons pas encore de produits à commercialiser pour les abeilles.
consoGlobe – Que pensez-vous du traité transatlantique en cours de négociation ?
BM – Notre position est simple : les règles du commerce international doivent être développées sur des bases scientifiques, des critères objectifs et politiques. Des barrières au commerce qui ne sont pas d’ordre tarifaire sont une mauvaise idée. C’est la vision que partage plus ou moins n’importe quelle entreprise qui travaille au niveau mondial, ce n’est pas spécifique à Monsanto.
Ayant dit cela, je ferai remarquer que l’interdiction des OGMs à motivation politique prononcée par l’Europe a déjà été condamnée par l’OMC une fois, et la Cour Suprême a condamné le gouvernement essentiellement pour des interdictions malicieuses envers la culture des plantations génétiquement modifiées. Donc nous pensons que ces règles d’inspiration politiques n’aident ni nous, Monsanto, ni le commerce mondial.
consoGlobe – Pour finir, un peu de nombrilisme français : désespérez-vous de l’attitude et du marché français, face à l’hostilité que vous y rencontrez ?
BM – Au contraire, la France est le pays d’Europe où nous investissons le plus de ressources pour raconter notre histoire à ceux qui souhaitent l’entendre. Par exemple nous avons créé un site internet, ce qui a été un investissement significatif. Nous allons ajouter de nouvelles fonctionnalités au site. Nous faisons un effort significatif pour comprendre les préoccupations de la société et leur répondre par le dialogue et l’information sur ce que nous faisons.
Les perceptions de ce que fait Monsanto sont souvent basées sur de la désinformation et un manque de compréhension de l’agriculture. Par exemple on confond souvent modification génétique et sélection des semences, qui est pratiquée depuis des centaines d’années. Pas tant de gens que ça s’intéressent à Monsanto. Dans les sondages que nous avons effectués, plus de la moitié des gens n’avaient jamais entendu parler de Monsanto. Et parmi ceux qui en avaient entendu parler, tous pensaient que la seule chose que nous faisons, ce sont des OGMs, sans mesurer que l’on fait des semences non génétiquement modifiées.
Brandon Mitchener, Directeur Communication EMEA Monsanto
Brandon Mitchener est directeur de la communication de Monsanto pour l’Europe et le Moyen-Orient. Ancien journaliste et consultant auprès de grandes sociétés, d’associations professionnelles et parfois de gouvernements, il a rejoint Monsanto en Décembre 2012 après avoir travaillé pour First Solar, où il était également directeur de la communication pour l’Europe, le Moyen-Orient et l’Afrique et où il gérait les relations publiques pour l’Inde, la Malaisie et la Thaïlande. Américain d’origine, Brandon Mitchener a été auparavant correspondant à l’étranger en Europe pendant 15 ans, couvrant un large éventail de sujets liés aux affaires européennes, y compris comme correspondant en chef du Wall Street Journal où il a couvert les grandes sujets liés à la sécurité et à la réglementation alimentaire telles que la maladie de la vache folle, la dioxine dans l’alimentation du poulet belge, les biotechnologies et les batailles d’étiquetage des aliments bio. Avant de s’installer à Bruxelles, Brandon a été correspondant en Allemagne de l’International Herald Tribune et de Dow Jones Newswires.
Références :
- Procès de l’agriculteur charentais Paul François, qui accuse Monsanto d’être responsable de son intoxication aux pesticides. (Cliquez sur cette source pour remonter)
- Communiqué de l’Agence européenne de sécurité des aliments « Plus de 97 % des aliments contiennent des résidus de pesticides dans les limites légales » 12 mars 2015 (Cliquez sur cette source pour remonter)
- http://www.gmoseralini.org/fr/ (Cliquez sur cette source pour remonter)
- Procès de l'agriculteur charentais Paul François, qui accuse Monsanto d'être responsable de son intoxication aux pesticides. (Cliquez sur cette source pour remonter)
- Communiqué de l'Agence européenne de sécurité des aliments « Plus de 97 % des aliments contiennent des résidus de pesticides dans les limites légales » 12 mars 2015 (Cliquez sur cette source pour remonter)
- Procès de l’agriculteur charentais Paul François, qui accuse Monsanto d’être responsable de son intoxication aux pesticides. (Cliquez sur cette source pour remonter)
- Communiqué de l’Agence européenne de sécurité des aliments « Plus de 97 % des aliments contiennent des résidus de pesticides dans les limites légales » 12 mars 2015 (Cliquez sur cette source pour remonter)