Ikea, entre affichage éthique et modèle « moins disant »
La contradiction intrinsèque entre une volonté éthique et un modèle économique par nature «moins disant» explique le clivage de plus en plus visible dans l’identité et l’image d’Ikea.
La logique et le modèle d’Ikea poussent la multinationale à toujours tirer vers le bas les prix de ses produits. Et à suivre le grand mouvement de la délocalisation et du « cost cutting » permanent pour mieux démocratiser son mobilier, en vendre toujours plus.
« Ikea : un modèle à démonter »
Ikéa, modèle à démonter
Déjà, dans une campagne de pub francophone de 2006, l’ONG Oxfam-Magasins du monde soulevait la question : comment Ikea peut-elle concilier sa volonté d’être un champion de la responsabilité sociales (RSE) et le fait d’être un pionnier emblématique du low cost ?
Car, de fait, Ikea a été pionnier de la sous-traitance et de la délocalisation low cost dès 1961 en s’implantant en Pologne communiste pour fabriquer moins cher. Aujourd’hui ce sont plus de 1400 sous-traitants qui fournissent Ikea depuis près de 70 pays.
Toujours plus loin, toujours moins cher.
Ce faisant, ses acheteurs, ses contrôleurs de gestion orientent en permanence leurs choix vers les matières premières, les sous-traitants, les vis et les boulons, les transports, … les moins chers. D’ailleurs, tout comme Ikea a la réputation d’une entreprise qui exploite à fond les possibilités de défiscalisation, la négociation acharnée fait également partie de son identité.
Ainsi, entre son siège d’Amhülst au management confortable et consensuel, aux salariés aux fonctions sophistiquées, et la petite-main payée 100 fois moins chère à l’autre bout de la planète, le contras
te est frappant.
En ce sens, le modèle du succès d’Ikea est un peu l’inverse du modèle du commerce équitable : celui-ci accepte de ne pas avoir les produits les moins chers en faisant le choix volontaire de mieux rémunérer producteurs et acteurs d’une filière économique (bois*, chocolats, cafés, meubles, …).
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* Ikea consomme l’équivalent de 200 millions d’arbres par an et ce besoin double environ tous les 2 ans avec la croissance de la société. Les efforts pour l’achat de bois certifié FSC ne sont qu’une des facettes de politique d’Ikea en matière de bois. Johan Stenebo révèle la politique d’achat de la forêt sibérienne et les mauvaises affaires réalisées par Ikea en Russie.
Les révélations portent également sur l’achat de bois vendu au noir en Chine.
La suite p3 : Ikea, c’est l’inverse de la préférence à l’économie locale
Faut-il se méfier d’Ikea ?