Le gaz de schiste passera-t-il un jour au vert ? Si l’exploitation de plus de carburants fossiles va à l’encontre des objectifs climat, les investisseurs recherchent néanmoins les techniques d’extraction qui permettront de surmonter les résistances locales à son exploitation, notamment en France. Une nouvelle technique promettrait ainsi de consommer moins d’énergie et d’eau, et de réduire les fissures profondes. Va-t-elle relancer le débat sur son exploitation en France ?
Gaz de schiste : la nouvelle frontière vient du far west
Les inquiétudes quant aux impacts environnementaux de l’extraction du gaz de schiste sont très vives aux États-Unis également. Une équipe de chercheurs menés par le professeur Carlos Fernandez du Pacific Northwest National Laboratory, aux États-Unis, rattachés au Ministère de l’Energie, vient ainsi d’annoncer avoir réussi à réduire considérablement la quantité d’eau utilisée d’ordinaire pour la fracturation hydraulique(5).
La fracturation hydraulique
La technique la plus communément utilisée aujourd’hui, mais interdite en France, pour libérer le gaz de schiste des roches qui l’enferment est la fracturation hydraulique. Elle consiste à injecter à très forte pression de l’eau, du sable et des produits chimiques. En moyenne, 15 millions de litres sont nécessaires pour atteindre un seul réservoir de gaz de schiste. L’eau à haute pression permet la fracturation progressive des schistes. Le sable s’infiltre alors dans les fissures pour empêcher qu’elles ne se referment. Enfin, les produits chimiques facilitent la récupération des huiles et des gaz.
La technique du Pr Fernandez s’appuie sur une solution réactive au CO2, capable de multiplier son volume par deux fois et demi à son contact. Et de créer une forte pression provoquant la fissuration de la roche libérant le gaz convoité.
Les avantages économiques et environnementaux allégués
Son utilisation pourrait réduire les besoins en énergie nécessaires à la création de réservoirs de gaz de schiste rentables sans provoquer de fissures profondes dans les sols. Elle permettrait de réduire la quantité d’eau nécessaire. Elle serait par ailleurs moins nocive pour les sols et l’environnement aux alentours des puits, car le processus chimique conduisant à la formation de l’hydrogel peut être inversé, permettant de le récupérer en partie, et donc de le réutiliser.
L’équipe de Carlos Fernandez affirme même que son produit agit également comme biocide, régulant ainsi la vie des organismes présents, et comme anticorrosif. Enfin, il serait non-toxique.
Moindre coût : un atout crucial
La fracturation hydraulique est coûteuse : il faut prendre en compte l’acquisition des permis, mener l’étude des sols, faire venir et traiter l’eau nécessaire – contaminée -, sans compter la fiscalité qui s’appliquera, les investissements en infrastructures pour transporter le gaz ainsi récupéré.
En réduisant la quantité d’eau nécessaire, et en ayant recours au dioxyde de carbone, un composé présent en quantité abondante dans la nature et peu onéreux, cette technique pourrait permettre de diminuer significativement le prix d’exploitation. Sachant que le coût est un facteur décisif de compétitive en l’état actuel des techniques d’extraction du gaz de schiste, cette technique pourrait être un facteur d’encouragement pour les investisseurs, et les gouvernements.
La technique n’est pas encore prête pour le marché
Aux États-Unis, ces annonces interviennent alors que l’administration fédérale a renforcé les exigences de transparence pour les puits de forage. Les résultats, aussi « prometteurs » soient-ils, doivent encore être testés sur le terrain. Leur application en Europe n’est donc pas imminente.
On notera par ailleurs que d’autres annonces remarquées par le passé d’alternatives à la fracturation hydraulique pour l’exploitation du gaz de schiste ne se sont pas matérialisées commercialement. La société canadienne GasFrac avait ainsi présenté en 2009 une technique reposant sur l’heptafluoropropane, n’utilisant, prétendument, ni eau, ni produits toxiques et pouvant être réutilisé. Cette technique avait été relevée dans un rapport de l’Assemblée Nationale sur les alternatives à la fracturation hydraulique(2).
Néanmoins, l’exploitation ne s’est pas faite, notamment parce que le fluoropropane est un gaz à effet de serre puissant. A surveiller donc, dans un contexte où le besoin en carburants fossiles est probablement durable, mais sans perspective de mise sur le marche imminente.
Références :
- Carlos Fernandez et al, Proceedings World Geothermal Congress, 19 Avril 2015. (Cliquez sur cette source pour remonter)
- Assemblée nationale, rapport n°1581 du 27 nov. 2013 de l’Assemblée Nationale sur les alternatives à la fracturation hydraulique, http://www.assemblee-nationale.fr/14/pdf/rap-off/i1581.pdf. (Cliquez sur cette source pour remonter)
- Assemblée nationale, rapport n°1581 du 27 nov. 2013 de l'Assemblée Nationale sur les alternatives à la fracturation hydraulique, http://www.assemblee-nationale.fr/14/pdf/rap-off/i1581.pdf. (Cliquez sur cette source pour remonter)
- Assemblée nationale, rapport n°1581 du 27 nov. 2013 de l’Assemblée Nationale sur les alternatives à la fracturation hydraulique, http://www.assemblee-nationale.fr/14/pdf/rap-off/i1581.pdf. (Cliquez sur cette source pour remonter)
- Carlos Fernandez et al, Proceedings World Geothermal Congress, 19 Avril 2015. (Cliquez sur cette source pour remonter)