La filière bio est-elle fiable et bien contrôlée ?
Les gendarmes du Bio à la peine
Il y a en France environ 22 500 producteurs de bio et 7 400 organismes transformateurs qui utilisent le fameux label AB. Pour surveiller tout ce petit monde, 9 organismes certificateurs valident ou invalident les dossiers de candidature des candidats au label. (1) Et en cas de non respect du cahier des charges, il ont le pouvoir de retirer l’agrément, qui n’est attribué que pour un an seulement. Et en soutien, il y a l’administration : la Dgccrf qui est censé traquer les fraudes. Rassurant non ?
Oui mais voilà, le dispositif a des faiblesses : chaque année, seuls une centaine de producteurs perd le label (ce qui n’est ni bien ni mal en soi) mais surtout la Dgccrf ne publie aucun chiffre sur ses contrôles ou sur leur efficacité. Et elle ne nous a pas protégé des fraudes européennes ni des dérives du marché. Elle ne peut en effet rien faire sur l’évolution de la filière bio ; ce n’est pas son rôle.
Le bio, un marché éclaté impossible à surveiller en détail
Tout d’abord, il faut être conscient de la très grande diversité de situation que l’on connaît entre les différents pays européens. En 1991, l’UE a réussi à mettre d’accord ses membres sur une réglementation commune en matière de production biologique végétale mais chaque pays en fait sa propre lecture. Chaque pays européen a ses propres interprétations nationales des règlements communautaires et aucun marché du bio ne ressemble à l’autre. C’est un peu le maquis.
En Allemagne, ce sont les Länders qui décident. En France, comme toujours, c’est l’État. En Espagne les Régions édictent les règles du jeu. Sur chaque marché, on voit fleurir dans la plus grande anarchie, des logos, des appellations et des labels, parfois proche des consommateurs (comme en Allemagne) ou des producteurs (comme Ecocert en France). Au Danemark, le cuivre est interdit dans les cultures bio mais on utilise de la bouillie bordelaise en France. L’irrigation azotée, rejetée par les Français, est acceptée par les Italiens et Espagnols. Conséquence de tout ça, on a tendance à unifier l’Europe sur les points faibles et non les points exigeants des règlements européens.
Et puis dans les faits, le respect strict des cahiers des charges est quasi impossible à respecter : il faudrait par exemple que les pelles qui sont utilisées pour décharger le blé des remorques des transporteurs TIR (transport international routier) soient bio, que la grue qui décharge les cargos de blé le soit aussi, que le cargo lui-même le soit… Impossible à faire et encore plus impossible à contrôler à l’autre bout de l’Union ou du monde.
C’est pourquoi, de nouveaux labels sont nés comme Bio Cohérence, plus exigeants. Ce label implique la non-mixité des fermes (pas de conventionnel et de bio dans le même établissement), une alimentation 100 % bio des animaux, l’exclusion des OGM à 100 %, et une plus forte notion de proximité.
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(1) Les 9 certificateurs sont : Agrocert, Bureau Alpes Contrôles, Bureau Veritas/Qualité France, Certipaq, Certis, Certisud, Ecocert, Qualisud, et SGS. Leur rôle ne se limite pas à certifier les produits biologiques, ils peuvent intervenir sur d’autres labels. Le label AB est délivré par l’Agence bio, qui est une agence gouvernementale.