Les deux grandes puissances maritimes européennes, l’Angleterre et la France, se lancent dans la construction des éoliennes off-shore. Tandis que l’actualité montre le dynamisme de la filière, des oppositions commencent à se faire jour. D’un côté les industriels qui tentent d’optimiser la capacité des technologies, de l’autre les associations professionnelles et environnementales qui s’inquiètent sur les conditions d’implantation…
EMR : quand l’éolien off-shore se développe…
Si les objectifs fixés par les deux pays ne sont pas les mêmes, l’échéance de 2020 sera un premier révélateur de l’avancement des projets. Tandis que le Grenelle prévoit l’installation de 6000 MW en mer d’ici la fin de la décennie, le gouvernement britannique s’est fixé l’objectif d’atteindre une puissance de 8 à 15 gigawatts au large de ses côtes. En termes d’espace disponible, le département de géographie de l’université de Reading recense 5000 km en incluant l’Angleterre, l’Irlande du Nord, et le Pays de Galles ; alors que l’Institut Français de l’Environnement mesure approximativement 9000 km pour le littoral.
Si les objectifs sont ambitieux, l’avancée des chantiers et les calendriers retenus prouvent qu’ils auront beaucoup de difficultés d’être tenus dans les deux cas. En France, un premier appel d’offres a été lancé en 2011, les quatre sites retenus seront mis en service entre 2017 et 2019 par le consortium Alstom/EDF/WPD : Courseulles-sur-Mer, Fécamp, Saint-Brieuc et Saint-Nazaire. En 2013, deux autres chantiers ont fait l’objet d’une mise en concurrence, le Tréport et Noirmoutier, dont l’attribution n’est pas encore connue et qui devraient rentrer en service entre 2021 et 2023. Les deux tranches sont évaluées à respectivement 2000 et 1000 mégawatts, soit 3 GW au total, loin des objectifs du Grenelle.
Le Royaume-Uni avance plus rapidement
En Angleterre, les avancées sont plus rapides, aujourd’hui, « 22 parcs éoliens opérationnels au large avec 3653 MW de capacité et 1,4GW en construction d’après le Département du Royaume-Uni de l’Energie et du Changement Climatique ». Les dernières éoliennes en date ont également été confiées à l’électricien français, soit 27 éoliennes d’une puissance de 62MW qui devront alimenter 40 000 foyers en électricité verte sur le site de Tesside. Pourtant les autorités et les industriels rencontrent aussi quelques difficultés, on apprenait ainsi que le consortium de RWE, SSE, Statkraft et Statoil a dû revoir ses projets à la baisse en Mer du Nord, passant d’une capacité totale de 9GW à 7,2GW.
L’éolien off-shore n’est pas sans conséquence
Pour avancer sur ces dossiers, la concertation est de rigueur. En effet, les associations professionnelles et environnementales disposent d’importantes capacités de contestation et de blocage. Au Royaume Unis, c’est la Royal Society for the Protection of Birds (RSPB) qui a d’abord tenu à alerter sur les risques concernant la faune et la flore. Avec son soutien, les îles britanniques ont ainsi pu arriver à plus de 50 % des objectifs annoncés, alors qu’en France le cap des 50 %, ne sera franchi qu’au mieux en 2021. En effet, de nombreuses fractures divisent les acteurs concernés, d’abord plusieurs industriels espèrent gagner les appels d’offres, ensuite le monde de la pêche fait également entendre ses revendications.
L’autre consortium qui espère obtenir les prochains sites se compose d’Areva, GDF Suez, et d’EPD-R, et ne manque pas de susciter des controverses. D’abord sur la question de l’emploi, en effet comme l’explique le Président du Conseil Régional des Pays de la Loire, M. Jacques Auxiette, « nous assistons à la naissance d’une vraie filière industrielle ». C’est pourquoi il est particulièrement vigilent sur les choix de localisation des industriels, or, « alors qu’Alstom se concentre sur la façade atlantique avec STX, Areva mise apparemment sur la création de synergies avec ses projets en cours de développement outre-Manche». De plus, comme le souligne également Thierry Muller, directeur général d’EDF EN Services : « nous avons fait le choix d’internaliser les compétences stratégiques pour pouvoir maintenir les équipements sur le long terme », ainsi précise l’Usine nouvelle, de nouvelles formations s’ouvrent dans les lycées Maupassant à Fécamp et Jules Verne à Mondeville (Calvados).
Par ailleurs, les 1res Assises nationales des Énergies Marines renouvelables qui se sont déroulées le 8 avril dernier montrent la complexité des intérêts enjeux. C’est à cette occasion notamment que le président de l’Association France Energie Eolienne, Frédéric Lanoë plaidait pour « un rééquilibrage » entre les constructeurs, omettant de préciser qu’il occupait également la direction du groupe portugais EDP-R, associé à Arveva. Enfin, la FEE aurait commis une autre erreur selon le site Youphil qui relaye notamment un communiqué du comité régional de la pêche. Ce dernier dénonce notamment les méthodes de l’association professionnelle : « Nous sommes très honorés d’apprendre qu’il y a des possibilités d’implantation d’éoliennes flottantes dans nos secteurs historiques d’activités. Évidemment, la pêche ligérienne n’a pas été informée de cette annonce. Nous trouvons la démarche assez maladroite pour ne pas dire agressive ».
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