Le chlordécone, un pesticide ultra-toxique utilisé pendant plus de vingt ans dans les bananeraies en Guadeloupe et Martinique, fait de nouveau parler de lui. Le journal Monde a publié ce mercredi 6 juin 2018 un article sur son utilisation massive de 1972 à 1993 dans les bananeraies antillaises. La quasi-totalité des Guadeloupéens et des Martiniquais, ainsi que les sols et rivières sont aujourd’hui contaminés et pour longtemps. Nous avions rencontré le Dr Maurice Montezume qui dénonçait déjà ce scandale, il y a 4 ans !
La banane de Martinique et des Antilles est très appréciée en France métropolitaine et constitue une ressource agricole traditionnelle de ces îles. Mais cela fait plusieurs années qu’une menace pèse sur la filière à travers le chlordécone. Le docteur Maurice Montezune, de Fort de France, nous alerte sur une pandémie qui menace avec un État français passif. Ce « J’accuse » est notre carton rouge de la semaine
Chlordécone, chronique d’une pandémie annoncée
La France, son gouvernement et ses Ministères successifs ont rendu légal la consommation de chlordécone.
En Martinique ou en Guadeloupe, un insecticide, le chlordécone, qui sert à lutter contre le charançon dans les bananeraies, fait des ravages et pollue les eaux massivement : 96 % des rivières et 61 % des nappes d’eau souterraines sont contaminées. Ce n’est pas nouveau*.
Un rapport de l’INRA d’août 2010 pointait déjà du doigt « de véritables anomalies » dans la gestion de la question du chlordécone par le gouvernement français entre 1972 et 1993. Alors que le Chlordécone était interdit aux États-Unis depuis 1976, et classé Cancérigène possible en 1979, l’État français a continué à autoriser son utilisation massive a massivement dans les Antilles françaises jusqu’en 1993, soit 17 ans après les premières alertes des États-Unis
Or, comme le souligne l’Afsset, l’agence de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail, les pesticides qui se sont infiltrés, vont mettre jusqu’à 30 ans pour s’éliminer des sols, des siècles selon certains experts !
- En 2007, l’AFSS a expliqué que 4 types de denrées peuvent être contaminés à un niveau tel qu’il représente un risque aigu pour la population des Antilles : la patate douce, le chou caraïbe (malanga), le dachine (madère),les poissons et les crustacés d’eau douce.
- Une équipe de l’INSERM a mené une étude qui démontre qu’il serait à l’origine d’une augmentation du risque de naissance prématurée.
Aujourd’hui, en France et plus particulièrement aux Antilles, on parle « d’empoisonnement pour des siècles » car le chlordécone est une molécule bio-accumulative. Il s’accumule dans le corps et dans les organismes pour longtemps. Cette molécule qui est pourtant reconnue cancérogène est pourtant acceptée, légale et encouragée (par le Grephy de Martinique(1)) notamment dans les aliments végétaux et de provenances animales depuis 2008. Un état de fait conforté par le ministère de la santé : la présence actuelle de chlordécone dans nos aliments est légale !
Chlordécone – Un médecin révolté
Alors, qu’aucune manifestation majeure suite à la légalisation d’un empoisonnement de l’ensemble de la population n’a eu lieu, ma qualité de médecin et le serment d’Hippocrate me donnent le devoir d’alerter la population. Car à partir d’aujourd’hui, il sera légal de cultiver des terres contaminées.
La Préfecture de Martinique et le GREPHY ont autorisé et encouragé la culture sur terre contaminée ; ce qui a pour impact direct la multiplication de produits contaminés présentés au consommateur comme « produit certifié conforme ».
Afin que tous les Français comprennent que l’État leur « dissimule » la présence de poisons dans leurs aliments, je présenterai quels sont les effets attendus de cette attitude sur la santé publique. Dans la foulée de ces décisions génocidaires rappelant que le chlordécone est un pesticide parmi tant d’autres, car à chaque région son pesticide alimentaire légal, je parlerai de suicide national.
Pour être précis, il faut dire quelle est la teneur de l’empoisonnement légal actuel. En ce qui concerne les denrées végétales, les valeurs limites seront de :
- 20 μg/kg pour les denrées cultivables sous climat tropical ou tempéré (agrumes, fruits,tropicaux, tous les légumes, laitues, maïs, canne à sucre….).
- 10 μg/kg pour certaines denrées spécifiques aux régions de climat tempéré ou susceptibles d’être importés de pays tiers (blé, riz, pommes, poires et fruits à noyaux, betterave sucrière…).
- pour les denrées animales, qu’elles soient d’origine terrestre ou aquatique, la valeur limite sera fixéeà 20 μg/kg » (2).
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