Votre viande de veau est blanche, parce qu’il a été anémié
« En Angleterre, le veau c’est rouge », avance la vétérinaire de Poitou-Charentes. « C’est la culture qui impose ça. En France, on veut que la viande soit blanche. Les choses peuvent difficilement évoluer, car les consommateurs n’aiment pas le changement. »
En France, il est en effet communément accepté que la viande de veau doit être blanche. La blancheur serait le signe d’une alimentation lactée exclusive, et donc garante de fraîcheur et d’un goût caractéristique.
La couleur est obligatoirement indiquée sur la carcasse, et intervient dans son prix(2). Il existe quatre catégories de couleur : blanche, rosé clair, rosé et rouge, notées de un à quatre. « Si la viande est trop rose, elle sera déclassée et achetée moins cher », indique Johanne Mielcarek.
Mais alors comment font les éleveurs pour obtenir une viande blanche qui correspond au goût des consommateurs ? « C’est probablement le point le plus polémique de l’élevage de veau car, pour obtenir cette couleur, il doit être anémié », reconnaît la vétérinaire. Autrement dit, le veau doit souffrir d’un manque en globules rouges, provoqué par une carence nutritionnelle en fer.
Cette condition d’élevage est très souvent décriée par les associations de défense des animaux : « Il est recommandé aux élevages de n’utiliser aucun fer dans leurs installations, notamment pas de barreaux en fer autour du veau, car sinon il va la lécher pour compenser son manque », dénonce Johanne Mielcarek.
Mais la vétérinaire rurale tient à tempérer la polémique : « L’anémie est une maladie qu’on retrouve chez de très nombreuses personnes sans qu’elles s’en rendent compte. C’est uniquement dans le cas où elle est forte où il y aura des symptômes, comme de la fatigue. Mais il existe des tests réguliers en élevage, c’est dans l’intérêt des éleveurs que leurs veaux ne soient pas trop anémiés ».
Une directive européenne impose que l’alimentation des veaux contienne suffisamment de fer de façon à ce que le taux d’hémoglobine dans le sang soit d’au moins 4,5 mmol/litre de sang.
L’anémie est loin du pré
Toutefois, l’anémie recherchée impose une autre condition d’élevage peu flatteuse. Inévitablement, ces veaux de l’industrie laitière ne verront jamais les verts pâturages. En effet, l’herbe contient du fer. Or, comme expliqué précédemment, pour obtenir une viande blanche, l’apport en fer est strictement régulé.
Ainsi, les veaux de l’industrie laitière ne connaîtront jamais que le lait en poudre, et un peu d’aliments fibreux, 250 g/jour, tel qu’imposé dans une directive européenne. En comparaison, dans l’élevage à viande, les veaux commencent normalement à paître vers l’âge de 2-3 mois.