Depuis le mois de juin, les différentes manifestations d’éleveurs mettent sur le devant de la scène la crise majeure qui secoue l’élevage en France face à une concurrence internationale et à la course aux prix bas. Descendre à 1,20 euro, prix moyen du kilogramme sur le marché européen, n’est pas viable. Tout particulièrement à cause du coût que représente les aliments. La tonne est passée de 170 euros en 2006 à 304 euros en 2013, sans que cela soit répercuté à la vente. En France, ce sont 10 % des élevages qui sont en difficulté financière, une crise « sans précédent » selon le ministre de l’agriculture Stéphane Le Foll. Les agriculteurs bio sont-ils mieux armés face à cette crise ?
Pour les acteurs de la filière, il faut être toujours plus grand pour être compétitif
Pour répondre à cette crise, des fonds ont être débloqués et des accords entre les différents acteurs ont été trouvés pour fixer les prix. D’une part pour la filière bovine avec une hausse de 5 centimes par semaine jusqu’à ce que le coût d’achat couvre le coût de production. D’autre part pour la filière porcine où un prix a été fixé à 1,40 euro le kilo.
Cependant ces accords tardent à voir réellement le jour. En un mois les éleveurs bovins n’ont été valorisés que de 7 centimes. Tandis que le marché du porc breton s’est vu boudé par les deux acheteurs majeurs, Bigard/Socopa et Cooperl, aboutissant à un prix de vente inférieur à 1,40 euro.
Cependant, même si les accords peuvent aboutir à un prix d’achat couvrant les frais d’exploitation pour les ventes en France, la question reste entière pour les ventes vers le marché européen où le prix moyen est de 1,20 euro.
Ainsi la solution à cette crise sur le long terme passe, pour la FNSEA et différents syndicats d’éleveurs, par une modernisation des élevages et leur agrandissement afin de pouvoir concurrencer les élevages de nos voisins européens, tout particulièrement l’Allemagne et les Pays-Bas. Dans ces pays, les élevages comptent plusieurs milliers des bêtes alors qu’en France les exploitations sont souvent des exploitations familiales de quelques centaines de bêtes.
A contre courant de l’industrialisation, des éleveurs font le choix du bio
Cependant, à l’inverse de ce souhait des acteurs traditionnels des filières agricoles, qui sont aidés par le décret du 27 décembre 2013 diminuant le nombre de démarches nécessaires pour l’agrandissement des exploitations porcines, des agriculteurs font le choix de réduire leurs élevages et de passer en agriculture biologique.
C’est le cas de Bernard Buet, exploitant de porc à Quévert en Côte d’Armor. Il a choisi de passer en bio et de réduire sont cheptel de 1.600 animaux à 740. Son choix est né d’une « prise de conscience financière, éthique et morale ». Il souhaite « faire des produits de meilleur qualité » et cesser « d’empoisonner » la terre.
Un choix éthique… et profitable
Par ce choix, Bernard Buet a triplé ses revenus. D’une part, par la réduction des coûts d’alimentation avec la culture de ses propres céréales bio et parce que le prix de base du kilo fixé pour un an est actuellement autour de 3,40 euros.
Ce choix d’être indépendant pour les intrants et pour la vente c’est aussi ce qui a poussé Philippe Girardeau à passer en bio. Après trois ans, Philippe ne regrette pas ce choix : « alors qu’avant je voyais tout en noir et que j’étais prêt à tout arrêter, aujourd’hui je suis heureux d’aller travailler le matin ». L’eurodéputé Yannick Jadot d’Europe écologie les verts, invité sur France Inter mardi 18 août, en conclue que l’élevage de demain est « un élevage où il y a des paysans, où l’on aménage le territoire, où l’on protège l’environnement, où l’on fait une viande de qualité ».