Fin mars, Emmanuel Macron évoquait la possibilité d’une « tarification progressive » de l’eau. Une mesure parmi d’autres présentées dans le « plan eau » du gouvernement, qui consiste à payer plus cher cette ressource au-delà d’une certaine quantité consommée. Êtes-vous pour ou contre la tarification progressive de l’eau ? Nous vous laissons la parole dans notre sondage de la semaine.
Après un hiver 2022-2023 particulièrement sec, laissant présager le pire quant aux réserves en eau de la France cet été, le président de la République présentait fin mars le « plan eau » du gouvernement : 53 mesures pour améliorer la gestion de l’eau dans le pays, ressource devenue rare ; en témoignent les niveaux inquiétants des nappes phréatiques de l’Hexagone.
L’agriculture, à l’origine de 58 % de la consommation totale d’eau en France
Parmi les secteurs les plus consommateurs d’eau en France : l’agriculture, à l’origine de 58 % de la consommation totale. Viennent ensuite les consommateurs d’eau potable, à savoir les particuliers, la restauration et les sites touristiques (26 % de la consommation d’eau en France). D’autres secteurs sont également appelés à se montrer plus responsables vis-à-vis de leur consommation d’eau, notamment les producteurs d’énergie pour le refroidissement des centrales électriques (12 %) et les industriels (4 %),
Il sera donc demandé à chaque secteur de faire des efforts, tout comme les collectivités, qui seront également mises à contribution dans la gestion de l’eau. « Les bâtiments de l’État seront équipés de mécanisme de récupération des eaux de pluie et d’équipements agro-économes », précisait notamment Emmanuel Macron. Une campagne de sensibilisation du grand public sera également lancée prochainement, afin d’amener l’ensemble de la société à prendre conscience de l’importance d’économiser l’eau.
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Un « Écowatt de l’eau » pour amener tout un chacun à économiser l’eau
Plusieurs mesures de sobriété seraient donc actuellement à l’étude, parmi lesquelles le déploiement d’un « Ecowatt de l’eau », sur le modèle de celui déjà dédié à la gestion de l’énergie. Cet outil, qui selon le chef de l’État doit permettre de « responsabiliser chacun », permettra de « connaître les gestes à adopter et l’évolution de la situation » dans son territoire comme dans le pays tout entier. Ce dispositif présenté comme « simple d’accès et d’utilisation » permettra donc à chaque ménage de « connaître les restrictions qui s’appliquent en fonction de sa géolocalisation et de sa catégorie d’usager, et les écogestes recommandés au regard de la situation hydrologique locale ».
Une mesure parmi une cinquantaine d’autres qui ont pour objectif, d’après l’espérance du gouvernement, de répondre à court terme à l’urgence de la situation, mais également d’économiser l’eau sur le long terme. Objectif espéré par l’État : « faire 10 % d’économie d’eau dans tous les secteurs » d’ici 2030. Cinq grands axes seront ainsi déployés : « accélérer la sobriété partout et dans la durée », « lutter contre les fuites », « investir dans la réutilisation d’eaux usées » – actuellement en France, moins de 1 % de l’eau usée est réutilisée – , enfin, « accompagner la transformation de notre modèle agricole » et « mettre en place partout une tarification de l’eau ».
Par ailleurs, afin d’aider les agriculteurs à utiliser l’eau de manière plus efficace, une aide financière de 30 millions d’euros devrait être accordée. Cette aide sera notamment destinée à la mise en place de systèmes intelligents tels que l’irrigation au goutte-à-goutte. Le plan vise également à maximiser le stockage d’eau dans les sols en plantant plus d’arbres et de haies partout où cela est possible, ainsi qu’en construisant de nouveaux ouvrages.
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Une « tarification progressive de l’eau » pour responsabiliser tous les Français
Pour « accélérer la sobriété », Emmanuel Macron expliquait donc souhaiter le déploiement, partout en France, d’une « tarification progressive » de l’eau. En clair : « les premiers mètres cubes sont facturés à un prix modeste, proche du prix coûtant. Au-delà d’un certain niveau, le prix du mètre cube sera plus élevé », expliquait-il en mars 2023.
Il s’agirait alors d’une modification drastique de la méthode actuellement en vigueur dans la majorité des organismes responsables de la gestion de l’eau (qu’ils soient privés ou publics), qui appliquent le principe de tarification dégressive. Autrement dit, plus la consommation est élevée, moins le coût par mètre cube est élevé.
Ce barème progressif du prix de l’eau souhaité par Emmanuel Macron est déjà adopté par une quinzaine de communes en France. Tel est notamment le cas de la ville de Montpellier, qui depuis le 1er janvier 2023 applique une grille tarifaire divisée en quatre tranches de consommation. De 0 à 15 m3 consommés, quantité représentant le strict nécessaire pour les usages courants, l’eau est gratuite. La 4e tranche concerne les consommations excédant les 240 m3 ; le mètre cube d’eau étant alors facturé 2,7 euros l’unité.
D’après la ville de Dunkerque, l’une des pionnières en la matière, les premiers résultats tendent à prouver que cette « tarification progressive » porte ses fruits. La consommation moyenne des Dunkerquois est ainsi 16 % en dessous de celle de la moyenne nationale : 67 m3 d’eau par an, contre 80 m3. Autre exemple, la ville de Rennes où l’augmentation de tarif n’intervient qu’à partir de 100 m3. Il a aussi été constaté une baisse de la consommation moyenne de 1m3 par foyer entre 2020 et 2021, passant de 67 à 66 m3. « Mais impossible de savoir si c’est lié à la tarification progressive. Le phénomène confinement a peut-être joué », souligne Laurent Geneau auprès de 20 Minutes.
En effet, peu d’études précises portant sur la question n’ont encore pu être menées. Ainsi, la baisse de la consommation d’eau observée en cas de tarification progressive pourrait aussi être le fruit de la sensibilisation du grand public à ce sujet, dans un contexte où la sécheresse se fait de plus en plus présente en France. L’inflation et l’augmentation globale des tarifs de l’eau pourraient aussi freiner certains ménages dans leur consommation. Difficile donc d’affirmer avec certitude qu’une tarification progressive de l’eau permettrait bien d’abaisser la consommation d’eau des Français.
Autre écueil à la mise en place d’une telle tarification : la composition des foyers, qui entraîne de fait une plus ou moins grande consommation d’eau. « Nous souhaiterions connaître la composition exacte du foyer pour pouvoir adopter le tarif, notamment pour les familles nombreuses qui forcément consomment davantage, mais nous ne sommes pas aidés par la CAF ou la CPAM sur ce sujet », déplore auprès de 20 Minutes Bertrand Ringot, président des Eaux du Dunkerquois. Pour l’élu, la tarification progressive doit par ailleurs être accompagnée d’une sensibilisation des ménages et d’une aide à l’installation d’économiseurs d’eau, par exemple.
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