Le Parc national des Calanques serait-il tombé sur la tête ?
Le plus étonnant concernant le droit de polluer de l’usine Alteo, c’est que ce dernier lui a été accordé par… le Conseil d’administration du Parc national des Calanques lui-même ! Un paradoxe étrange lorsque l’on connaît la mission initiale du parc national.
En effet, ce dernier doit veiller à la protection des milieux, des espèces animales et végétales, des paysages et du patrimoine naturel. Il est donc pour le moins incompréhensible que ce dernier accepte la pollution destructrice de l’usine Alteo.
© Jean Pierre Beuret
D’autant plus que lorsque l’on consulte son site internet, le parc se vante de compter près de 140 espèces terrestres animales et végétales protégées ainsi que 60 espèces marines patrimoniales.
Selon le président du Conseil d’Administration du Parc Didier Réault, adjoint au maire de Marseille, « le conseil d’administration a décidé d’autoriser ces rejets, mais avec des conditions fermes ». Concrètement, « des meilleurs contrôles et un meilleur suivi des eaux rejetées ».
Malgré 50 ans de pollution, les risques sanitaires pour l’écosystème méditerranéen et pour l’homme demeurent encore méconnus.
Toutefois, après un état des lieux en 2016, un bilan sera effectué tous les 5 ans et les études d’Alteo seront confrontées à celles du conseil scientifique du Parc. S’il y a un problème, le préfet pourra tout arrêter.
L’intérêt financier plus important que l’écologie ?
L’intérêt financier n’est peut-être pas étranger à ce renouvellement du droit de polluer le Parc national des Calanques. En effet, le groupe franco-américain propriétaire de l’usine Alteo n’hésite pas à brandir la menace du chômage.
L’usine emploie près de 400 salariés et fait travailler quelque 300 sous-traitants. Des centaines d’emplois se trouveraient ainsi menacés.
Qui plus est, Alteo pour prouver sa bonne foi, investit 30 millions d’euros dans des « filtre-presse » et un « filtre à pression » permettant de séparer les parties solides des boues rouges pour ne rejeter que du liquide. Le puissant lobbying des industriels souhaite donc imposer sa loi.
Ségolène Royal validera-t-elle le choix du Parc national des Calanques ?
L’avis du Parc national doit être suivi par une nouvelle autorisation de l’État, ce qui n’est pas encore acquis, à en croire la déclaration de la ministre de l’Écologie.
Interrogée sur le dossier des boues rouges rejetées par l’usine Alteo, Ségolène Royal affirme « voilà maintenant un système qui n’est plus durable, ce laxisme en direction d’entreprises qui ont le droit de polluer et de s’approprier des profits privés contre une pollution qu’elles ne paient pas et qui sans doute détruisent davantage d’emploi qu’elles n’en créent. Il ne faut plus que le chantage à l’emploi conduise à être laxiste à l’égard d’entreprises qui polluent ».
Ainsi, la ministre a suspendu le renouvellement de déverser des déchets toxiques et chimiques dans la Méditerranée. Cette dernière a également déclenché une enquête qui sera prochainement rendue publique.
Alors qui du Ministère de l’écologie ou du lobbying des industriels aura le dernier mot ? Affaire à suivre… Et vous, qu’en pensez-vous ?
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(1) L’usine Alteo de Gardanne, ancien site de production d’alumine de Péchiney et du géant minier anglo-australien Rio Tinto – racheté en 2012 par le fonds d’investissement américain HIG et renommé Alteo – bénéficie du droit d’expédier ces résidus à 7 km au large de Cassis, dans le canyon sous-marin de la Cassidaigne, par 330 m de fond.
(2) Les boues rouges devraient être définitivement arrêtées à compter du 31 décembre 2015. La concentration de métaux lourds dans les rejets liquides qui vont subsister devrait diminuée de 95,5 à 99,9 % d’après Alteo.
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