Du 25 au 27 septembre, à New-York, les Nations Unies se réuniront en vue d’adopter le nouveau programme de développement pour l’après 2015. Cette année est la date butoir pour atteindre les objectifs du millénaire adoptés en 2000. Ces objectifs ont-ils été atteints ? Sont-ils réellement efficaces ou contribuent-ils seulement à symboliser la participation de l’ONU en matière de développement ?
17 manières de transformer le monde
Les 193 pays membres de l’ONU ont préparé 17 nouveaux objectifs que comporte le projet, intitulé « Transformer notre monde, programme de développement durable d’ici 2030 ». Ainsi, les Nations Unies se donnent de nouveaux quinze années pour « éliminer la pauvreté, transformer nos vies et protéger la planète. »
En 2000, lors du plus grand rassemblement de chefs d’États et de gouvernements, 8 objectifs ont été adoptés, divisés en 20 cibles quantifiables et mesurées par 60 indicateurs statistiques :
- Éliminer l’extrême pauvreté et la faim.
- Assurer l’éducation primaire pour tous.
- Promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes.
- Réduire la mortalité infantile.
- Améliorer la santé maternelle.
- Combattre le VIH, le paludisme et d’autres maladies.
- Préserver l’environnement.
- Mettre en place un partenariat mondial pour le développement.
Des objectifs atteints
Selon l’ONU, la plupart de ses objectifs ont été atteints. En 1990, 47 % de la population des pays en développement vivaient dans une extrême pauvreté, ils ne sont aujourd’hui plus que 14 %. Le nombre d’enfants non scolarisés en âge d’aller à l’école primaire et la mortalité infantile ont été divisés par deux entre 2000 et 2015. Les infections par le VIH ont diminué de 40 %. Et 98 % des substances appauvrissant la couche d’ozone ont été éliminés, ce qui pourrait permettre sa reconstitution d’ici le milieu du siècle.
Pour financer ces objectifs, les aides publiques au développement ont augmenté de 66 %. Un nouveau plan de financement a été conclu lors de la 3e conférence internationale sur le financement du développement, en juillet dernier à Addis-Abeba, en Éthiopie. Les associations craignent cependant un financement de plus en plus privatisé, qui ne permettent pas une redistribution équitable.
Un bilan contrasté
Le Cetri (centre tricontinental) dénonce toutefois ces aides publiques. Aides qui sont en réalité des prêts accordés aux Etats, qui les entraîneraient dans de nouveaux cycles d’endettement.
Ce n’est pas la seule critique du Cetri envers les OMD (objectifs du millénaire pour le développement), qui ne sont pas en soi contestables. Selon, Frédéric Lapeyre, professeur et membre du Cetri, l’analyse consiste à savoir si « au-delà de la rhétorique du discours dominant, ils constituent un réel outil de développement ou si, au contraire, ils ne sont qu’une nouvelle composante de la stratégie des acteurs dominants pour lever certains obstacles dans leur effort permanent de restructuration du monde en fonction de la logique de l’accumulation. »
Les OMD mettent en avant une forme de développement basée avant tout sur la croissance et sur les valeurs capitalistes de dérégulation, d’ouverture des marchés et de privatisation. Ce qui augmenterait la pression sur les communautés les plus vulnérables. Un exemple est celui de l’accès à l’eau, l’ONU avance que deux millions de personnes supplémentaires ont accès à l’eau potable par semaine. Seulement, ces investissements dans l’assainissement proviennent d’entreprises privées qui refusent d’investir dans des zones populaires peu rentables.
L’association Oxfam a adressé une lettre ouverte en 2013 aux membres de l’ONU, indiquant leurs préoccupations face au passage d’un financement public à un financement privé. Dans cette lettre, elle demandait aussi à ce qu’un « objectif spécifique de réduction des inégalités de revenu » soit inclus dans le travail post-2015.
Comme Oxfam, le Cetri pointe du doigt l’accent mis sur l’élimination de la pauvreté. Selon ses membres, il réduirait le débat sur le développement à la lutte contre la pauvreté, en excluant les questions de redistribution et donc principalement celle des inégalités. La croissance, placée au centre des objectifs, peut mener au « mal-développement ». Lequel ne profiterait qu’à une petite élite dans chaque pays, accroissant les inégalités, et excluant plus fortement la partie de la population la plus pauvre.
De plus, ils ne donnent aucun pouvoir d’initiative aux acteurs nationaux et locaux, les OMD enferment les décisions politiques dans un cadre restrictif prédéterminé par les élites. Dans son rapport intitulé « Pour un développement durable qui ne laisse personne de côté : le défi de l’après-2015 », ATD Quart Monde recommande de « promouvoir la paix par une bonne gouvernance participative. S’assurer que les structures locales, nationales et internationales mettent en place des mécanismes participatifs ».
Un bilan pour de nouveaux enjeux
L’ONU elle-même reconnaît les lacunes de ses objectifs. 800 millions de personnes vivent encore dans une extrême pauvreté et 795 millions souffrent de la faim. 57 millions d’enfants ne sont toujours pas scolarisés. Les femmes continuent d’être victime de discriminations et les inégalités dans le monde, que ce soit dans les pays en développement ou dans les pays développés, s’accroissent. Les objectifs du millénaire se réduisaient à combattre les symptômes des problèmes de développement. Élargir les objectifs et les différentes cibles,169 cibles au total, permet de s’attaquer à la racine des problèmes en rendant compte de leur complexité.
Le programme pour l’après-2015, a donc été élaboré à partir du rapport du secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, publié en janvier 2015. Ainsi parmi les 17 objectifs est inclus l’élimination de la pauvreté mais aussi la réduction des inégalités. Pour les atteindre, deux autres objectifs sont formulés : garantir la paix et instaurer un mode de consommation et de production durable.
Et l’environnement ?
Préserver les écosystèmes fait partie du programme post-2015, l’environnement est en effet une facette du développement durable. L’objectif 13 appelle à « prendre d’urgence des mesures pour lutter contre les changements climatiques et leurs répercussions ». Le sommet de la COP21 pour le climat en décembre et celui des Nations Unies pour le développement durable sont mis en parallèle. Les responsables de l’ONU demandent aux chefs d’États et de gouvernements à conclure à Paris « un accord ambitieux et universel sur le climat ».
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