Des copies pas du tout conformes !
Mouche (ou abeille) forgée. Photo Laguiole en Aubrac
L’abeille (ou mouche, on n’en est toujours pas sûr !) est effectivement un symbole très typique du couteau Laguiole. Elle est souvent présente sur les contrefaçons pour cette raison. On s’aperçoit très vite de la supercherie en regardant de près : la véritable abeille ou mouche doit être forgée avec le ressort en une seule pièce.
Regardez ensuite la lame du couteau qui doit être d’une qualité exceptionnelle. La qualité de l’acier est estampillée dessus (par exemple 12 C 27).
Le manche des couteaux Laguiole authentiques est en corne, en os, en ivoire (soumis à autorisation) ou en bois. La provenance est obligatoirement indiquée.
Bien entendu, les copies sont toujours très convaincantes ! Pour distinguer le vrai du faux, le vendeur doit fournir un certificat d’origine mentionnant le nom et l’adresse des six fabricants tous situés dans l’Aubrac à l’exception d’un seul qui fabrique à Thiers.
Si la provenance n’est pas indiquée, ou si le couteau vient du Pakistan ou de Chine comme cela arrive très fréquemment, vous avez la réponse à votre question…
Et la marque Laguiole ?
Depuis 1993, Laguiole est une marque déposée par Gilbert Szajner, un industriel qui a décidé de profiter du nom pour vendre ses couteaux fabriqués en Chine comme des petits pains. Et pas uniquement : sous cette marque dont le nom inspire le « made in France », l’artisanat et la qualité, l’homme d’affaires vend des briquets, des vêtements, de la vaisselle et même des barbecues !
Mais c’est sûr qu’à ce prix – sur le site de la marque, on trouve des couteaux à 20€ alors qu’un vrai Laguiole coûte au moins une centaine d’euros, au vu du long travail que demande sa conception ! – il ne faut pas s’attendre à obtenir la même qualité et le même savoir-faire !
Protestation des Laguiolais. CC : Metronew Toulouse
Mais même les Laguiolais et les Laguiolaises sont impuissants face à ce qui ressemble à une blague d’un bien mauvais goût. L’histoire ne date pas d’hier et est pleine de rebondissements.
En 1997, la justice condamne Gilbert Szajner qui vendait ses couteaux sous la marque Laguiole pour contrefaçon, donnant raison au village de Laguiole. En 1999, la Cour d’appel infirme sa décision au motif que Laguiole est devenu un nom générique.
Le village de Laguiole est depuis dépossédé de l’usage commercial de son nom, par une nouvelle décision de justice d’avril dernier. La cour d’appel de Paris a en effet débouté la commune qui souhaitait voir la justice reconnaître les pratiques de Szajner comme « une spoliation », une pratique commerciale « trompeuse » et une « atteinte à son nom, à son image et à sa renommée ».
En donnant raison à l’industriel, la justice n’interdit pas d’utiliser l’appellation Laguiole dans le cadre de son activité de coutellerie puisqu’elle est devenue un terme générique, mais elle l’interdit pour tout autre produit fabriqué dans le village de Laguiole. Une aberration révélatrice d’un vide juridique qui semble se combler. La récente loi consommation du 17 mars 2014 contient en effet une disposition qui protège désormais les entreprises employant un savoir-faire traditionnel pour fabriquer des produits présentant un lien fort avec une zone géographique déterminée. Mais cette loi n’étant pas rétroactive, elle ne s’appliquera pas au cas Laguiole.
Le Maire et ses administrés ne baissent pas les bras et s’impliquent fortement dans la défense du « Made in Laguiole »
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Retrouvez la série Produits artisanaux, le vrai du faux
Image à la Une CC : Stephane Martin