Les 24 heures du Mans est l’un de nos 3 événements sportifs patrimoniaux annuels avec Roland Garros et le Tour de France cycliste. Course automobile connue dans le monde entier, elle oppose des constructeurs à coups de bolides et de technologie.
24 heures de pollution ?
Il y a du chemin à parcourir car on part de loin. Rappelons que :
– on estime(5) que l’épreuve engloutit environ 280 000 litres de carburant avec des voitures qui ont jusqu’à présent des consommations effarantes. Avec un plein d’essence de 90 litres sur les moteurs essence, un prototype du Mans parcourt environ 180 km soit à peine 13 tours de circuit.
Une voiture de 550 chevaux qui consomme 50 litres d’essence aux 100 km (75 l. pour la F1) soit, parcourt environ 5 000 km sur 24 H. soit 2 500 litres d’un carburant qui n’est pas du tout le même que celui qu’on trouve à la pompe.
– en 2006, l’Audi R10 TDI signe une victoire historique : la première pour un moteur diesel, aberration totale du point de vue écologique. La démonstration de l’efficacité du gazole par rapport à l’essence a permis à Audi de promouvoir son moteur Tdi. Peugeot a fait de même avec sa motorisation Hdi.
– l’épreuve sert aux pétroliers pour tester de nouveaux carburants : comme le remarquait Ouest France* en 2008 « aux 24 Heures du Mans, les Anglais ont fourni pour la première fois un biocarburant de 2e génération, qui fait suite au GTL (Gas To Liquid) mis sur le marché en 2006. Du diesel synthétique, baptisé BTL, produit à partir de biomasse non alimentaire comme les résidus forestiers et le bois, « permettant de réduire les émissions de CO2 de plus de 90 % par rapport au diesel conventionnel » précise Richard Karlstetter, le directeur de Shell Technology« . Ce n’est pas franchement la meilleure vitrine pour promouvoir une société où l’écomobilité se passerait de pétrole …
Cette année la part du bioéthanol a été doublée dans le carburant fournit par Shell
– l’épreuve reine ne doit pas faire oublier toutes les autres qui se déroulent au Mans (24 Heures motos, Essais Le Mans Séries, Championnat de France Superbike, Grand Prix de France Moto, 6 Heures du Mans 50 cc, Le Mans Classic, 24 Heures Camions, Trophée Inter-écuries, etc.). De quoi brûler quelques milliers de tonnes de carburant supplémentaires.
Des bilans carbone conformes aux grands événements
Comme toutes les grandes manifestations sportives ou culturelles, le bilan carbone de l’événement découle majoritairement du déplacement des spectateurs(3) :la Fédération française du sport automobile (FFSA), estime que les déplacements des spectateurs représentent 60 % des émissions de CO2. Par comparaison, voici quelques estimations d’impact :
– 2 700 tonnes de CO2, pour le Rallye de France 2010 soit l’équivalent de 2160 trajets aller-retour entre Paris et New York en classe éco,,
– 42 800 tonnes de CO2, pour le Dakar 2010,
– 8 400 tonnes pour les 90 minutes du Grand Prix de F1 de Spa
– 2,7 millions de tonnes pour la Coupe du monde de foot en Afrique du Sud en 2010 (nous y reviendrons bientôt).
On le voit, les grandes courses automobiles ont un impact environnemental bien inférieur à celui des grandes compétitions mondiales comme les JO ou les Coupes du monde de foot ou de rugby : « une seule journée de compétition lors du Mondial équivaut à 1,4 fois l’intégralité des émissions du Dakar »(4).
24 heures de 2014, le triomphe de l’hybride ?
Ce nouveau règlement a cette année attiré le retour de Porsche avec son modèle 919 Hybrid. Il rejoindra Audi, qui a engagé 3 exemplaires de sa nouvelle R18 e-tron quattro mais aussi Toyota, avec 2 TS 040 Hybrid. Nissan roulera hors classement : la Zeod RC, (en photo de Une ce cet article) bénéficie d’une invitation dite le »56ème stand » pour sa voiture très innovante du point de vue de sa technologie verte que de son design. Une machine qui préfigure le retour de Nissan dans la catégorie reine en 2015.
Le Mans veut donc montrer un autre visage, celui d’un immense laboratoire où les essais sont réalisés grandeur nature, où les performances en sécurité, en éco-mobilité, en connectivité seront concentrées dans la voiture du futur. En s’engageant vers des compétitions plus « vertes » l’industrie automobile veut montrer qu’elle s’engage, tardivement mais réellement dans une voie plus responsable.
Cela sera-t-il suffisant pour faire oublier que fondamentalement, l’épreuve continue à promouvoir le mythe de la puissance automobile ? Les avancées techniques en matière d’économie d’énergie peuvent-elles contrebalancer l’image d’un sport qui reste synonyme de grosses cylindrées ?
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Sport et environnement