Du fait du succès des sites de réservation géants et avec la puissance des moteurs de recherche, les hôteliers ont connu une évolution ambivalente. D’un côté, ils bénéficient d’un moyen de marketing puissant qui génère un flux de clients régulier ; de l’autre, ils ont le sentiment d’être de plus en plus dépendants des Booking, Expedia, HES et autres Google, au détriment de leur propre visibilité, de leurs marges et de leur qualité d’accueil.
Des hôteliers français tentent de reconquérir un contact direct avec leur clientèle avec une nouvelle plate-forme, fairbooking. Un bon plan pour les consommateurs ?
Les réservations sur les plateformes de réservation : un faux bon plan
La Chambre des professionnels indépendants de l’hôtellerie (CPIH) et l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (Umih) ont récemment saisi l’autorité de la concurrence. Le sujet de leur courroux ?
Elles accusent les grandes plateformes de réservation comme Expedia, HRS, Booking.com de pratiques déloyales. « Au départ, ces portails étaient de simples annuaires offrant une visibilité aux hôteliers, mais ils leur ont peu à peu imposé des clauses contractuelles non négociables, tout en mettant en place un système commercial anticoncurrentiel qui trompe les consommateurs« , explique Rémi Ohayon, spécialiste de ce sujet (1).
Les hôteliers sont en effet remontés comme des coucous contre ce qu’ils appellent des promos bidons : « Certains sites ont des promos bidons, ils gonflent nos tarifs de 20 % pour en fait les solder au tarif normal ».
86 % des Français croient, à tort, payer moins cher sur les sites de réservation en ligne… à tort**… Enquête Institut Promise Consulting Inc., août 2013
Une étude réalisée auprès de 80 hôtels en France entre 2008 et 2012 montre que la part des commissions versées aux intermédiaires par rapport au chiffre d’affaires hébergement a sensiblement progressé. Hors Paris et Côte d’Azur, elle est passée de 2,4 % du chiffre d’affaires hébergement à 4,2 %. A périmètre constant, le montant des commissions versées aux intermédiaires a progressé de plus de 64 % sur les cinq dernières années (©2013 In Extenso Conseil).
La hache de guerre est déterrée
Entre les hôteliers français et les plateformes de réservation sur Internet, la guerre est donc déclarée avec au centre du champ de bataille les taux de commission prélevés par les sites de réservation. Ces taux varient le plus souvent de 15 à 30 %. Des taux bien supérieurs à ceux que prélèvent les agences de voyage traditionnelles (autour de 10 %).
C’est logique : car quand on réserve une chambre via Booking.com (par exemple), la commission que doit payer l’hôtel représente une somme que l’hôtelier ne va pas pouvoir consacrer au service ou à l’entretien de l’hôtel. Cela est d’autant plus vrai que les plate-formes ne se gênent pas pour proposer d’office des avantages supplémentaires pour fidéliser l’internaute : des rabais, voire des nuits gratuites qui bien entendu sont à la charge de l’hôtel. C’est une pratique courante de Booking.com, qui propose à ses habitués une réduction de 10 % via son système« Booking genius ».
Ce schéma fait furieusement penser aux raisons qui ont été à l’origine du succès de Groupon.com puis du rejet général qui s’en en suivi : le seul gagnant à long terme est Groupon et non le commerçant ni son client. (Groupon, des économies, oui, mais à quel prix).
Le hold-up d’image : faux avis et informations biaisées
Mais ce qui a fait sortir les hôteliers de l’Umih de leurs gonds, ce sont certaines pratiques autrement plus répréhensibles. En effet, comme l’explique Rémi Ohayon, les plateformes de résa publient de faux avis sur les établissements et nuisent ainsi à leur image.
« Ces faux commentaires fragilisent notre e-réputation, tout comme les fausses informations – hôtel complet – ou les mentions trompeuses – hôtel préféré – qui ne sont liées à aucun critère objectif de qualité« .
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