Nous avons besoin de l’industrie pharmaceutique. Mais il ne suffira pas d’une campagne de com’ pour redorer son blason. Elle doit faire amende honorable par rapport à ses errements. Et promouvoir une nouvelle éthique de la transparence et de l’implication citoyenne.
L’industrie pharmaceutique a lancé une campagne de communication pour améliorer son image. On peut comprendre ses motivations, mais rien ne changera tant qu’elle n’admettra pas qu’elle a triché, comme l’industrie automobile, et qu’elle ne convaincra pas qu’elle a mis en place les mécanismes nécessaires pour éviter qu’on nous mente.
Car rappeler comme le fait cette campagne que les personnes qui sont impliquées dans l’industrie pharmaceutique sont « engagées » et souhaitent améliorer la santé des personnes n’aura pour effet chez les plus sceptiques que de susciter les sarcasmes, on peut le craindre, sur le mode « le personnel de l’industrie pharmaceutique n’oeuvre-t-il pas d’abord pour son propre avantage ?« .
Ce rejet est visible dans les commentaires des lecteurs de consoGlobe. Nathy affirme sans détour : « Le jour où ces saloperies de labos feront de la recherche utile et éthique, alors peut-être n’auront ils plus à subir les conséquences de leur inconséquence. » Heller estime que « les majors de la pharma sont devenues avant tout des experts en Marketing et en Communication« . Tandis qu’Aloïs pense que « notre argent les intéresse, pas notre santé« .
Ces sentiments sont partagés au-delà des lecteurs de consoGlobe, particulièrement soucieux de « consommer mieux, vivre mieux« , notre mot d’ordre. Les enquêtes d’opinion le montrent, l’une après l’autre : la confiance dans les médicaments s’érode. En 2016, 88 % des Français sondés disaient faire confiance aux médicaments sur ordonnance, un niveau respectable, mais qui représentait une baisse de pas moins de 5 points par rapport à l’année précédente.
La principale raison pour laquelle nous prenons tant de médicaments est que les compagnies pharmaceutiques ne vendent pas des médicaments, elles vendent des mensonges au sujet des médicaments.
Peter Gotzsche
Bien sûr que des personnes honnêtes travaillent, on peut l’espérer en nombre, dans l’industrie pharmaceutiques et n’apprécient certainement pas d’être associées aux abus. Mais une campagne de communication qui restaure la confiance de l’industrie dans son ensemble ne peut pas occulter que des abus ont été commis, des effets secondaires masqués, des antibiotiques prescrits exagérément, des recherches négligées par rapport à des pathologies non rémunératrices. Levothyrox, Dépakine, Mediator, pilules de 3e et 4e générations, et autres vaccins contre la grippe A (H1N1) ont entaché la confiance que les particuliers ont envers l’industrie. Sans parler de pratiques de lobbying décriées ou de marketing trop insistant.
Autant de mensonges documentés par Peter Gotzsche dans son livre Deadly Medicines and Organised Crime qui avance dans son introduction que « la principale raison pour laquelle nous prenons tant de médicaments est que les compagnies pharmaceutiques ne vendent pas des médicaments, elles vendent des mensonges au sujet des médicaments« …
De vrais changements pour un vrai changement d’image ?
Pour éviter le rejet et éviter d’être perçue comme de l’enfumage, une campagne de communication honnête devrait d’abord faire amende honorable par rapport à ces errements, c’est-à-dire admettre ces erreurs.
Elle devrait ensuite mettre en place des mécanismes pour éviter qu’ils ne se reproduisent. Elle pourrait par ailleurs mieux associer les citoyens dans les débats de société la concernant. Car tout expert en communication vous le dira : on peut « mieux communiquer » autant qu’on veut, une image ne change pas tant que les pratiques ne changent pas.
Or il en va ici de l’intérêt de notre santé à tous. Beaucoup, parmi nos lecteurs de consoGlobe, en sont venus à tourner le dos en partie ou complètement à la médecine techno-scientifique. Ce choix est compréhensible par ses motivations et respectable par son souhait d’un mode de vie plus naturel et sain.
On doit néanmoins s’interroger sur les limites d’une liberté individuelle qui rejetterait ce que cette médecine peut apporter de bon et qui, ce faisant, nuirait aux autres. Comme le montre le débat sur les vaccins, le refus de certains n’est possible que parce que les non-vaccinés risquent peu ou pas d’être inoculés, justement parce que la grande majorité de la population est vaccinée. Mais quand seulement la moitié des Français en arrive à estimer que les vaccins apportent plus de bénéfices que de risques, on peut se demander si on ne risque pas d’atteindre un jour un point de bascule aux conséquences néfastes pour tous.
Il en va aussi de la foi en la science, car la confusion se diffuse entre « vraie » et « fausse » science. Pour que les consommateurs et les citoyens distinguent le bon grain de l’ivraie, les scientifiques et les industriels doivent eux-mêmes mieux dénoncer et corriger les errements de certains en leur sein. Et ce, #sansrépit… comme le répète le mot d’ordre de cette campagne.
Illustration bannière : Production de médicaments © u3d