L’Union européenne se réveille avec la gueule de Brexit ce vendredi 24 juin. Quelles seront les implications pour la politique européenne environnementale ?
Les lois européennes sont essentielles pour la gouvernance des terres, des océans et de l’atmosphère, ainsi que pour notre sécurité énergétique en Europe. Et la pollution ne s’arrête pas aux frontières, quel que soit le résultat d’un référendum. Les défis environnementaux des prochaines années nécessitent toujours plus de coopération internationale plutôt que moins : application de l’Accord de Paris en matière climatique, déclin de la biodiversité, la mise en oeuvre d’une économie circulaire, la protection des océans, et un système agricole plus durable. La sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne n’est pas une bonne nouvelle pour l’environnement. Au Royaume-Uni, et dans toute l’Europe.
Si le Royaume-Uni était décrit dans les années 70 comme « the dirty man of Europe » (l’homme sale de l’Europe), au cours des années passées le Royaume-Uni a joué un rôle décisif dans la formation de politiques européennes plus favorables à l’environnement dans de nombreux cas de négociations européennes, pesant dans la balance face à des États membres plus réticents, comme bien souvent la France. Et, à l’inverse, l’Union européenne, comme le soulignent de nombreuses associations environnementales britanniques, a permis de mieux protéger l’environnement et la santé des citoyens d’Outre-Manche.
Le Royaume-Uni a souvent été un champion de l’environnement au sein de l’Union européenne
Au-delà des préférences et opinions individuelles sur l’opportunité pour le Royaume-Uni de sortir de l’UE, il faut se rendre à l’évidence : la Grande-Bretagne aura été ces dernières années, dans de nombreux cas – bien sûr pas toujours – force de progrès dans le domaine environnemental.
Ce fut le cas pour la définition de l’objectif climatique pour 2030 de l’UE, où le Royaume-Uni a poussé pour une réduction plus ambitieuse d’« au moins 40 % » qui a finalement été confirmée, tandis que d’autres pays, menés par la Pologne, voulaient limiter l’objectif à 30 %. Cette position plus élevée a pesé dans les négociations internationales présidant à l’accord international de la COP21 à Paris en décembre 2015.
Le Royaume-Uni a été parmi les plus influents des États membres dans l’élaboration des politiques de l’UE.
IEEP
Le Ministère des Finances britannique, dirigé par le très conservateur Chancelier de l’Échiquier George Osborne, notait quelques semaines avant le référendum dans un rapport officiel sur l’impact de l’appartenance que « le paquet énergétique européen publié en février 2015 sera bénéfique au Royaume-Uni ».
L’IEEP, institut privé européen de réflexion sur l’environnement – basé à Londres -, note que « le Royaume-Uni a été parmi les plus influents des États membres dans l’élaboration des politiques de l’UE ». À l’inverse, séparer le droit européen, national et international de l’environnement sera « un défi considérable et une source d’incertitude importante ».
La nature en Grande-Bretagne plus vulnérable après le départ du Royaume-Uni ?
Qualité des eaux, directive sur la qualité de l’air, protection de la faune et de la flore… Pour les Amis de la Terre Royaume-Uni, écrivant avant le référendum, le bilan était clair : « les politiques environnementales les plus importantes du Royaume-Uni qui maintiennent les destinations touristiques populaires propres et attrayantes, nos normes de l’air et de qualité de l’eau et créent des opportunités économiques pour les industries du Royaume-Uni, viennent de notre adhésion à l’UE. »
L’IEEP conclue : « il est probable qu’un éventuel départ du Royaume-Uni de l’UE laisserait l’environnement britannique dans une position plus vulnérable et incertaine que si elle devait rester en tant que membre de l’UE. Un futur gouvernement pourrait soit accepter les décisions que d’autres feront pour eux, ou être relativement libre dans sa capacité à agir de manière indépendante, y compris la possibilité d’abaisser les normes environnementales, dans une course à l’avantage concurrentiel. »(1)
De fait, le scénario désormais le plus probable est que le Royaume-Uni reste actif au sein de l’Espace Économique européen et qu’à l’instar de l’Islande ou de la Norvège, les lois européennes s’appliquernt toujours au Royaume-Uni, qui par exemple, continuera probablement à appartenir au système d’échange de permis d’émission de CO2. Mais sans que le Royaume-Uni puisse toutefois intervenir dans les décisions européennes relatives à l’environnement. Laissant les États généralement progressistes en la matière, tels que les pays scandinaves, moins forts face notamment au bloc des pays de l’Est.
Qui plus est, le référendum donne plus de poids à une partie de l’échiquier britannique globalement plus hostile aux politiques de défense de l’environnement. James Goodman, directeur au Forum for the Future, notait ainsi quelques jours avant le référendum, que le rejet de l’Union européenne favoriserait ceux « favorables à la fraction hydraulique sous les parcs nationaux, à la privatisation de nos forêts, à l’appauvrissement de la biodiversité, c’est un saut massif en sens contraire d’un avenir commun ».