La cigarette, un produit de très haute technologie
En retraçant plus d’un siècle d’évolution, Proctor nous démontre combien une cigarette est le résultat d’un processus ininterrompu d’améliorations techniques et de recherches scientifiques. « La cigarette est l’un des petits objets les plus soigneusement conçus de la planète ».
Tout au long du siècle, des chercheurs ont été payés pour sophistiquer le papier, les ingrédients, les filtres, la fumée, la communication de la cigarette. C’est la manipulation de la chimie du tabac afin d’accroître la puissance, les propriétés excitantes et le pouvoir d’accoutumance du tabac qui a ont fait l’objet du plus grand effort de recherche. Tout a été mis en oeuvre de manière systématique pour apprendre aux gens à fumer, pour rendre la cigarette aussi banale que le jus d’orange ou les carottes.
La seconde invention la plus meurtrière
L’explosion des ventes mondiales de cigarettes s’est appuyée sur l’utilisation de machines à fabriquer des cigarettes dont la productivité s’est littéralement envolé, faisant baisser le coût d’une cigarette à des niveaux ridicules (moins de 1 cent) . A tel point qu’aucun bien de consommation, aujourd’hui encore, ne rapportte autant de recettes. Comme le disait Warren Buffet, administrateur de RL Reynolds, en parlant de la Camel :« elle coûte 1 cent à fabriquer, et elle se vend un dollar. Il y a de quoi être accro… ».
Qui a visité une usine de cigarettes ? Personne !
La longue mise au point des machines tout au long du siècle s’est faite dans le plus grand secret. Personne n’a jamais visité une usines de cigarettes, ni même vu en photo. C’est l’entreprise allemande, Hauni AG qui a remporté la triste palme avec des machines vendues une fortune mais capables de sortir 20.000 cigarettes à la minute ! Arriver à cracher des cigarettes à une telle vitesse a exigé des prodiges de technicité et d’innovation, aujourd’hui maîtrisés.
Allumettes et cendriers
Le rôle des allumettes, comme des briquets, a été crucial pour rendre facile l’acte de fumer en tout lieu et à tout moment. Et pour aller au bout de leurs efforts de promotion, les fabricants de tabac ont réussi à convaincre l’industrie automobile à installer des cendriers dans toutes les voitures. Ils ont si bien réussi que les cendriers ont envahi notre quotidien et qu’on en trouve encore dans les endroits non-fumeurs.
La conquête de tous les publics
Avec un cynisme tout à fait conscient – comme le prouvent les archives internes – les industriels du tabac se sont attaqués à la conversion d’un public après l’autre : tout d’abord les jeunes mâles américains, puis européens. Puis les femmes. Puis ce sont les enfants, qui ont fait l’objet de troubles stratégies de marketing avec des pseudos campagnes de prévention ou bien la promotion de cigarettes en chocolat.
Des cigarettes en chocolat destinées aux enfants
Dès 1953, la conspiration s’était mise en place.«Le 14 et le 15 décembre 1953, au Plaza Hotel, dans le centre de Manhattan, sous la présidence du président d’American Tobacco, toutes les compagnies sont là, réunies. Et tombent d’accord.» Les industriels du tabac confie à l’agence de relations publiques Hill and Knowlton la noble mission négationniste destinée à dissiper les craintes des consommateurs et des pouvoirs publics «en communiquant sur le fait que le secteur fait tout ce qui est en son pouvoir pour cerner la vérité et corriger les défauts des cigarettes». Pendant des décennies cette détestable agence utiliserait des budgets énormes pour son travail de désinformation à l’échelle planétaire.
Conquérir tous les pays du monde
Et maintenant, que la législation se durcit aux Etats-Unis et en Europe, ce sont les pays d’Asie et les pays les plus pauvres dans lesquels sont déployées toutes les techniques désormais interdites en Occident : distribution gratuite de cigarettes au cinéma, publicités en tous genres, sponsoring, embauches de médecins, etc ;
La guerre contre le tabac bientôt gagnée ! ?
Comme le démontre Golden Holocaust, on peut douter de la réelle détermination des pouvoirs publics à éradiquer le tabac et à stopper au plus vite l’hécatombe qui s’annonce, en Inde, en Chine, aux USA, en Indonésie, …
Car, comme le démontre le livre, on sait depuis longtemps qu’il suffirait que la Loi impose quelques changements clés pour réduire de manière drastique les méfaits du tabac.
Et pourtant, les Autorités américaines (la FDA) et européennes, les Parlements nationaux ne prennent pas ces décisions. Pourquoi ?
L’ampleur des recettes fiscales qui met les Etats sous dépendance n’explique pas tout. «La taxation du tabac par les gouvernements va rendre les Etats de plus en plus complices». Et Robert Proctor y voit bien le résultat de la « conspiration » mondiale des industriels du tabac, dont l’habileté et le cynisme n’ont d’égal que la puissance et le manque de scrupules. Alors que faudrait-il faire pour arrêter l’hémorragie ?
10 solutions évidentes mais ignorées
Ces solutions mettent en cause la conception même de la cigarette : nous les décrivons ici brièvement, mais nous pourrons revenir dessus si vous le souhaitez.
Des mesures qui ne surprennent pas vraiment :
- Interdire de fumer dans tous les lieux publics fermés et tous les espaces publics extérieurs fréquentés par la collectivité.
- Augmenter les taxes sur le tabac
- Interdire tout marketing sur le tabac, y compris toute publicité et toute promotion
- Imprimer sur les paquets de cigarettes des avertissements de grand format, illustrés et repoussants
- Interdire la vente de cigarette partout, sauf dans les points de vente étatiques
- Modifier la classification des longs-métrages où l’on fume
- Supprimer toutes les subventions et tous les soutiens au tabac
- Augmenter les financements pour la prévention et l’arrêt du tabac
- Enseigner très tôt la prévention du tabagisme
- Ecouter la voix des fumeurs qui vont, pour la plupart, mourir de leur addiction.
et des mesures étonnantes :
11- Il suffirait de rendre les cigarettes non inhalables en augmentant le pH de la fumée : elles seraient beaucoup moins létales et cette simple modification en ferait une habitude non addictive »
12 – Réduire le taux de nicotine légalement autorisé : la nicotine est la condition sine qua non de toute addiction tabagique. Aux Etats-Unis, rien n’empêche la FDA d’instaurer un seuil maximal de 0,5 mg par exemple, au lieu des 10 mg actuels. « Cela permettrait aux fumeurs d’avoir « le goût » et leur procurerait le plaisir qu’ils retirent à caresser l’objet ou à en contempler la fumée ». Pourquoi, les législateurs ne s’attaquent-ils pas à l’addiction avec cette si simple mesure ?
13 – Taxer ou interdire la machine à rouler les cigarettes (de Hauni et de G.D.), qui sontles plus meurtrières de l’histoire de l’humanité.
Le calcul est simple, « comme il meure 1 personne à chaque million de cigarettes fumées, cela signifie que par tranches de 8 huit heures, chacun de ces engins provoque la mort de 10 personnes ». Taxer ou ralentir ces machines serait un excellent moyen de réduire la mortalité par le tabac
14 – Mettre un terme à la recherche financée par l’industrie dans toutes les facultés et universités.
15 – Poursuivre les trafiquants en justice
La mort mondialisée
Evidemment, si ces 14 mesures sont proposées, c’est qu’elles ne sont pas appliquées aujourd’hui. Alors que penser d’un tel ouvrage, dont nous n’avons oublié de grands et passionnants passages ; notamment « La mort mondialisée« , chapitre de clôture, qui fait froid dans le dos.
Golden Holocaust fait partie de ces livres coup de poing dont on sort un peu sonné, enrichi de connaissances nouvelles et si révoltantes parfois, qu’on a envie de les partager. On a envie de prêter le livre à ses proches, aux fumeurs, en leur disant, lisez, lisez et vous ensuite vous fumerez en connaissance de cause…
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